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ALEXANDRE, Jean (1758-1831)
État civil
NOM : ALEXANDRE     Prénom(s) : Jean     Sexe : M
Date(s) : 1758-7-22   / 1831-10-31 
Notes biographiques

Jean ALEXANDRE, chantre, doreur, politicien engagé sous la Révolution et inventeur prolifique, est peut-être l'une des personnalités les plus singulières de cette enquête. Néanmoins, sa vie reste mal connue. De nombreuses données recueillies, principalement sur la période révolutionnaire et post-révolutionnaire, sont tirées de sources secondaires et demeurent floues. Certains événements de sa vie semblent contradictoires. C'est donc avec beaucoup de prudence qu'il faut les aborder (ils sont indiqués en italiques dans la notice ci-après).

1/ Vie et carrière de musicien d'église

• 22 juillet 1758, Argentan (Orne) : Jean ALEXANDRE est né sur la paroisse Notre-Dame de Coulandon de parents que la sage-femme jurée d'Argentan qui présente l'enfant au baptême refuse de nommer.
Le musicien se prétendra ultérieurement fils de Jean-Jacques ROUSSEAU. Étant un fervent révolutionnaire, cette manière de justifier sa "naissance sous X" relevait probablement avant tout de la propagande idéologique. Peut-être s'en était-il convaincu. Les cinq enfants naturels que Jean-Jacques Rousseau eut avec Marie Thérèse Levasseur sont tous nés à Paris, où le couple résidait, entre 1747 et 1755 et ont été placés à l'assistance publique. Ces données sont loin de correspondre à celles que nous fournissent les sources primaires sur la vie de Jean ALEXANDRE.

Le début de sa vie, sa formation, ses premiers emplois ne sont pas actuellement connus. A-t-il été enfant de chœur à Argentan ?L'enquête reste à mener à leur sujet !

• 18 janvier 1787, Poitiers : Jean ALEXANDRE est reçu basse-contre à la collégiale Saint-Hilaire-le-Grand.
• 18 mai 1787, Tours : Le chanoine Moulin est chargé d'écrire à ce musicien basse-contre de Poitiers afin de lui proposer de venir se faire "auditionner" ["ut a nobis audiatur") au chapitre de la collégiale Saint-Martin en lui précisant qu'il sera défrayé de ses frais de voyage pour lesquels il recevra la somme de 24 livres. Nous n'avons pas relevé d'indice de sa venue par la suite dans le registre ni même d'une réponse.
• 29 mai 1787, Poitiers : Jean ALEXANDRE épouse Rose Chenu, fille mineure de feu François Chenu et feu Jeanne Poudret. Jean HOURTICOLOU est présent et signe. 

• [Dates inconnues], Poitiers : Il aurait servi le chapitre de Saint-Pierre-L'Hospitalier, avant, en même temps ou après son passage à Saint-Hilaire-le-Grand.

• 29 juillet 1788, Poitiers : Basse-contre en titre à Saint-Hilaire-le-Grand, il reçoit 8 livres par semaines, plus les gains ordinaires du choeur, à condition de résider. Il est "attaché à l'église depuis longtemps".

• 1788-1791, Poitiers : Il fait baptiser quatre enfants. Jean-Baptiste DOLLÉ est le parrain de l'un d'eux.

• 23 avril 1789, Poitiers : Jean ALEXANDRE passe une annonce pour ses services de doreur alors qu'il est toujours basse-contre à Saint-Hilaire-le-Grand.

