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Musique et musiciens d’Église dans le département de la HAUTE-SAÔNE autour de 1790
La Haute-Saône, comme le département voisin du Doubs, et comme celui, plus méridional, du Jura, est taillée en février 1790 dans l’ancienne province de Franche-Comté. La province était pour l’essentiel couverte par le diocèse de Besançon. La Haute-Saône se trouve donc être un département à la fois sans capitale et sans cathédrale – ce qui ne signifie pas sans musiciens d’Église. Mais, avec seulement deux localités de quelque importance, Vesoul et Gray, ceux-ci sont difficiles à débusquer.
Les principales sources réquisitionnées pour ce faire dans le cadre de l’enquête Muséfrem ont été, d’abord, les documents des années 1790 produits localement puis envoyés aux instances parisiennes et aujourd’hui conservés aux Archives nationales (sous-série D XIX, dont les dossiers individuels se sont révélés d’une réelle richesse), ou le même type de documents conservés localement dans la série L des Archives départementales. Ont également été consultés les inventaires d’abbayes et de couvents de la série Q, les comptes monastiques de la série H et les derniers registres capitulaires de la collégiale de Vesoul. L’enquête a été complétée à distance par des investigations dans les registres paroissiaux et d’état-civil mis en ligne, ainsi que par des dépouillements bibliographiques divers.
L’historien Jean Girardot (1900-1996) a consacré sa vie entière à l’étude de la Révolution en Haute-Saône, en a tiré de très nombreux ouvrages et a légué des milliers de pages de « notes pour servir à l’histoire de la Haute-Saône pendant la Révolution » aux archives départementales.
Plus proche des sujets Muséfrem, l’historien des orgues Jacques Gardien – qui, guerre oblige, travaillait largement à distance – se plaint acerbement en 1943 de n’avoir pas trouvé auprès des services d’archives haut-saônois « l’accueil et la diligence » qu’il s’estimait en droit d’attendre, il dénonce même une « torpeur » qu’il n’est pas parvenu à secouer. En effet, les recherches menées récemment, par l’équipe Muséfrem ou par Pierre Marie Guéritey, ont fait surgir des documents auxquels Gardien n’avait manifestement pas eu accès au début des années 1940.
Nous remercions particulièrement Aurélia Benas, des Archives départementales de la Haute-Saône, pour l’appui qu’elle a apporté à Muséfrem, et pour l’intérêt qu’elle porte aux musiciens de ce temps.
I – UN TERRITOIRE FAIBLEMENT URBANISÉ MAIS PROSPÈRE
Le territoire de la Haute-Saône correspond pour l’essentiel au bailliage d’Amont qui constituait approximativement le tiers septentrional de la province de Franche-Comté – province devenue française en 1674 seulement, rappelons-le. Si la Franche-Comté dans son ensemble avait été durement éprouvée par les guerres du XVIIe siècle, elle retrouve la prospérité au siècle suivant, et la partie haut-saônoise en devient la plus florissante et la plus peuplée.
• Des plaines de la Saône aux contreforts vosgiens
Contrairement aux préconisations de la Constituante en 1790, qui souhaitait dans l’idéal des départements de forme circulaire afin que toutes les localités soient théoriquement situées à moins d’une journée de cheval du chef-lieu, la Haute-Saône présente une forme allongée orientée sud-ouest/nord-est. Vesoul, le chef-lieu, est néanmoins en situation relativement centrale. C’est d’ailleurs sa position centrale qui – après débats – l’a fait choisir de préférence à Gray, ville plus importante commercialement, mais plus excentrée et aussi un peu moins peuplée.
Le département tient son nom du fait qu’il accueille le cours supérieur de la Saône, qui du nord au sud-ouest sinue longuement dans la zone de plaine qui forme une grande partie du territoire, de Châtillon-sur-Saône [Vosges] à Heuilley-sur-Saône [Côte-d’Or], en passant par Jussey et Gray [Haute-Saône]. À l’inverse, la zone nord-est est marquée par les reliefs des Vosges du sud : c’est là que se trouve le ballon de Servance, 1 216 mètres d’altitude, à la limite des Vosges et de la Haute-Saône – dont il est le point culminant.
• Une armature urbaine équilibrée sans capitale marquante
Le nouveau département est une zone qui n’a jamais été très peuplée. Les premiers chiffres globaux disponibles datent de 1801 et donnent à la Haute-Saône presque 300 000 habitants, chiffre, notons-le au passage, supérieur à ce qu’il est aujourd’hui (235 000).
L’atlas des 84 départements français publié en 1793 par Louis-Marie Prudhomme indique qu’en Haute-Saône « les principales villes sont Vesoul, Gray, Luxeuil, Champlitte ». Vesoul, choisie pour chef-lieu, compte 5 800 habitants à la fin de l’Ancien Régime et est en effet suivie de Gray, au sud-ouest, avec 4 700 habitants, puis Luxeuil-les-Bains au nord-est, avec 3 000 habitants. Champlitte à l’ouest et Jussey, au nord-ouest, que Prudhomme ne cite pas, sont à peu près à égalité (entre 2 600 et 2 700 habitants). Le reste du tissu urbain est constitué de Lure à l’est (2 000) et Héricourt au sud-est, située entre Belfort et Montbéliard, qui atteint péniblement 1 500 habitants. Ces villes sont donc toutes des petites, voire très petites villes, bien loin numériquement de la capitale provinciale, Besançon, qui compte environ 32 000 habitants en 1789-1790. Toutes sauf Héricourt deviennent chef-lieu de district en 1790 : Champlitte, Gray, Jussey, Lure, Luxeuil et Vesoul.
Pendant trois ans et demi, entre octobre 1793 et ventôse an V (mars 1797), la Haute-Saône possède un septième district, celui de Montbéliard, annexé par la France. Après cette date, Montbéliard sera rattaché successivement au département du Mont-Terrible, au Haut-Rhin, puis en 1815 au Doubs (voir le chapitre Doubs).
Signalons que parmi les préfets qui exerceront ultérieurement en Haute-Saône figure le fils d’un chantre nommé Jacques THIERRY (1763-1836) qui avait été en exercice à la cathédrale de Blois avant et après la Révolution. Monsieur le Préfet de la Haute-Saône honore de sa présence le mariage de l’un de ses frères, à Luxeuil en 1832, ce frère n’étant autre… qu’Augustin Thierry, le grand historien.
• Agriculture diversifiée et proto-industrie pionnière
Dans ce monde largement rural, l’activité est essentiellement agricole (polyculture, élevage bovin…) et forestière. L’Atlas des 84 départements français résume : « Ce pays est fertile en quelques espèces de grains & en pâturages ; on y recueille aussi du maïs ; il y a des vignes, mais en général le vin de ce pays est froid ». Ce dernier adjectif peut surprendre car comme en Bourgogne les vignes sont plantées sur des coteaux exposés au sud et au sud-ouest, bénéficiant ainsi d’un bel ensoleillement.
Dès le XVIe siècle, des veines de houille de faible qualité avaient été découvertes et exploitées artisanalement dans le sud-est du territoire. Au milieu du XVIIIe siècle commence, dans des galeries à flanc de coteaux, l’exploitation intensive de la houille du bassin minier de Ronchamp et Champagney, à l’est de Lure. Cette activité s’est poursuivie – par des puits d’extraction de plus en plus profonds – jusqu’au milieu du XXe siècle. Elle a fortement marqué les paysages et la culture locale (immigration polonaise, traditions minières, conscience de classe…). D’autres activités proto-industrielles ont existé ici ou là à la veille de la Révolution : salines (depuis le XIIe siècle), forges, verreries, papeteries, faïenceries, filatures… Le XVIIIe siècle fait figure de période prospère pour la région.
Même si la langue française s'est imposée depuis longtemps chez les élites en Franche-Comté, la population dans son ensemble reste comtophone au XVIIIe siècle, parlant le franc-comtois – ou langue comtoise –, qui appartient au même groupe linguistique que le picard, le wallon et le lorrain.
• Un département sans cathédrale mais au riche passé religieux
Seules les zones autour d’Héricourt et de Montbéliard sont marquées par une certaine présence protestante, le reste de la région étant résolument catholique.
Aucune cathédrale d’Ancien Régime ne se trouve sur le territoire haut-saônois puisque, jusqu’en 1789, il appartient pour l’essentiel au vaste diocèse de Besançon, à l’exception d’un fragment occidental autour de Champlitte et d’Autrey-lès-Gray, qui est du ressort du diocèse de Dijon (depuis sa création en 1731, avant cette date, cette étroite zone appartenait au diocèse de Langres). Quatre collégiales, en revanche, existaient dans les limites du territoire : Saint-Georges de Vesoul, Notre-Dame de Gray, Saint-Christophe de Champlitte et Saint-Pancrace de Ray-sur-Saône. La première est celle dont les archives sont les plus riches, notamment la seule à avoir conservé des délibérations capitulaires courant jusqu’en 1790 (mais ces délibérations ne mentionnent ni les effectifs du bas chœur, ni les réceptions et licenciements d’enfants de chœur, de musiciens ou de chantres).
On compte également une vingtaine de « familiarités » (communautés de prêtres d’une paroisse, ordinairement originaires de celle-ci et vivant des revenus d’un fonds commun), dont celles de Gray et de Gy ont laissé d’importantes archives.
Le personnage emblématique de l’histoire religieuse locale est saint Colomban, fondateur de l’abbaye de Luxeuil à la fin du VIe siècle. D’autres puissantes abbayes sont nées durant la longue période médiévale : Lure, Notre-Dame de Faverney, Cherlieu, Bithaine… Toutes ne font pas la même place à la musique à la fin de l’Ancien Régime.
Enfin, le temps de la Réforme catholique a été ponctué de nombreuses créations de couvents dans la plupart des villes (Capucins, Ursulines et Annonciades à Vesoul ; Carmes Déchaussés, Tiercelines, Ursulines, Visitandines, Annonciades célestes et Carmélites à Gray ; Capucins à Lure…).
Jean Girardot observe que, en dehors de quelques épisodes ponctuels, la guerre religieuse pendant la Révolution n’atteint pas en Haute-Saône un degré de violence élevé. Comme dans beaucoup de départements, il est difficile d’établir des statistiques précises et indiscutables concernant les choix du clergé face à la Constitution Civile. Girardot, après un dépouillement complet des documents existants aux Archives départementales de la Haute-Saône, a abouti à une proportion des deux tiers de réfractaires parmi le clergé haut-saônois, la plupart pouvant en réalité être regardés comme des « assermentés conditionnels ».
Le 13 mars 1791, à Vesoul, Jean-Baptiste Flavigny, curé de la principale église de la ville, Saint-Georges, est élu premier évêque de la Haute-Saône.
II – LES TROIS CAPITALES MUSICALES : VESOUL, GRAY et LURE
La capitale provinciale est Besançon, située hors du territoire du nouveau département. Celui-ci est dominé par deux villes rivales, Vesoul et Gray. Et l’on découvre que la collégiale de Lure parvient à faire jeu égal, voire supérieur, avec les églises de ces deux villes.
• • • Vesoul et sa collégiale Saint-Georges
La ville s’est développée au pied de la butte de la Motte qui, à 378 mètres d’altitude, surplombe la vallée du Durgeon. Cette butte avait été couronnée au Moyen Âge de fortifications, détruites et réédifiées plusieurs fois jusqu’au XVIIe siècle. La population augmente fortement au cours du XVIIIe siècle : 2 200 habitants en 1698, 5 800 en 1790. Une telle croissance a nécessité au fil du siècle un réaménagement important de la ville et de nouvelles constructions. Les faubourgs se sont développés hors les murs : commerçants et aubergistes dans le Faubourg-bas (n° 20 sur le plan de 1787), riches bourgeois, magistrats anoblis dans le Faubourg-haut (n° 19). Les Capucins, initialement implantés en milieu rural à l’est de la ville, se voient presque rejoints par le tissu urbain (n° 7).
• Un chef-lieu de bailliage qui joue les capitales provinciales
Cette progression démographique s’appuie sur des activités très diversifiées. Vesoul n’est plus seulement un important centre agricole, avec des marchés et des foires très actifs. C’est aussi une ville commerçante et administrative, dotée de divers équipements. Un collège est attesté dès la fin du XVIe siècle et confié aux Jésuites à la rentrée de 1610 (n° 6). Après leur expulsion, l’établissement est maintenu par le corps de ville jusqu’à sa transformation en école centrale en 1796. L’hôpital, qui datait de 1619, est agrandi (n° 8). Il est doté d’une chapelle à la fin du XVIIe siècle, où l’archevêque de Besançon donne l’autorisation de célébrer la messe. Une bibliothèque publique est fondée en 1771 et s’enrichit régulièrement ensuite. Elle est ouverte deux après-midis par semaine. L’amélioration des routes et le développement de la poste aux chevaux multiplient les relations de toutes natures. Des diligences, messageries royales et voitures publiques relient Vesoul à toutes les villes de la province, ainsi qu’à Paris, Langres, Belfort, l’Alsace et la Lorraine.
Une bourgeoisie en pleine expansion soutient tout le spectre des artisanats urbains. Les nouveaux venus payent chaque année un léger « droit de manantage » qui leur permet de résider dans la ville et d’y exercer une fonction ou un métier sans être « bourgeois de Vesoul ».
L’intendant de Franche-Comté est représenté à Vesoul par un subdélégué. L’activité administrative suscitée par le statut de chef-lieu du bailliage d’Amont (l’un des quatre grands bailliages de Franche-Comté) se renforce notamment à partir de l’institution d’une maîtrise des Eaux et Forêts en 1692 et de celle d’un présidial en 1696, matérialisée par l’édification de l’hôtel du Présidial (n° 2) entre 1765 et 1771, à la place des anciennes halles, sur décision de l’intendant. Lorsque, à la rentrée de 1700, les Jésuites s’étaient engagés à entretenir un régent de philosophie, ils justifiaient cette création de classe par la nécessité de « rendre la jeunesse tant plus capable de remplir les emplois de justice qui sont en grand nombre dans la ville » (Monnier, 1909, p. 255).
Presqu’un siècle plus tard, en témoigne toujours la présence d’innombrables « hommes de loy » – sans plus de précision – dans un document extraordinaire daté de mai 1793, conservé aux archives départementales (LN-550). Ce recensement avant la lettre se présente sous la forme de plus de cinq cents fiches, une par maison, remplie et signée par le propriétaire ou par le principal locataire, donnant les noms, les âges et, pour les adultes, la profession de chacun des habitants de la maison concernée, ainsi que, le cas échéant, le lieu d’où ils sont originaires. Bien que n’étant probablement pas exhaustif et bien que correspondant au contexte particulier de la guerre (nombreux jeunes hommes « volontaires », « quanoniers [sic]»), ces fiches permettent de voir Vesoul à une date très proche de la cible muséfrémienne.
• Une église collégiale et paroissiale devenue brièvement cathédrale
Vesoul : la façade ouest de l'église Saint-Georges (cl. J. Mossot, 2008 / Structurae)
L'église Saint-Georges de Vesoul (n° 1) possède la fonction de collégiale depuis le milieu du XVIIe siècle, à la suite de bulles papales prononçant l’union entre l’ancien chapitre, ruiné, de Calmoutier (à dix kilomètres de là) et le prieuré de Marteroy (aux portes de Vesoul). Les chanoines avaient alors quitté définitivement Calmoutier pour Vesoul et l'église Saint-Georges de cette ville était devenue collégiale avec un chapitre de neuf prébendes.
C'est au sein du même édifice que se pratique le culte de la paroisse Saint-Georges. Aussi l’église est-elle fréquemment désignée dans les sources sous la formule « l'Insigne église collégiale et paroissiale de Saint-Georges de la ville de Vesoul ». Dans la même logique, l'orgue et l'organiste sont mutualisés entre le chapitre et la Ville.
L'église, en mauvais état, a été reconstruite de 1736 à 1745, et consacrée solennellement en 1756 par le cardinal de Choiseul, archevêque de Besançon. Entre 1763 et 1765, un nouvel orgue est installé par Joseph RABINY pour remplacer le précédent. C’était le premier grand orgue construit par le jeune facteur et il a été sévèrement critiqué. Plus tard, en 1808, son gendre François CALLINET en parlera pudiquement comme du premier ouvrage : « d’un facteur auquel je suis attaché, auquel il manquoit l’expérience nécessaire ».
En 1790, l’organiste qui le touche est l’Alsacien Christian JÄGER (père), engagé depuis mai 1771, après avoir été d’abord organiste des bénédictins de Dole. À Vesoul, son périmètre d’action s’élargit notoirement puisqu’il est non seulement organiste, mais devient aussi chantre, musicien et maître des enfants de chœur (on remarque que le titre de maître de musique n’est pas employé à son sujet). Pour toutes ces charges, il reçoit 300 livres par an (150 livres chaque semestre) à titre personnel, ainsi que 66 livres en argent spécifiquement destinées à l’entretien des enfants de chœur tout comme « 18 quartes de blé ». Si les garçons de la maîtrise sont probablement au nombre de quatre, l’identité de ceux de 1790 reste inconnue.
Le fichier des maisons de 1793 comporte deux mentions d’enfants de chœur, mais il s’agit manifestement du même, Benoît MARLIN, âgé de 10 ans. Il est énuméré une fois avec ses quatre frères et sœurs à la suite de sa mère qui, veuve et journalière, est locataire de l’évêque de la Haute-Saône. Benoît MARLIN réapparaît sur une autre fiche, logé dans la famille Jäger, rue de l’Ancienne Mairie. Au milieu des nombreux enfants Jäger de tous âges, il est sans doute éduqué à la musique par Mathieu JÄGER, devenu chef de famille après le décès de son frère. Les JÄGER ont en quelque sorte reconstitué une maîtrise à domicile, à la différence près que les filles sont nombreuses dans ce groupe d’enfants. Rien ne certifie que Benoît MARLIN, né à la toute fin de 1782, ait été déjà enfant de chœur à la collégiale en 1790. Et le dernier registre capitulaire, contrairement à ce qu’on en espérait, n’a pas apporté la réponse sur ce point.
Les chantres sont également quatre, au moins depuis 1742 : « Les Doyen & chanoines de l’église Collégiale de Vesoul ont obtenu, par décret du 24 janvier 1742, l’union de neuf Chapelles à leur Chapitre, à l’effet de salarier quatre Chantres nécessaires pour la célébration & la plus grande décence du service divin. » [Les Affiches de Franche-Comté, 4 février 1780]. L’un des quatre est l’organiste, Christian JÄGER, dont la rémunération provient pour un tiers (100 livres) du revenu de ces chapelles réunies. Comme le sien, le dossier de Desle-François LARÈRE a été retrouvé aux Archives nationales et apporte des précisions intéressantes : prêtre, il est entré au service du chapitre en 1764 aux gages de 400 livres par an et porte le titre de « premier chantre ». Les deux autres chantres sont vraisemblablement, selon les comptes retrouvés les plus proches chronologiquement de la Révolution (1786), les sieurs Claude-François FIQUET et François MAGNIEN, rémunérés 300 livres pour l’un et 400 pour l’autre.
Ce dernier était en poste depuis longtemps, vraisemblablement depuis 1743 au moins puisque, cette année-là lorsqu’il se marie, l’un de ses témoins est le maître de musique Claude MONFILS (1703-1787). Un peu plus tard, à l’occasion des baptêmes de ses enfants, François MAGNIEN est dit « musicien organiste de la ville de Vesoul », au moins de 1754 à 1763, probablement jusqu’à ce que commencent les travaux de RABINY sur le nouvel orgue puis que, en 1771, Christian JÄGER soit nommé à la tribune.
Christian JÄGER décède à l’âge de 45 ans en avril 1792, alors nanti du titre d’« organiste de la cathédrale », son bâton de maréchal – la ci-devant collégiale étant devenue cathédrale du nouveau diocèse de la Haute-Saône. Sa veuve réclame que son fils aîné, Jean-Baptiste, âgé de 18 ans, soit nommé sur le poste d’organiste « attendu quil est en état d'en faire le service », nouvel exemple de transmission père/fils efficace. Mêlant aide sociale et souci du faste cultuel, les administrateurs départementaux acceptent et dotent le poste de 1 200 livres par an, qui seront payés 300 livres par trimestre, « à charge que ladite somme ne pourra être touchée que par la Veuve Yäger pour être employée à l'entretien de sa famille ». Toutefois, lorsque, le 7 avril 1793, la mère de Jean-Baptiste va chercher le salaire correspondant au trimestre échu de travail de son fils, le payeur général du Département refuse. Le Département s’empresse d’écrire au ministre de l'Intérieur à ce sujet, lequel répond le 30 avril 1793 que cette nomination contrevient à la loi. Les administrateurs départementaux sont donc désavoués par l’administration centrale. Le jeune homme abandonne alors la tribune, mais il n’en reste pas moins musicien : en 1807, témoin au mariage de l’un de ses jeunes frères, il est dit « artiste de musique ».