• [vers août 1790], Poitiers : Il rédige une demande de pension au directoire du département de la Vienne. Il dit avoir 32 ans et résider à Poitiers, rue de la Tranchée, paroisse Sainte-Triaise. Ses revenus sont de 8 livres par semaine (416 livres par an) dans son certificat et 12 livres par semaine (624 livres par an) dans sa supplique, plus 12 livres pour les fonctions de chapier, plus 120 livres de gains ordinaires du bas-choeur (8 boisseaux et demi de froment et 6 boisseaux 3/4 de seigle). Il prétend recevoir 756 livres par an alors que l'administration inscrit 416 livres de gages fixes, se référant au certificat du chapitre. Il est marié et père de plusieurs enfants et chargé d'un beau-frère attaqué d'un mal d'yeux incurable
• 4 août 1790, Poitiers : Le chapitre de Saint-Hilaire-le-Grand lui remet un certificat.
• 22 novembre 1790, Poitiers : Il co-signe une supplique avec les musiciens du chapitre de Saint-Hilaire : Jean-Baptiste DOLLÉClaude Marguerite LARDYJean-Baptiste BROCHETClaude Robert DUVALCharles PIERRONJean-Baptiste TORELLELouis Victor BABINJean HOURTICOLOUFrançois POULAINNicolas Joseph VENON et Pierre Louis DELAURIÈREPierre BEAUMONT ne fait pas partie des signataires mais était également en poste à Saint-Hilaire-le-Grand à ce moment-là.
• [1791], Poitiers : Le directoire du district de Poitiers estime qu'il y a lieu d'accorder à Jean ALEXANDRE une gratification de 200 livres.
• 28 avril 1791, Poitiers : Lors du baptême de sa fille Marie Émelie il est dit doreur.
• 28 juin 1791, Poitiers : Il reçoit 37 livres 10 sols pour un mois de service à la collégiale Saint-Hilaire-le-Grand. Il subsiste une ambiguïté entre ses activités parisiennes et ses activité poitevines. Il est très peu probable qu'il faisait régulièrement le voyage entre les deux villes : trop long, trop fatiguant et trop coûteux.

• 1790-[1793 ?], Paris : ALEXANDRE aurait exercé en qualité de chantre à la paroisse de Saint-Sulpice. On suppose qu'il y a exercé jusqu'à la transformation de cette dernière en temple de la Raison, puis en temple des Victoires pour le culte théophilantropique.

• 1790-1801 : Parallèlement, il devient un cadre de la Révolution. Son engagement politique l'entraîne vers d'autres horizons à partir de 1793 (cf. deuxième section).

• [1798-1799], Poitiers : Il prête serment à la République. Il avait déjà prêté serment en 1792.

• [1801/1802], Bordeaux : Monseigneur d'Aviau du Bois de Sanzay, ancien archevêque de Poitiers devenu archevêque de Bordeaux semble appuyer la candidature de Jean Alexandre comme chantre au bas-chœur de l'église métropolitaine de Bordeaux. Cette information est livrée par le Marquis de Roux sans ressource critique. Charles d'Aviau du Bois de Sanzay est connu comme un profond réfractaire à la Révolution, à la constitution civile du clergé et à la philosophie des Lumières. Cette personnalité ne semble guère compatible avec celle de Jean Alexandre décrite par ailleurs, laquelle est peut-être à nuancer tant les traces qui nous restent sont éparses et discutables.

• 1809, Angoulême : Jean ALEXANDRE a repris ses activités de doreur et est devenu chantre à la cathédrale Saint-Pierre. On ne sait pas à quelle date précise il est reçu par le chapitre cathédral.

2/ Engagement dans la Révolution

• Octobre 1790, Orléans & Poitiers : D'après le Marquis de Roux (Histoire religieuse de la Révolution à Poitiers et dans la Vienne, 1952) le ministre Roland l'aurait chargé d'une mission de propagande.
• Décembre 1790, Poitiers : Il était devenu un membre important de la Société Populaire. Tout cela semble, encore une fois, un peu contradictoire avec ses activités parisiennes. 

• août 1790-[1793], Paris : Jean ALEXANDRE préside la section révolutionnaire du Luxembourg. Cette section correspond parfaitement à son secteur d'exercice (paroisse Saint-Sulpice). Il quitte cette fonction pour s'engager dans l'armée de Lyon.

• octobre 1792, Dans le Loiret : Toujours d'après le marquis de Roux, le département, avec l'appui de Roland, lui aurait proposé de remplir un siège vacant à la Convention. Il aurait refusé.
• novembre 1792, Poitiers & Paris : Il est accusé d'avoir participé aux massacres de septembre 1792, en faveur desquels la section du Luxembourg avait voté. Il dément et prétend qu'il s'était absenté justement le jour du vote pour rendre visite à l'un de ses enfants mis en nourrice. Son alibi semble étrangement taillé sur mesure. Pour autant, certains témoignages de prêtres persécutés laissent entendre qu'il a pris la défense des victimes de violences aux moment de leur transfert à la prison des Carmes. D'autres témoignages affirment, au contraire, qu'il se serait vanté du meurtre de Monseigneur de Lau, archevêque d'Arles. Son nom ne fut jamais mentionné lors du procès de floréal an IV. Ces accusations le suivirent et il dut s'en défendre toute sa vie. La Société Populaire de Poitiers le maintient pour le renvoyer plus tard.
• décembre 1792, Poitiers : Il devient commissaire des guerres à Poitiers et participe au conflit vendéen. 