L’orgue de Saint-Georges reste muet durant quelques années, « dégradé par l’enlèvement de quantité de tuyaux en étaing ». Lorsqu’on le retrouve en fonctionnement, à une date incertaine, c’est Mathieu JÄGER, oncle du jeune organiste précédent, qui le touche, et ce jusqu’à sa démission en 1847 (P. M. Guéritey, 2019).
• Fondé par Anne de Xainctonge durant l'année 1615, le monastère des Ursulines (n° 5) de Vesoul est le quatrième établissement religieux créé dans la ville au début du XVIIe siècle (après le collège des Jésuites ouvert le 23 septembre 1610, le couvent des Capucins et celui des Annonciades). Une chapelle y est édifiée en 1632. Les documents dépouillés n’ont livré aucune trace d’orgue dans ces établissements.
• • • Gray et son église paroissiale Notre-Dame
Située aux confins de la Bourgogne et de la Franche-Comté, sur la Saône, Gray est « comptée parmi les principales villes de Bourgogne » dans l’ouvrage de l’humaniste Gilbert Cousin, ancien secrétaire d’Érasme, qui la décrivait ainsi :
Elle est fort jolie et bâtie sur les rives de la Saône, dotée de bien des richesses, favorisée de bonnes cultures, montrant çà et là de magnifiques constructions avec des rues bien alignées, et dans les carrefours des sources d'eau limpides. (Description de la Haute-Bourgogne connue sous le nom de Comté, ouvrage rédigé en latin, paru en 1552).
• Une capitale en second
Malgré les guerres du siècle ayant suivi cette Description, cette image subsiste partiellement à la fin de l’Ancien Régime. L’Almanach historique de Besançon et de la Franche-Comté pour l’année 1785, affirme que « cette ville forme un amphithéâtre qui domine une très belle prairie ; & depuis son château, bâti sur le haut de la colline, on jouit d’une des plus agréables vues du monde » (p. 241). La ville compte alors environ 4 700 habitants, dont une part peut être rangée dans les milieux bourgeois et cultivés. Siège de bailliage et présidial, la ville est dirigée par un magistrat, présidé par un vicomte-mayeur et composé de quatre échevins et de huit conseillers et autres officiers. Sa situation de carrefour (entre Dijon, Dole, Langres, Besançon et Vesoul) et son port sur la Saône permettent l’épanouissement des activités commerciales. La ville comporte un collège, anciennement prémontré puis jésuite, où en 1785 des prêtres séculiers enseignent de la cinquième à la philosophie comprise. La ville dispose de plusieurs institutions de charité, un hôpital ou hôtel-Dieu fondé par une société des Dames, un hôpital du Saint-Esprit qui recueille les enfants trouvés, le Bouillon des Pauvres qui, comme son nom l’indique, dispense une assistance alimentaire (Almanach historique…, 1785).
Ces « bourgeois de Gray » soutiennent aussi la vie culturelle, notamment musicale. Lorsque, le 14 juillet 1790, Gray célèbre la Fédération, une relation contemporaine rapportée au siècle suivant par les abbés Gatin et Besson, raconte les festivités. Lors de la grand'messe du matin, la musique est évidemment présente : « plusieurs musiciens célèbres ont exercé leurs talents pendant le cours de cette messe ». Un seul nom est cité, celui de M. SYLVANT, le cadet, « entre autres ». Or le profil de ce musicien soi-disant célèbre est typiquement celui d’un amateur, et non d’un musicien de profession. Tant lui-même que les hommes de sa famille et de sa belle-famille appartiennent au monde des officiers de justice, siégeant au bailliage et présidial.
• À Notre-Dame, un maître de musique organiste chargé des enfants de chœur
La plus importante église de la ville est Notre-Dame, église paroissiale nantie d’une « familiarité » de douze prêtres. Si le plain-chant est sans doute assuré pour l’essentiel par ces derniers, l’église dispose d’un orgue – de la facture initiale de Claude VALENTIN, entièrement reconstruit par Karl-Joseph RIEPP de 1746 à 1749 pour 4 800 livres. L’organiste qui le touche est également chargé des enfants de chœur et porte le titre de « maître de musique et organiste ». Cette double fonction est répétée à l’envi dans tous les documents relatifs au sujet.
Immédiatement après le décès, le 4 mars 1782, d’Antoine BOURDELET une annonce précise le profil du poste libéré : « On demande à Gray un maître de Musique qui sçache la musique vocale & instrumentale, & toucher de l’orgue, pour l’enseigner à trois enfants de chœur ». Le nombre impair d’enfants de chœur annoncé surprend : lors de la fondation, en 1535, il avait été fixé à quatre. La fondation s’étant révélée financièrement insuffisante, il avait été ramené à deux durant l’essentiel du XVIIe siècle, jusqu’à ce qu’un nouveau legs, en 1690, permette de remonter à quatre. Il faut croire que la situation financière s’était à nouveau dégradée sur la fin du XVIIIe siècle.
Entre 1750 et 1753, il se pourrait que parmi les enfants de Gray commençant leur formation musicale se soit trouvé le jeune Nicolas BORNE, qui fera ultérieurement carrière à la Sainte Chapelle de Dijon (voir le chapitre Côte-d’Or).
La rémunération du maître comporte trois éléments : 400 livres d’appointements fixes et 450 pour l’entretien des enfants (« les loger, les nourrir & les coucher chez lui », dans un « logement franc »), provenant de la Ville, à quoi s’ajoutent environ 400 livres de participation aux revenus de la « Familiarité », et un casuel non chiffré issu des mariages et baptêmes. L’annonce souligne : « On donneroit la préférence à un Ecclésiastique » (Les Affiches de la Franche-Comté, 18 mars 1782).
Antérieurement à cette annonce, on a vu pourtant des laïcs occuper ce poste. De 1746 à 1753, le maître de musique organiste était Jean-Baptiste TAPRAY, lui aussi marié et père de famille, comme chacun sait, puisque la notoriété de son nom tient essentiellement à son fils Jean-François. Jean -Baptiste TAPRAY parti pour Dole en 1753, son successeur Antoine BOURDELET convole avec la fille d’un maître écrivain le 19 février 1754, moins d’un an après avoir été reçu.
• 1782-1784 : l’affaire ARNOLD
En 1782, la disparition subite de ce maître, qui était en place depuis près de trente ans, entraîne un épisode de tension qui « trouble l’union qui régnoit » entre d’un côté les officiers municipaux et de l’autre le curé et les Familiers de la ville, comme l’énonce en introduction un précieux « Mémoire pour les Officiers Municipaux de la ville de Gray, appellans, contre le Curé et les Familiers de l’église paroissiale de ladite Ville, Intimés ». Ce long mémoire s’appuie sur de nombreux documents d’archives (« la plus ancienne pièce que le Corps de Ville eût pu recouvrer à ce sujet est du 6 juillet 1594 »).
En résumé, on apprend que les familiers et le curé ont eu l’audace de « faire marché » seuls, sans consulter le corps municipal, avec le sieur ARNOLD, de Nancy, pour le nommer maître de musique et organiste à Noël 1782. Scandale ! Le portrait du nouveau venu dressé par la municipalité est savoureux : tout d’abord, ARNOLD « n’est pas Prêtre » (ce qui contrevient donc à ce qui était souhaité), mais surtout il ne possède aucune des compétences que l’on attend à son poste. Il « ne sçait pas son chant », ni « toucher de l’orgue ». Il ne pourra donc « enseigner ni les principes de la langue latine, ni le chant aux enfants de chœur ». Les Familiers ont inséré dans leur traité que le sieur ARNOLD devra « apprendre aux enfants de chœur la musique vocale, que cet homme ne sçait pas, et à toucher de l’orgue, tandis qu’Arnold n’en sçait pas seulement la première touche ! ». À défaut, il leur enseignera « à jouer de la basse, ou contre-basse ; c’est en effet tout ce que sçait le sieur Arnold », jugent avec dédain les échevins. Ils brossent un clair résumé de « ce qu’il faut pour sa place » : « la musique vocale, le chant, toucher de l’orgue, principalement l’enseignement des enfans de chœur ; et à cela le Sr. Arnold qui n’est que Musicien pour la basse, n’est aucunement propre ».
Mais ce n’est pas tant le profil musical du recruté qui est l’objet du litige. Les officiers municipaux rappellent qu’ils ont entièrement financé l’orgue (ils citent un coût de 6 000 livres) et qu’ils ont toujours réglé les gages de l’organiste, ce qui leur donne de plein droit la faculté de choisir celui-ci, et de le choisir seuls, sans l’avis de la « familiarité ». Depuis que la fonction d’organiste a été réunie à celle de maître de musique, le corps municipal a toujours nommé « conjointement avec le Curé et deux familiers ». Ils énumèrent une longue litanie de nominations antérieures qui ont toutes été décidées en commun par la Ville et la Familiarité. Mieux : ils joignent des copies des « marchés » conclus avec ces musiciens successifs, ce qui fournit une précieuse documentation. Sans reprendre les « trente-deux nominations consécutives » dont se targuent les échevins, voyons ici les plus récentes.
Le 27 janvier 1784 un accord à l’amiable est trouvé entre les deux parties. Le curé et les familiers reconnaissent que, lorsque les deux places sont réunies, le droit de nommer le maître de musique /organiste appartient « de tems immémorial a Messieurs les officiers municipaux conjointement avec les Sieurs curé et deux plus anciens familiers ». À la mi-avril 1784, Le Journal de Franche-Comté fait savoir à travers la province que « Le 4 mai prochain, il sera fait, en l’Hôtel commun de la ville de Gray, un examen des personnes qui voudront se présenter pour remplir la place de maître de musique & d’organiste en l’église paroissiale. » Le lieu où doit se tenir l’examen prévu indique clairement que la Ville est en effet partie prenante dans le choix du musicien à recruter.
Le dernier maître de musique / organiste choisi selon cette procédure est un Alsacien, François-Antoine MEYER, recruté à la suite de l’annonce précédente, soit le 4 mai 1784. L’état civil atteste qu’il est encore organiste à Gray à la fin de l’année 1793, probablement jusqu’à la suspension du culte. Son poste comtois perdu, il regagne l’Alsace : on le retrouve quelques années plus tard devenu instituteur à Ensisheim, dans le Haut-Rhin. C’est, on le sait, une voie de reconversion fréquente pour les musiciens.
Succession des maîtres de musique-organistes à Notre-Dame de Gray
au cours du XVIIIe siècle
Prénom et NOM (dates de vie lorsqu’elles sont connues) | Villes (province ou diocèse) d’origine | Dates d’exercice à Gray |
Pierre BERGER (vers 1675 – 16 juin 1748) | [Salins, sous réserve] | 27 janvier 1718 – 1746 |
Jean-Baptiste TAPRAY (vers 1700 – 1790) | Chaumont | 16 juillet 1746 – avril 1753 |
Antoine BOURDELET (vers 1730 - 4 mars 1782) | (Picardie) | 23 juin 1753 – 4 mars 1782 |
François ARNOLD ( ??) | [Nancy] | décembre 1782 - 25 janvier 1784 |
François-Antoine MEYER (6 février 1757 – 3 décembre 1824) | Wittenheim en Alsace | 4 mai 1784 – après fin 1793 |
• Un organiste – et donc un orgue – au couvent des Franciscains
Une source tout à fait originale a permis de faire surgir un lieu de musique supplémentaire. À la fin de l’année 1766, le facteur d’orgues Grégoire RABINY (1740-1821) demande à Jean-André SILBERMANN, facteur d’orgues réputé à Strasbourg, s’il n'aurait pas « besoin d’un compagnon ». Il se dit décidé à quitter son frère Joseph. Sans doute est-ce la raison pour laquelle il souhaite que la réponse de SILBERMANN lui soit adressée « chez M. KASPAR organiste chez les Franciscains de Gray en Franche-Comté ».
Ce KASPAR ou CASPARD est issu d’une large famille d’organistes. Combien de temps est-il resté chez les Franciscains de Gray ? Leur orgue est-il toujours actif en 1790 ?
• Une petite collégiale sans musique en 1790
La collégiale Saint-Jean-Baptiste-Sainte-Élisabeth, fondée en 1319 pour desservir la chapelle du château de Gray appartenant aux comtes de Bourgogne, compte huit chanoines et un prévôt. La France ecclésiastique de 1790 confirme l’existence d’une collégiale à Gray (p. 85). Elle disparaît en 1790 seulement (selon la base des collégiales séculières de France).
Il faut à ce propos mentionner le cas de Julien GUILHOT qui écrit dans sa supplique de fin 1790 – alors qu’il est organiste et maître de musique à Saint-Gilles [Gard] – « j’obtins au concours en 1776 la maitrise de Gray dans la Franche-Comté. J’exerçai cet office pendant quelques années ». Or comme on vient de le voir, on dispose d’une liste précise des maîtres et organistes successifs ayant exercé à Notre-Dame de Gray, et GUILHOT ou GUILLOT n’y figure pas (à la date mentionnée par lui, c’est BOURDELET qui est en poste). Il est donc vraisemblable que « la maîtrise de Gray » à laquelle GUILHOT fait allusion soit celle de la collégiale. Mais on entre là dans le domaine de l’hypothèse, puisqu’aucune trace de musique n’y a, à l’heure actuelle, été repérée en 1790.
• • • Lure et son chapitre « équestral et princier »
Située dans le nord-est de la Franche-Comté, la petite ville de Lure s’est implantée sur les bords de l’Ognon, autour de l’abbaye fondée au début du VIIe siècle par saint Desle, disciple de saint Colomban. Entourée d'une muraille et d'un fossé jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, la ville regroupe environ 1 800 habitants à la fin de l’Ancien Régime.
La France ecclésiastique de 1790 esquisse l’historique du chapitre de Lure : l’abbaye ancienne a été sécularisée en 1764-1765. On exige seize « quartiers » de noblesse, huit de chaque côté, « sans dispense d’aucun degré » pour y siéger. « Le nombre des chanoines est fixé à neuf, y compris les dignitaires », ceux-ci étant un Grand Prévôt et un Trésorier. Le chapitre de Lure est uni à celui de Murbach sous l’autorité d’un abbé-Prince qui a droit de se qualifier de Prince du Saint-Empire. Ajoutons qu’à partir du milieu du XVIIIe siècle, les revenus du chapitre reposent pour une part sur l'exploitation du charbon dans des galeries à flanc de coteau, à Champagney, à une quinzaine de kilomètres à l’est de Lure. La sécularisation des années 1760 a entraîné une réorganisation des espaces et bâtiments existants, et la construction de nouvelles maisons canoniales, certaines étant encore inachevées au moment de la Révolution.
• « Sur la tribune un jeu d'orgue » à l’église collégiale
Lure : l'ancienne abbaye et son église abbatiale devenue collégiale, vers la fin du XVIIIe siècle (Auteur inconnu — Numérisation personnelle, Domaine public)
L’église abbatiale avait été reconstruite de 1749 à 1753, et placée sous le double vocable de saint Pierre et de Notre-Dame. Elle comporte un orgue construit en 1757, peut-être par Charles-Joseph RIEPP (« des tuyaux du XVIIIe siècle ont été identifiés comme portant les inscriptions caractéristiques de Riepp », écrit P. M. Guéritey en 1985).
Les inventaires de 1790 relèvent en effet « un jeu d’orgue » ou « sur la tribune un jeu d'orgue ». Ils mentionnent aussi un important matériel destiné au chant : « un grand pupitre sculpté, à pied duquel sont trois lions sculptés, et dans la partie supérieure un double aigle en sculpture, avec des tabourets tapissés pour les deux Chantres, qui se placent ordinairement au devant dudit Pupitre… Trois livres pour la Passion, trois antiphonaires, trois graduels... quatre petits pupitres en bois… ».
En 1790, la collégiale de Lure emploie deux chantres séculiers, Joseph CHAUVELOT (aux gages de 300 livres) et Claude-Antoine PONCEOT (payé 400 livres, auxquelles s’ajoutent 400 autres livres pour la fonction de « receveur du chapitre équestral et princier de Lure »), trois chantres prêtres, Claude-Antoine CLERC, Christophe GUEUREY et Pierre-Hubert RENAUD, qui touchent chacun 610 livres, ainsi qu'un organiste, l’Alsacien Georges MEYER, rémunéré 400 livres par an. Le chapitre salarie également, à hauteur de 372 livres, un sacristain – parfois qualifié lui aussi de chantre –, Melchior-Alexandre GODOT. Ce clerc tonsuré est titulaire d’au moins deux chapelles, dont les revenus viennent s’additionner à ses gages. Les employés laïcs pratiquent la pluriactivité, à des degrés difficiles à mesurer : Joseph CHAUVELOT est par ailleurs maître tourneur et, plusieurs années avant la Révolution, l’organiste MEYER est dit négociant ou marchand.
Les inventaires de 1790 font enfin mention d’enfants de chœur dont ni l’identité ni même le nombre exact ne sont donnés (ils pourraient être trois : « six robes rouges, trois violettes et douze calottes pour l'usage des enfants de chœur », ce qui permet d’habiller les enfants quotidiennement, grâce à un jeu de soutanelles rouge complet toujours disponible, même lorsque les autres sont au nettoyage).
Avec ces effectifs d’adultes et d’enfants au service du chant et de la musique, le chapitre luron occupe donc une place éminente au sein du territoire.
• Un autre orgue existait en l’église paroissiale Saint-Martin
Dès avril 1791, la Ville de Lure souhaite acquérir l’orgue du chapitre pour l’église de la paroisse, ce à quoi elle est autorisée par l’administration à condition que l’instrument soit estimé à sa juste valeur. C’est son ancien organiste, Georges MEYER, qui procède à cette expertise en décembre 1792. Il ne l’évalue qu’à 500 livres car « ce jeu d’orgue est en mauvais état ». Ce mauvais état est attribué à deux raisons : « parce que cet orgue n’étoit pas touchée » et à cause « de la grande humidité de l’église dont les portes étoient continuellement fermées », l’une comme l’autre remontant sans doute à la dissolution du chapitre, deux ans plus tôt.
En juin 1793, le facteur Jean RICHARD s’engage pour 1 900 livres à démonter l’orgue de la collégiale et à l’installer dans l’église paroissiale – c'est-à-dire l’église Saint-Martin, située au cœur de la ville, qui a été reconstruite vers 1740-1745, à la place de l'ancienne incendiée en 1720. L’orgue antérieur de cette église paroissiale est quant à lui mis en vente en août 1793 et acquis par un maître de forges de Magny-Vernois [Haute-Saône] pour la somme de 620 livres (J. Girardot, 1925, p. 258-259). Cette vente atteste l’existence de cet instrument, mais on ignore qui le touchait en 1790. Plusieurs hypothèses entrent en concurrence : Georges MEYER, à des horaires différents de ceux de la collégiale ? Claude Antoine PONCEOT, qui avait été organiste à Saint-Hippolyte, avant son arrivée à Lure, en 1768 ? Ou encore Philippe-Antoine-Henry DESPESCHE, qui suit le même itinéraire de Saint-Hippolyte à Lure un peu avant 1780 ?
De l’ancienne abbaye de Lure devenue collégiale, il ne subsiste plus que le bâtiment actuellement utilisé par la sous-préfecture et quelques maisons canoniales environnantes.
III – AILLEURS DANS LE DÉPARTEMENT : DES ORGUES DANS DES ÉTABLISSEMENTS TRÈS DIVERS
Le reste de la Haute-Saône est parsemé de petits lieux de musique, abbatiaux, collégiaux ou paroissiaux, souvent liés à la présence d’orgues. Le chant et les objets qui lui sont dédiés (lutrin ou aigle, sièges de chantres, livres de chants) sont également aperçus çà ou là dans les sources dépouillées.
• • • À Morey : un organiste et des chantres chez les Bénédictins de Saint-Servule
La très petite bourgade de Morey (aujourd’hui La Roche-Morey), située à 36 km à l’ouest de Vesoul, compte 700 habitants autour de 1790. C’est là qu’avait été fondé au milieu du XVIIe siècle le dernier monastère bénédictin de la région créé avant la Révolution (Machurey, 2002).
Le 5 mai 1790, le premier inventaire détaillé du prieuré Saint-Servule de Morey révèle dans l’église « un petit orgue à trois soufflets ». Un organiste venu d’Alsace, nommé Jean-Baptiste GASSER, le touche depuis trente ans. Il est intéressant de relever qu’il avait d’abord été engagé en tant qu’organiste avec le statut de « membre perpétuel de la communauté », vivant et mangeant au monastère. À l’âge de quarante ans, il change de vie, sort du monastère, se marie et s’installe dans une « maison locative » qui semble lui être fournie gratuitement par les religieux, dont il reste l’organiste jusqu’à la dispersion de la communauté. L’orgue est alors acheté d’abord par la municipalité de Morey, qui le revend à celle de Jussey désireuse de le marier au sien, pour « du tout en composer un jeu qui en vaudroit un neuf et seroit moins coûteux », sur la suggestion du facteur Jean RICHARD. Jean-Baptiste GASSER ne suit pas son orgue, il reste à Morey, alternativement qualifié de vigneron ou de cultivateur.