• septembre 1793-décembre 1793, Lyon : Il rejoint l'armée de Lyon.
• décembre 1793 : ALEXANDRE devient agent supérieur pour l'encadrement de l'armée de l'Ouest. Il adresse au comité de salut public un mémoire stratégique de libération de l'Ouest par la propagande qui a pour titre Projet pour anéantir la coalition des tirans, dissiper leur espérance, assurer la Liberté sans retour, enhardir les génération future à purger leur gouvernement, ou le changer même, toutes les fois que la tirannie se serait emparée du pouvoir, sans qu'il soit besoin que le sang coule. 

• 2 mars 1795, Poitiers : Toujours soupçonné d'être un septembriseur, il finit par être renvoyé de la Société Populaire.
• 13 juin 1795 [25 prairial an III], Bourges : Il rejoint l'armée de Bourges comme commissaire des guerres. Il est destitué comme illettré à une date inconnue. Il est difficile de croire que Jean ALEXANDRE était illettré. Il semble qu'il ait été victime du conflit qui opposait un de ses supérieurs et un homonyme nommé Charles Alexis Alexandre. 

3/ Un ingénieur malchanceux

• Il propose un système de distribution de ce que nous appellerions aujourd'hui des "tracts" par le biais d'un aérostat. Il remplace la nacelle par une galerie creuse où sont placés les papiers. Cette galerie est munie de systèmes d'ouvertures conçues pour s'ouvrir à intervalles réguliers. Sont système est applaudi par les Amis de la Constitution qui le font connaître à toutes les associations patriotiques du royaume. Alors qu'il est engagé dans le conflit armée à Lyon, on lui donne des crédits pour son système. Il demande conseils à Joseph Montgolfier qui fait le déplacement et lui prête main forte.

• En l'an VIII [1799-1800] : Il soumet l'idée d'un système de communication télégraphique afin que Bonaparte puisse échanger secrètement avec les autres consuls. Bien qu'il se soit heurté à l'indifférence générale, son avancée dans le domaine de l'électricité sera salué dans un ouvrage d'histoire des sciences paru dans le dernier tiers du XIXe siècle (Figuier, Les merveilles de la sciences, 1867-1891). Il semble avoir été le ou l'un des précurseurs du télégraphe à cadran.

• Il a également conçu une voiture automatisée via un système de leviers. Testée à Blossac, la voiture n'a jamais fonctionné.

• Au début du XIXe siècle, alors qu'il est à Bordeaux, il fait breveter un système d'épuration de l'eau de la Gironde. Il n'a jamais pu lever les fonds pour le construire.

• Lors de la Révolution de 1830, il propose le même système de distribution par aérostat qu'il avait déjà soumis sous la Révolution.

4/ Décès

• 31 octobre 1831, Angoulême : Jean ALEXANDRE décède à l'âge de 75 ans. Cela ne correspond pas à l'année de naissance qu'on lui connaît, à deux ans près. Il était toujours en activité à la cathédrale. Il est dit qu'il était originaire de Paris. Il se pourrait qu'il ait été confié à l'assistance publique après sa naissance. Si c'est le cas, cela expliquerait peut-être pourquoi il prétendait, voire pensait, être un enfant naturel de Jean-Jacques Rousseau.

Mise à jour : 5 juillet 2017

Sources
Ad86 / L 235 ; Ad86/ BMS Poitiers (Saint-Pierre-L'Hospitalier) ; F-Ad 86/ L 257 ; F-Ad86/ BMS Saint-Hilaire ; F-Ad86/ G 570 ; F-Ad86/ L 226 ; F-Ad86/ L 235 ; F-Ad86/ L 257 ; F-Ad86/ L 278 ; F-Ad86/ NMD Poitiers ; F-Adio.Tours/ registre capitulaire St-Martin n°35 ; F-Am Angoulême/ 1E95 ; F-Poitiers méd François-Mitterrand/ BP 403 Affiches du Poitou ; Figuier, Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 2, p. 93-98 ; P. Rambaud, Notes et documents sur les artistes en Poitou..., 1920. ; Roux, Marquis de, Histoire religieuse de la Révolution à Poitiers et dans la Vienne ; Roux, Marquis de, Histoire religieuse de la Révolution à Poitiers et dans la Vienne...

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