L’inventaire de mai 1790 montre qu’en plus de la musique produite par l'orgue, le chant est très actif au sein du prieuré. Les religieux semblent aidés par des chantres extérieurs, peut-être au nombre de trois, qui nous sont restés anonymes : « trois chaises de chantres […] et deux petits tapis propres au lutrin… ». Parmi les livres, on note « 36 volumes in folio pour le chœur et l’orgue, 13 in quarto, un Cérémonial […], trois volumes de passion nottés in folio ».
• • • À Jussey : un orgue, trois facteurs, des organistes à l’église paroissiale Saint-Pierre
Petite ville située au nord de la Haute-Saône, Jussey regroupe environ 2 700 habitants à la fin de l’Ancien Régime. Après les guerres du siècle précédent, le XVIIIe siècle est pour Jussey une période de relative prospérité, fondée sur la production de fourrage, de blé, de bois…
Son église paroissiale, placée sous le vocable de saint Pierre, est équipée d’un orgue de la facture de Claude VALENTIN, de Dijon, orgue reçu en 1719. C’est un orgue « municipal », construit et entretenu aux frais du corps de Ville, qui se charge également de recruter et de rémunérer l’organiste. Parmi les titulaires connus, il faut citer le Lorrain Jean (ou Jean-Baptiste) TAPRAY, de 1740 à 1746. C’est à Jussey, durant ce laps de temps, qu’était d’ailleurs née sa fille Claude-Antoinette TAPRAY (1744-1815) qui deviendra religieuse et organiste.
Après la reconstruction totale de l’église paroissiale entre 1751 et 1758 par l’architecte bisontin Nicolas Nicole, l’orgue, soigneusement entreposé ailleurs pendant les travaux, est remonté par Bénigne BOILLOT qui s’oblige à le « réparer en sa perfection » et à « le rendre d’une bonne armonie ». (P. M. Guéritey, 2021, p. 101-103). À la fin de l’année 1759, le jour même de la réception des travaux de BOILLOT, est engagé Guillaume MARTELET, natif du lieu. C’est toujours lui qui exerce en 1790, tout en étant en même temps « marchand », et ce jusqu’à son décès en novembre 1791.
Une trentaine d’années après le remontage de l’orgue, la municipalité de Jussey fait le constat que « les orgues qui sont dans l’église paroissialle de cette ville, sont dans le plus mauvais état possible, à n’en plus tirer parti » (13 octobre 1791). Elle décide alors d’acheter l’orgue de la ci-devant abbaye de Morey, à vingt kilomètres au sud, pour « un prix convenable ». En février 1792 les édiles signent un marché avec le facteur Jean RICHARD afin qu’il marie les restes de l’orgue existant à Jussey avec celui de Morey. Le corps municipal a conscience de la difficulté de la tâche et affirme « que dans ce pays il est de notoriété que le sieur Richard est le seul qui puisse faire une pareille entreprise ». Un an plus tard, le travail est expertisé par Jean-Baptiste SCHONCK – frère des deux organistes du même nom ayant exercé l’un, Henri-Pierre, à Grenoble, l’autre, François-Pierre, au Puy-en-Velay. Jean-Baptiste lui-même est alors organiste à Bourbonne [Haute-Marne], à une vingtaine de kilomètres plus au nord, après l’avoir été jusqu’en 1790 à l’abbaye de Morimond [Haute-Marne], sous le nom de « frère Bernard ».
À la toute fin de l’année 1791, quelques semaines après la disparition de MARTELET, la municipalité de Jussey recrute un nouvel organiste, Dominique CAMBÉ, qui était auparavant en poste à l’abbaye cistercienne de Vaux-la-Douce [Haute-Marne], à trois heures et demie de marche de là, précisément le poste qu’avait lui aussi occupé, longtemps avant, Guillaume MARTELET, avant de revenir à Jussey, lorsque le facteur Bénigne BOILLOT en 1759 avait remonté l’orgue « en sa perfection ».
Après le Concordat arrive à Jussey un organiste aveugle, François-Joseph FROIDEVAUX, antérieurement en poste à Besançon. Au tout début de l’année 1809, dans une lettre destinée à offrir ses services aux fabriciens de Vesoul, il affirme que « depuis six ans » il fait « raisonner [sic]» l’orgue de Jussey, qu’il a « réparé de toute pièce. » À l’appui de cette dernière assertion, il se vante de ce que cet orgue est « composé de 1 820 tuyaux qui ne parlaient pour ainsi dire ni l’un ni l’autre. J’ai tout démonté, tout retenu, tout réparé et chaque tuyau fait parfaitement sa partie ». Le nombre de tuyaux paraît fort exagéré aux spécialistes du sujet comme P. M. Guéritey (Bénigne Boillot…, 2021, p. 105). Toujours est-il que FROIDEVAUX est toujours dit « organiste » lors de son décès à Jussey en 1828.
• • • À l’église paroissiale Saint-Hilaire de Pesmes : au moins neuf organistes successifs
Située à l'extrémité sud-ouest du département, Pesmes s'est implantée sur la bordure d'un plateau calcaire qui domine l’Ognon, affluent de la Saône. C’est une petite ville qui regroupe 1 650 habitants au moment de la Révolution. Coiffée d’un clocher comtois à tuiles vernissées, son église paroissiale Saint-Hilaire abrite un riche patrimoine (statues) et notamment un orgue dès le XVIIe siècle, dont on connaît les derniers organistes, souvent recteurs d’école.
Cet orgue est remplacé en 1727 par un nouvel instrument, de la facture de Guillaume MOUREZ, alors installé à Auxonne en Bourgogne.
Certains de ses organistes en sont également connus, comme Pierre-Nicolas PARISIS (vers 1703-1748) ou Claude-François BEAUMONT (qui en 1790 sera organiste à Ornans, voir le chapitre Doubs). Signalons après eux le jeune Jacques-Henri VERNIER, fils d’un maître d’école d’un village situé à dix kilomètres de là. Deux de ses frères deviennent également musiciens, Charles-Henri VERNIER (1737-1819), que l’on retrouve organiste successivement à Vaison[-la-Romaine], Rochefort, Rieux dans les Pyrénées, puis Paris, et Jean-Claude VERNIER (1743-1822), qui en 1790 chante la taille à la cathédrale de Tours. Sans doute le bagage de Jacques-Henri était-il plus mince que celui de ses frères. Lorsqu’il est engagé en 1751, le corps municipal de Pesmes prévoit la formation continue de l'organiste : son père devra pendant les trois années de son contrat envoyer son fils « durant six semaines par chacune d’icelles aux mois de septembre et octobre sous la direction d’un maître organiste pour se perfectionner dans cet art », à ses frais. Malgré ces beaux projets, on perd rapidement le jeune homme de vue. Un an et demi plus tard, il est remplacé par Alexandre FOURNIER, sur lequel on sait peu de choses, et il en va de même concernant ses successeurs, un certain VILLIARD (reçu le 16 juin 1771), le nommé DUPOIRIER (engagé le 3 mars 1775), Jean-François AMELOT de Dole (en décembre de la même année). Le suivant, Jean CHAUVENET, arrivé au plus tôt à la fin de 1777 et reparti avant 1781, est mieux connu puisqu’en 1790 il exerce à l’église paroissiale Saint-Symphorien de Nuits-Saint-Georges (voir le chapitre Côte-d’Or). Sa fille Marie-Claudine sera plus tard nommée à son tour à l’orgue de Pesmes, le 13 octobre 1830.
Entre temps, durant la décennie 1780 et jusqu’en 1794, c’est un Lorrain, Jacques LUCQUIN, arrivé de Saint-Avold à la charnière de 1780 / 1781, qui touche le vieil orgue de Guillaume MOUREZ. L’inventaire de ventôse an III (mars 1795) indique : « ayant examiné l’orgue, il a été reconnu qu’elle est en mauvais état et qu’il y manque plusieurs tuyaux essentiels dans l’intérieur ».
• • • À Faverney, l’abbaye Notre-Dame et son organiste vigneron
Née au bord de la rivière la Lanterne, la petite cité de Faverney est située à 20 km au nord de Vesoul. Progressivement organisée autour de l'abbaye en demi-cercles concentriques, toujours visibles dans le tissu urbain, elle compte 1 300 habitants à la fin de l’Ancien Régime.
Faverney : la petite ville vue du ciel s'organise autour de son abbaye (cl. T. Maron, Survol de France, n° 7451)
>>> Fig. n°10 – Faverney. La petite ville vue du ciel s’organise autour de son abbaye.
(demande de dispense de droits effectuée auprès de la photothèque municipale le 24 mai 2022)
Une abbaye féminine y avait été fondée au VIIIe siècle, cédée quatre siècles plus tard à des religieux bénédictins venus de La Chaise-Dieu en Auvergne. L’abbaye entre au XVIIe siècle dans la congrégation de Saint-Vanne-et-Saint-Hydulphe. C’est alors que, jusqu’à la Révolution, l’abbaye Notre-Dame vit sa période la plus brillante, avec notamment le rayonnement de ses religieux érudits et savants et la reconstruction de ses bâtiments conventuels, financée par l’afflux des pèlerins attirés par ce qu’il est convenu d’appeler « le miracle des saintes hosties » (Pentecôte 1608).
En 1790, le monastère compte encore 18 religieux de chœur et trois frères convers, sous l’autorité du grand prieur Dom Anselme Ferron, et dispose d’un budget important (68 966 livres de recettes, 62 171 livres de dépenses). Les inventaires de 1790 montrent une maison bien meublée, garnie de multiples richesses (nombreux livres et tableaux, 28 cartes de géographie « grandes et petites », ornements liturgiques de valeur…). On relève en particulier « un jeu d'orgue dans le fond de l'église », « au-dessus de la grande porte d’entrée ». Tout en ignorant qui avait été le facteur de cet orgue, Jacques Gardien souligne la présence à l’abbaye d’un « Bénédictin mélomane et facteur », Dom Antoine Geiger, qui pourrait s’en être occupé. Toutefois une visite de 1734 souligne que ces « orgues à double clavier » sont « presque neuves, et fort belles », le premier qualificatif semblant éliminer de fait Geiger, décédé en 1711.
En 1790, ce jeu d’orgue est depuis longtemps entre les mains du sieur Philippe DUCRET (1740-1816), natif de Faverney même. Au tout début de l’année 1791, il constitue son dossier de carrière, dans lequel il se dit au service « des ci-devant religieux bénédictins de Faverney » depuis son enfance. D’abord vers 1750 comme « servant d’autel », ensuite comme organiste – à partir d’une date qui n’est pas précisée. Par « servant d’autel » on doit entendre une catégorie inférieure d’enfant de chœur, la formation musicale en moins puisqu’il n’y a pas à proprement parler de maîtrise dans un monastère. Cela interroge sur le processus d’apprentissage de l’orgue par le jeune homme. Tout en étant vigneron, il est bel et bien reconnu officiellement comme organiste, puisqu’il obtient à ce titre une petite pension en 1791 et qu’après le Concordat il est à nouveau mentionné comme organiste (dans l’ancienne église abbatiale devenue paroissiale).
• • • À Champlitte : deux frères chantent à la collégiale Saint-Christophe
À 60 kilomètres à l’ouest de Vesoul et à 22 au nord de Gray, Champlitte est limitrophe des actuels départements de la Côte-d’Or et de la Haute-Marne, aux confins donc de trois provinces anciennes, la Franche-Comté, la Bourgogne et la Champagne. Établie sur un promontoire dans la vallée du Salon, la ville est elle-même surplombée par le château reconstruit après un incendie durant la seconde moitié du XVIIIe siècle par l’architecte bisontin Bertrand (qui le dote notamment d’une orangerie-théâtre).
À la fin de l’Ancien Régime, la paroisse appartient au diocèse de Dijon et compte environ 2 600 habitants. Dans un environnement rural où domine la vigne, c’est une petite cité fortifiée, comportant un collège, un hôpital royal, de nombreuses maisons religieuses (Augustins, Capucins, Annonciades…), ainsi qu’une collégiale érigée au XVe siècle, sous l’invocation de saint Christophe, église « qui est collégiale et paroissiale tout ensemble » (Claude-Jules Briffaut, p. 140). Le chapitre collégial compte dix chanoines et un prévôt qui touche double prébende. L’abbé Briffaut précise : « C’est un chanoine député par le Chapitre qui fait les fonctions curiales ». Ce chanoine signe en se proclamant « administrateur », et non pas curé.
>>> Fig. n°11 – Champlitte, le clocher de l’ancienne collégiale Saint-Christophe
(crédits photo : www.la-haute-saone.com)
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L’édifice a été reconstruit plusieurs fois aux XVIIIe et XIXe siècles (incendies…), seul son clocher d’origine subsiste aujourd’hui. En 1780, la nef, fragilisée, est interdite au culte paroissial qui aura lieu en été dans l’église des Augustins et en hiver dans celle des Annonciades, selon Briffaut, (p. 150), qui poursuit : « Le chœur étant solide, les chanoines continuèrent d’y chanter la messe capitulaire et les heures canoniales ». Les chanoines ne sont toutefois pas seuls à chanter.
Deux hommes déposent des dossiers auprès des administrations locales, qui les font remonter au Comité ecclésiastique : les frères CHEVIRON déclarent tous les deux être au service du chapitre depuis leur enfance, d’abord comme enfants de chœur, ensuite comme chantre et serpent pour l’aîné des deux, Jean-Baptiste, ou comme chantre et « clerc du chapitre » pour le plus jeune, Philibert. Les deux frères semblent seuls à être rémunérés pour remplir des fonctions cantorales à la collégiale Saint-Christophe, mais on peut supposer que le chapitre entretient encore quelques enfants de chœur, comme ils l'avaient été eux-mêmes (peut-être deux seulement).
Jean-Baptiste CHEVIRON gagne 260 livres (ou 300 selon l’une de ses déclarations), Philibert CHEVIRON 200 livres seulement, casuel inclus.
Les nombreux actes familiaux qui les concernent dans le registre paroissial attestent qu’ils sont en même temps cordonniers ou maîtres-cordonniers, comme leur père et plusieurs de leurs frères. Cette pluriactivité évidente est frontalement niée lorsqu’il s’agit de réclamer des secours aux autorités. Philibert notamment affirme dans sa supplique ne pas connaître d’autre métier que celui de chantre et n’avoir que les gages reçus du chapitre pour faire vivre sa famille, ce qu’entérine le Directoire départemental : le sieur Cheviron « n'a aucune profession pour vivre » et en particulier « il n'a point été exercé aux travaux de la campagne » – le second argument étant sans doute véridique et venant en réponse à une objection du District.
Leur chapitre dissout, les frères CHEVIRON continuent durablement à chanter pour la paroisse. Malgré leur métier de cordonnier, malgré divers épisodes de reconversion (Jean-Baptiste est successivement « concierge de la maison de réclusion » de Champlitte puis cafetier), c’est leur fonction de chantre qui est mentionnée pour chacun d’eux lors de leur décès à quinze mois d’intervalle, en 1839 et 1840.
Des comptes municipaux – non datés mais, selon l’abbé Briffault qui les publie, concernant les dernières années d’Ancien Régime – mentionnent une somme annuelle de 104 livres versée par la Ville « à un organiste, en vertu d’un traité fait en 1720 ». Aucune trace d’organiste, ni d’ailleurs d’orgue, n’a actuellement été retrouvée à Champlitte (et Gardien n’en souffle mot).
• • • Un orgue et un aigle en cuivre à l’abbaye Notre-Dame de Corneux
Cette abbaye de prémontrés est située à une lieue de la ville de Gray (et aujourd’hui sur la commune de Saint-Broing). Fondée au début du XIIe siècle, elle a été largement reconstruite au XVIIIe siècle, notamment l’abbatiale entre 1759 et 1763, sur les plans de l’architecte Jean-Charles Colombot. « Les Bâtiments sans être considérables sont commodes & Bien distribués » estime la déclaration des biens meubles et immeubles de 1790. À cette église toute neuve, il fallait un orgue, dont, après deux avant-projets de la main de RIEPP, l’abbé passe commande à Joseph RABINY, le neveu de RIEPP (P. M. Guéritey, 2022, p. 2 à 4). Le facteur se « flatte de faire des claviers, de même que tout ce qui dépend de l’orgue, à servir de modèle ». Il affirme « que si ces Messieurs suivent le plan tel que je l’ai dressé, ils auront une des belles orgues que l’on voye dans le pays ». Les travaux sont menés entre 1765 et 1766, le solde du devis de 5 850 livres étant réglé à RABINY le 16 août 1766 (J. Gardien, p. 518).
L’inventaire du 28 avril 1790 mentionne en effet « une orgue au fond de l'église ». La déclaration des biens de 1790 le confirme : « une belle orgue se trouve au fond de l'église, en face du Grand autel ». En 1790, l’instrument est probablement touché par l’un des six prémontrés vivant encore à l’abbaye. Tel était le cas antérieurement, lors du décès à Corneux le 20 février 1772 du « RP Evermode Muller », venu de chez les prémontrés de Schussenried en Souabe : le révérend père MULLER était à son décès l’organiste de Corneux. Cet exemple est renforcé par une notation relevée en novembre 1780 dans les comptes de l’abbaye, où l’organiste MORLET reçoit 48 livres « pour avoir montré au novice ». Louis-Joseph MORLET (le père), qui demeure à Gray, a donc fréquenté l'abbaye quelque temps pour initier à l'orgue l'un des jeunes religieux qui va ensuite tenir l'orgue de l'abbatiale. Or le seul novice alors présent à l’abbaye est Charles-Félix DUPOIRIER. Il prononce ses vœux solennels le 11 février 1781 et reste ensuite à l’abbaye jusqu’à la Révolution. Tout cela rend vraisemblable que l’organiste de 1790 appartienne à la communauté monastique et qu’il s’agisse de DUPOIRIER.
Les inventaires de 1790 mentionnent aussi « un aigle en cuivre derrière le grand autel servant de pupitre ». Les comptes des années 1780 font état de la présence d’un « choriste » exerçant à l’abbaye. Les derniers titulaires de cette fonction sont successivement Jean-Baptiste HUMBERT, Charles GARDOT et le surnommé DIVERTISSANT pour lequel on achète à la foire un habit, veste et culotte d’une valeur de 15 livres. Ces hommes sont aussi dits « domestiques choristes », ce qui rappelle la pratique de l’abbaye cistercienne de Vauluisant [Yonne] où les organistes étaient classés dans un registre intitulé « domestiques ». Néanmoins, les comptes de l’abbaye s’arrêtant en 1787, on peut avancer tout au plus qu’un choriste au moins donnait de la voix aux côtés des religieux, sans pouvoir affirmer le nom de celui qui est en poste en 1790.
Vendue peu après comme bien national, l'abbaye est transformée en château et son église détruite.
• • • Des traces plus ténues…
Les archives ou la bibliographie relatives à la Haute-Saône ont révélé çà ou là d’autres traces d’orgue ou de chant attestées par la présence d’un instrument ou d’objets du chant, sans que l’on puisse en nommer les praticiens de 1790. Tel est le cas dans plusieurs abbayes éparpillées.
• À l’Abbaye Notre-Dame de la Charité : un organiste et des chantres
L’abbaye de la Charité est une abbaye cistercienne masculine qui avait été fondée au début du XIIe siècle par des moines de l’abbaye de Belvaux, fille de Morimont. Elle se situe entre Gray et Vesoul, au hameau de la Charité, proche de la petite paroisse de Neuvelle (aujourd’hui commune de Neuvelle-lès-la-Charité). Plusieurs fois dévastée au fil des guerres, elle redevient florissante au XVIIIe siècle et peut reconstruire une large part de ses bâtiments, notamment l’abbatiale, vers 1735.
Cette abbaye ne compte plus que sept religieux présents lors de l’inventaire d’avril 1790 conservé aux Archives nationales. Elle n’en apporte pas moins un soin certain à la décoration de son abbatiale, où l’on trouve notamment « six sièges tapissés en panne, tant pour le prêtre officiant, diacre et sous diacre, que pour les chantres & choristes » que viennent compléter au milieu du chœur « un pupitre et deux sièges pour les Chantres en bois sculpté ». Cela suppose que ces chantres/choristes sont donc au moins deux, vêtus durant les offices de « deux habits en étoffe brune pour les Choristes avec les Surplis ».
Mais ce n’est pas tout : on sait aussi que cette abbaye possédait un orgue. En effet, l’inventaire de 1790 mentionne explicitement « une petite orgue avec les soufflets ». Or à l’automne 1805, une partie importante du mobilier de l’abbatiale Notre-Dame de la Charité a été transportée à Besançon et installée dans l’église paroissiale Saint-Maurice, également chapelle des Oratoriens. Ces éléments, acquis par deux vicaires de Saint-Maurice auprès de Louise-Adélaïde-Pierrette Gigot de Garville veuve d’Affry, comportent des boiseries, divers éléments mobiliers et le buffet d’orgue, pour la somme de 2 600 livres. L’orgue a ensuite été reconstruit en 1809 par le facteur Louis Geib (P. M. Guéritey, 2022, p. 14-15).
L’abbaye était alors détruite depuis longtemps, à l’exception de la chapelle et de quelques dépendances (dont une grange cistercienne), édifiées au XVIIIe siècle, qui ont été conservées.
• À Luxeuil : un orgue remarquable à l’abbaye Saint-Pierre-et-Saint-Paul
Luxeuil-les-Bains : son buffet d'orgue remarquable, XVIIe siècle (cl. A.BourgeoisP - Travail personnel, CC BY-SA 4.0)
Situé au nord-est du département, à une vingtaine de kilomètres au nord de Lure, Luxeuil compte quelque 3 000 habitants en 1790.
L’atout qui a fait la richesse de Luxeuil – et qui lui a donné son nom contemporain de « Luxeuil-les-Bains » – c’est évidemment son eau thermale, déjà connue et utilisée au moment de la conquête romaine. La ressource est développée au XVIIIe siècle, avec la construction de son établissement thermal en grès rose des Vosges, inauguré en 1768.
La ville s’était développée autour de son abbaye Saint-Pierre-et-Saint-Paul, fondée à la fin du VIe siècle par saint Colomban et intégrée au XVIIe siècle à la congrégation de Saint-Vanne-et-Saint-Hydulphe. Son ancienne abbatiale – aujourd’hui basilique Saint-Pierre – possède toujours un orgue construit en 1617 et agrandi en 1685, qui fait partie des plus anciens de Franche-Comté.
Quoique plusieurs fois restauré voire reconstruit depuis, l’instrument comporte encore 260 tuyaux de 1617 et 350 du XVIIIe siècle – sur 3 137 tuyaux en tout, pour 44 jeux. Son imposant buffet galbé, en chêne, datant du XVIIe siècle, porté par un Atlas reposant au sol, offre un riche programme iconographique, dont une représentation de sainte Cécile jouant de l’orgue, accompagnée d’un ange violoniste.
Qui touchait cet instrument remarquable en 1790 ?
• La collégiale de Villersexel et ses six mystérieux enfants de chœur
Villersexel : vue générale du village dominé par le clocher de Saint-Nicolas (cl. A.BourgeoisP — Travail personnel, CC BY-SA 4.0)
À moins de 20 km au sud de Lure, tout près de l’actuelle limite départementale entre la Haute-Saône et le Doubs, Villersexel est à l’origine un bourg castral étagé sur la rive gauche de l’Ognon, dominant sa confluence avec une autre rivière, le Scey. On y trouve un château, des forges, un hôpital… et 1 000 habitants environ autour de 1790. L’église paroissiale Saint-Nicolas, reconstruite entre 1750 et 1780, renferme aujourd’hui un orgue Callinet de 1852.
Avant la Révolution, elle accueille l’office canonial célébré séparément par les quatre chanoines, fondés au début du XVe siècle, qui sont en même nombre à la fin du XVIIIe siècle. Il est précisé que « ce corps n’est point tenu d’assister aux offices de paroisse » (Almanach historique de Besançon et de la Franche-Comté pour 1785).
L’inventaire conservé en F 19 aux Archives nationales (1791 environ) mentionne à la collégiale de Villersexel « six petits surplis pour les enfants de chœur », ce qui atteste l’existence de garçons, potentiellement au nombre de six, qui ne sont peut-être là que pour le service de l’autel.
• Chez les Récollets de Conflans : « un petit orgue assez mauvais » et des objets du chant
Situé dans le nord de la Haute-Saône, entre Faverney et Luxeuil-lès-Bains, Conflans, autrefois Conflans-en-Bassigny, aujourd’hui Conflans-sur-Lanterne, est localisé au confluent de deux rivières, la Lanterne et le Planey. La petite ville, autrefois entourée de fossés et d’un double rempart, compte moins de 800 habitants à la fin de l’Ancien Régime.
Le 18 décembre 1789, est inventoriée la maison des Récollets de Conflans. Sont d'abord décrits les bâtiments, « pour loger 24 religieux, nombre qui s’y trouve ordinairement, quoique maintenant ils ne soient que 19 ». Dans l’église conventuelle sont relevés « un petit orgue assez mauvais » et au chœur « un lutrin et les livres convenables pour l’office divin, tels que psautier, graduel, antiphonaire et bréviaires… ». On ignore lequel des religieux touchait ce « petit orgue ».
L’instrument « assez mauvais » n’a guère excité les convoitises puisque, au printemps 1801, il est toujours en place et se trouve décrit par un autre inventaire qui apporte des précisions sur ses dimensions (130 cm de profondeur, 200 de largueur et 330 de hauteur), ainsi que sur son état général (« ses touches et son mécanisme intérieur et en bois avoient besoin de réparations »). Il est estimé 200 francs, c'est-à-dire le double de la chaire en chêne conservée dans l’église, « d’une menuiserie de bon goût dont le fond est peint à l’huile en gris et les moulures dorées et décorés d’attributs religieux aussi bien dorés ».
• D’autres établissements laissent apercevoir des vestiges encore plus ténus liés à la célébration cultuelle
Ainsi l’inventaire de l'abbaye cistercienne de Bithaine (dans le district de Luxeuil) comporte-t-il trois psautiers, trois antiphonaires et trois graduels qui laissent supposer une certaine activité cantorale, sans doute exercée par les moines eux-mêmes, comme dans la plupart des établissements monastiques.
En ce qui concerne le « chapitre noble de Montigny » – alias abbaye de Cherlieu –, on sort des traces archivistiques, aussi ténues soient-elles, pour entrer dans le domaine de l’hypothèse. Le 5 mai 1784 à Montigny-lès-Cherlieu l’organiste Dominique CAMBÉ épouse une jeune fille de la paroisse. Comme aucun autre lieu de publication de ban n’est spécifié dans l’acte, on peut imaginer que le marié habite lui aussi Montigny, peut-être parce qu’il est devenu organiste de l’abbaye de Cherlieu. Mais cela reste évidemment à démontrer…
Plusieurs autres établissements sont mentionnés dans les sources, comme la petite collégiale Saint-Pancrace à Ray-sur-Saône ou les abbayes cisterciennes d’Acey ou de Clairefontaine, sans qu’il y ait été trouvé trace d’orgue ni même de chant. Inversement, un orgue Rabiny de 1747 est régulièrement mentionné à Faucogney parmi les orgues historiques de Franche-Comté. Mais il faut savoir que cet orgue n’a été installé à Faucogney qu’en 1851. Auparavant il trônait dans l’église de Sainte-Marie-aux-Mines [Haut-Rhin], où il se trouvait donc en 1790.
• • •
Le territoire qui deviendra la Haute-Saône, peu peuplé, sans grande ville, sans cathédrale à la fin de l’Ancien Régime… répond finalement à ce qu’on en attendait en lieux de musique et en musiciens actifs, puisqu’il atteint les chiffres de quatorze lieux et d’une vingtaine de musiciens en activité en 1790.
Quelques caractéristiques frappent durant cette déambulation au fil de l’enquête haut-saônoise. Le nombre d’églises neuves, tant abbatiales que paroissiales, encore toutes récentes lorsque débute la Révolution, révèle un XVIIIe siècle florissant ayant succédé à un XVIIe siècle de tensions, de guerres et de souffrances. Parmi elles, on peut citer la collégiale Saint-Georges à Vesoul, (re)construite de 1735 à 1745 par les architectes Mathieu Duchesne et P. Archange ; l’église paroissiale de Saint-Pierre à Jussey, totalement reconstruite entre 1751 et 1758 ; ou l’abbatiale des prémontrés de Corneux (aujourd’hui commune de Saint-Broing), reconstruite entre 1759 et 1763.
Ces édifices abritent souvent des orgues, eux aussi de facture récente, les uns et les autres traduisant d’une part une aisance des finances, d’autre part une vivacité de la foi. Ainsi en va-t-il à Jussey dont l’orgue avait été remonté « en sa perfection » par Bénigne BOILLOT en 1759, et qui l’est à nouveau, marié à celui de Morey, en 1791 par Jean RICHARD ; ou encore à Notre-Dame de Corneux où RABINY construit un orgue neuf, dont il reçoit le solde en août 1766.
Il faut signaler aussi la fréquence des doubles fonctions, en particulier celles d’organiste et de maître (de musique, des enfants de chœur…) assumées par le même homme. C’est par exemple le cas des responsables successifs de l’église paroissiale Notre-Dame de Gray, qui sont organistes et maîtres des enfants de chœur, comme Jean-Baptiste TAPRAY puis Antoine BOURDELET, François ARNOLD et François-Antoine MEYER.
On ne relève aucune femme organiste, sans que l’on sache si la raison est à rechercher du côté des mentalités des décideurs locaux ou du côté des archives qui ont été dépouillées. Ainsi ignore-t-on l’identité de ceux (ou celles ?) qui étaient aux claviers des abbayes de Luxeuil ou de La Charité, du couvent des Récollets de Conflans, de l’église paroissiale Saint-Martin de Lure, ou encore d’autres églises où des orgues existaient peut-être.
Car, comme il est difficilement évitable, l’exploration des traces laissées par les musiciens d’Église à la fin de l’Ancien Régime dans le territoire de la future Haute-Saône ne saurait se prétendre exhaustive, très loin de là.
Sylvie GRANGER
chercheuse associée au Laboratoire TEMOS (TEmps, MOnde, Sociétés) UMR 9016 CNRS
(juin 2022)
Le travail sur les musiciens de ce département a bénéficié des apports de nombreux chercheurs, notamment : Aurélia Benas (des archives départementales de Haute-Saône), François Caillou, Youri Carbonnier, Bernard Dompnier, Pierre Marie Guéritey, Isabelle Langlois, Christophe Maillard, Françoise Noblat…
Un « merci » tout particulier à Michel Meunier pour son accompagnement constant.
Mise en page et en ligne : Caroline Toublanc (CMBV)
>>> Si vous disposez de documents ou d’informations permettant de compléter la connaissance des musiciens anciens de ce département, vous pouvez signaler tout élément intéressant ICI. Nous vous en remercions à l’avance.
L’amélioration permanente de cette base de données bénéficiera à tous.
Les lieux de musique en 1790 en Haute-Saône
Les lieux de musique documentés pour 1790 dans le département sont présentés par diocèses et par catégories d’établissements : cathédrale, collégiales, abbayes, monastères et couvents, autres établissements (par exemple d’enseignement, de charité…), paroisses (ces dernières selon l’ordre alphabétique de la localité au sein de chaque diocèse).
Diocèse de Besançon
- Collégiales
- Abbayes, monastères et couvents
- CONFLANS-SUR-LANTERNE [anciennement CONFLANS-EN-BASSIGNY], Couvent des Récollets
- FAVERNEY, Abbaye vanniste Notre-Dame (hommes)
- GRAY, Couvent des Franciscains [en 1766]
- LA ROCHE-MOREY [anciennement MOREY], Prieuré bénédictin vanniste de Saint-Servule (hommes)
- LUXEUIL-LES-BAINS, Abbaye vanniste Saint-Pierre-et-Saint-Paul (hommes)
- NEUVELLE-LÈS-LA-CHARITÉ, Abbaye cistercienne Notre-Dame de la Charité (hommes)
- SAINT-BROING, Abbaye de prémontrés Notre-Dame de Corneux
- Églises paroissiales
Diocèse de Dijon
- Collégiales
Pour en savoir plus : indications bibliographiques
Quelques sources imprimées
- GRAPPIN, Almanach historique de Besançon et de la Franche-Comté pour l’année 1785, Besançon, Couché et Tissot, [fin 1784], 410 p.
- La France ecclésiastique 1790, Diocèse de Besançon, p. 74 à 86.
Bibliographie
Généralités sur la Haute-Saône
- Éric COULON, Bourgs et villages de Haute-Saône, Bière (Suisse), Éditions Cabédita, 2004, 174 p.
- Jean GIRARDOT, Conseils pratiques pour l’étude de la Révolution en Haute-Saône, Commission d’histoire économique et sociale de la Révolution française, Paris, Imprimerie nationale, 1965, 73 p.
- Jean GIRARDOT, Le Département de la Haute-Saône pendant la Révolution, Vesoul, Société d’Agriculture, Lettres, Sciences et Arts de la Haute-Saône, 3 vol., 1972 à 1974, 236, 284 et 388 p.
- Denis GRISEL et Guy-Jean MICHEL, Haute-Saône, Paris, Édition J Delmas et Cie, 1981, 152 p.
- Adolphe-Laurent JOANNE, Géographie du département de la Haute-Saône, Paris, Hachette, 1902, 64 p.
- SALSA (Société d’Agriculture, Lettres, Sciences et Arts de la Haute-Saône), La Haute-Saône : Nouveau dictionnaire des communes, 6 vol., 1969 à 1974, 350, 414, 386, 395, 354, 308 p.
- SALSA (Société d’Agriculture, Lettres, Sciences et Arts de la Haute-Saône), Dictionnaire biographique de la Haute-Saône, 2 vol., 2005.
- Louis SUCHAUX, Galerie biographique du département de la Haute-Saône, Vesoul, Imprimerie A. Suchaux, 1864, 424 p. + supplément.
- Louis SUCHAUX, La Haute-Saône : dictionnaire historique, topographique et statistique des communes du département, Vesoul, Imprimerie A. Suchaux, 1866, 2 vol., XXX et 412 p.
Sur les villes de Haute-Saône et leurs églises
- Bernard ARNOULD « Le franchissement de la Lanterne à Faverney au 18e siècle », Haute-Saône SALSA, Supplément au n°59, juillet-septembre 2005.
- Louis BESSON (abbé), Mémoire historique sur l'abbaye et la ville de Lure, suivi d’une notice sur le prieuré de Saint-Antoine et les seigneuries de Lure et de Passavant, Besançon, Bintot, 1846, 232 p.
- Louis BESSON et Henri GATIN (abbés), Histoire de la ville de Gray et de ses monuments, Besançon, Éditions Breitenstein-Ramey, 1851, 452 p.
- Louis BESSON et Henri GATIN (abbés), Histoire de la ville de Gray et de ses monuments, nouvelle édition revue et continuée par Charles GODARD, Paris, Firmin-Didot et Cie, 1892, 810 p.
- Claude-Jules BRIFFAUT (abbé), Histoire de la seigneurie et de la ville de Champlitte (Haute-Saône), Langres, Jules Dallet libraire-éditeur, 1869, 205 p.
- Jean-Baptiste COUDRIET et Pierre-François CHATELET (abbés), Histoire de Jussey, Besançon, J. Jacquin, 1876, 388 p.
- Jean-Christophe DEMARD, Histoire de Champlitte et de sa région, Langres, Éditions Guéniot, 2006, 478 p.
- Louis ÉBERLÉ (abbé), Faverney, son abbaye et le miracle des Saintes Hosties, Luxeuil, P. Valot, 1915, 884 p.
- Frédéric GENÉVRIER, « Fiche de la collégiale Saint-Jean-Baptiste-Sainte-Élisabeth de Gray », Collégiales - Base des collégiales séculières de France (816-1563) [en ligne <http://vafl-s-applirecherche.unilim.fr/collegiales/?i=fiche&j=415>], version du 30/3/2019, consultée le 25/1/2022.
- Frédéric GENÉVRIER, « Fiche de la collégiale Saint-Pancrace de Ray-sur-Saône », Collégiales - Base des collégiales séculières de France (816-1563) [en ligne <http://vafl-s-applirecherche.unilim.fr/collegiales/?i=fiche&j=420>], version du 30/3/2019, consultée le 25/1/2022.
- Alfred GEVREY, Histoire de Vesoul, Vesoul, Suchaux, 1865, VIII-112 p.
- Jean GIRARDOT, La Ville de Lure pendant la Révolution, 1789-1799, Lure, Imp. A. Écrement, 1925, 183 p.
- Jean GIRARDOT, L'Abbaye et la ville de Lure des origines à 1870, Vesoul, Éditions M. Bon, 1971, 360 p.
- Léonce LEX, L’Ancien collège de Vesoul (1576-1796) d’après les documents originaux, Vesoul, Cival fils, 1885, 16 p.
- Léonce LEX, Vesoul au XVIIe siècle d'après les Vues et les Documents, Vesoul, Librairie Louis Bon, 1885, 22 p.
- André MACHUREY, Le monastère Saint-Servule de Morey, Dernière fondation bénédictine au Comté sous l'Ancien Régime, Vesoul, Les Éditions comtoises, 2002, 77 p.
- Louis MONNIER, Histoire de la Ville de Vesoul, avec de nombreuses reproductions de monuments et de portraits, Vesoul, Imprimerie et librairie Louis Bon, 1909, 402 p.
- Étienne PERCHET, Le Culte à Pesmes, Gray, imprimerie G. Roux, 1892, 400 p.
- Antoine PERRIER, « Compte-rendu sur Jean Girardot, Le Département de la Haute-Saône pendant la Révolution, 3 vol., 1972-1974 », Annales historiques de la Révolution française, n° 227, 1977, p. 139-149.
- Marie-Josèphe PETITHUGUENIN, L’église Saint-Georges de Vesoul au fil du temps (du XVIe siècle à nos jours), cloches, orgues, chant, Vesoul, 2008, 110 p.
- Danièle PINGUIÉ, « Gardes bourgeoises et milices nationales en Haute-Saône, 1789-1790 », La Garde nationale entre nation et peuple en armes, Mythes et réalités, 1789-1871, Serge Bianchi et Roger Dupuy (dir.), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, p. 165-179.
- Roger ROUX, Le Droit de manantage à Vesoul, au XVIIIe siècle, manuscrit inédit de l’avocat général Bergeret, Gray, ancienne imprimerie Roux, 1928, 19 p.
- Daniel SASSI, Vesoul : Histoire et Patrimoine, Vesoul, Imprim'plus, 2012, 273 p.
- Service éducatif des Archives départementales [de la Haute-Saône], Vesoul au XVIIIe siècle : cartes, plans et représentations de la ville, Dossier pédagogique, Vesoul, Conseil général de la Haute-Saône, [sd], 13 p.
- Vincent TABBAGH, « Fiche de la collégiale Saint-Christophe de Champlitte », Collégiales - Base des collégiales séculières de France (816-1563) [en ligne <http://vafl-s-applirecherche.unilim.fr/collegiales/?i=fiche&j=343>], version du 9/4/2019, consultée le 21/1/2022.
- Jules de TRÉVILLERS, Sequania Monastica, Dictionnaire des Abbayes, Prieurés, Couvents, Collèges et Hôpitaux conventuels, Ermitages de Franche Comté et du Diocèse de Besançon antérieurs à 1790, chez l’auteur, 2, rue Paul-Morel, Vesoul, 266 p.
Histoire culturelle et musicale
- Jacques GARDIEN, L’Orgue et les Organistes en Bourgogne et Franche-Comté au XVIIIe siècle, Paris, Droz, 1943, 577 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY, Karl Joseph Riepp et l’orgue de Dole, Bron, Imprimerie Ferréol, 1985, 2 volumes, 649 pages, planches (thèse de musicologie, Daniel Paquette (dir.), Université Lyon II, soutenue le 15 juillet 1985).
- Pierre Marie GUÉRITEY, « La Haute-Saône, Terre d’accueil pour les Callinet, facteurs d’orgues (1872-1903) », Haute-Saône SALSA, n°107, janvier-avril 2019, p. 6-37.
- Pierre Marie GUÉRITEY, L’Orgue de Pesmes, Guillaume Mourez facteur d’orgues à Auxonne, 2020, 12 p. Publié en ligne en juin 2020 : https://karljosefriepp.blogspot.com/2020/06/guillaume-mourez-et-lorgue-de-pesmes.html
- Pierre Marie GUÉRITEY, Bénigne Boillot (1725-1795), Facteur d’orgues et organiste, L’orgue et les organistes 1591-1798, chez l’auteur à Saint-Jean-de-Losne, 2021, 502 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY, Orgues et organistes de Besançon aux XVIIIe et XIXe siècles, (quelques notes…), 2022, 30 p. Publié en ligne en mars 2022 : https://karljosefriepp.blogspot.com/2022/03/orgues-et-organistes-de-besancon.html
- Pierre Marie GUÉRITEY, Orgues et organistes de l’abbaye de Corneux, 1763-1790, 2022, 20 p. Publié en ligne en avril 2022 :
- https://karljosefriepp.blogspot.com/2022/04/orgues-et-organistes-de-labbaye-de.html
- Stéphane PONARD et Jean-Christophe TOSI, Orgues en Franche-Comté, tome 2, Haute-Saône, Jura, Territoire de Belfort, Association régionale de développement, d'information et d'action musicale, Besançon, Direction régionale des affaires culturelles de Franche-Comté, 1989, non paginé [environ 130 p.].
- Orgues en France, Fédération francophone des Amis de l’orgue (FFAO) et ministère de la culture, Inventaire national des orgues, plate-forme contributive, mise en ligne en 2021 : https://inventaire-des-orgues.fr/orgues/?page=1&departement=Haute-Sa%C3%B4ne&sort=completion:desc
Bibliographie élaborée par Sylvie GRANGER
(avril-mai 2022)