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ROBERT, Jean François (1756-1813)
Date(s) : 1756-1-9 / 1813-1-28
Jean François ROBERT occupe une place de choix dans l'historiographie du sujet en tant que membre d'un "réseau" de quatre chantres de la génération 1790, tous nés dans le même village, près de Paris, et tous chantant la basse-contre dans diverses églises en 1790. Son destin est indissociable de ceux de Martin-Antoine ARNOULT, André-Louis CLAUSE et André-Laurent GAILLOURDET. C'est avec ce dernier musicien qu'il a tissé les liens les plus profonds et durables, l'épaulant pour venir chanter à Saint-Martin de Tours puis luttant tous deux contre la machine administrative pour faire reconnaître leurs droits à une pension. Sous l'Empire, ils chantent encore de conserve à l'église Saint-Eustache de Paris.
• 9 janvier 1756, Houilles [Yvelines actuelles] : Jean-François ROBERT naît dans ce village viticole niché dans une boucle de la Seine, à quinze km – et deux passages de bac – à l’ouest des tours de Notre-Dame, et à dix-sept km au nord de Versailles. À pied ou à cheval, les liens entre le village et Paris sont faciles et intenses. Il est le fils de Jean-Pierre, maître menuisier et de Marie-Anne Noblet, fille de vigneron. Ses parents accueillent chez eux des enfants en bas-âge mis en nourrice par des Parisiens issus de monde de la boutique ou de l'office ; peut-être l'une de ces familles jouera-t-elle un rôle dans la venue du jeune Jean-François à Paris, à peine âgé de vingt ans ? En 1764, André Danican Philidor, bourgeois de la paroisse Saint-Eustache, [François André fils du grand musicien auteur d'opéras comiques?], n'accepte-t-il pas d'être le parrain du fils d'un vigneron de la paroisse ? En 1772, c'est le musicien Amable-Joseph LOBEY qui assiste à l'inhumation de son fils placé chez les Arnoult.
• [Années 1763-1776] : Jean-François ROBERT a peut-être été enfant de chœur dans une église parisienne. Néanmoins Houilles ayant été le berceau d'au moins quatre musiciens d'Église de la génération 1790, on peut aussi envisager une formation au chant ecclésiastique plus locale, peut-être assurée, ou au moins amorcée, par le premier chantre de la paroisse qui est aussi le maître d'école du village, André DESPREZ, le parrain de André Laurent GAILLOURDET. Ce dernier, lui aussi futur basse contre, est né neuf mois exactement avant le jeune Robert.
• À partir de 1776, Paris : Jean-François ROBERT chante la basse contre dans un établissement inconnu ; il n'est pas mentionné dans les registres capitulaires de la cathédrale Notre-Dame.
• Juste avant août 1778 : Il chante à Sées (depuis quand ?), très probablement à la cathédrale Notre-Dame. En effet, les bans de son mariage (au Mans en février 1779) sont publiés à Saint-Gervais de Sées.
• Vers la mi-août 1778, Le Mans : Jean-François ROBERT est reçu chantre musicien à la Cathédrale Saint-Julien Il occupe probablement le poste antérieurement tenu par Jean Eustache FRÉCINNE, à la voix puissante de basse-contre, décédé en janvier précédent.
• 16 février 1779, Le Mans : Jean François ROBERT se marie avec Françoise Briquet, veuve d'Antoine Rome, cordonnier, il est dit "depuis 6 mois dans cette paroisse". Son épouse accouche 6 mois et demi après le mariage, le 25 août 1779, paroisse du Crucifix du Mans. La marraine de leur fils Jean-Jacques-Louis est l'épouse d'un chantre de la cathédrale, Louis VILLETTE. Le parrain est un maître menuisier de la ville, peut-être l'indice qui permet de penser que ROBERT a gardé une activité dans ce domaine puisqu'elle le fera vivre vingt ans plus tard.
• 28 juin 1780, Orléans : Jean François ROBERT commence à chanter à la cathédrale Sainte-Croix sous la direction de Charles HÉRISSÉ. Il est dit "du diocèse de Paris, artiste musicien expérimenté". Il est remplacé à la cathédrale St-Julien par André Laurent GAILLOURDET, venant lui aussi de Houilles, mais via Chartres, et peut-être via Orléans (brièvement).
• 17 mars 1781, Orléans : Jean-François ROBERT obtient un certificat de vie et mœurs de la cathédrale Sainte-Croix, qui spécifie qu'il y a exercé "jusqu’à ce jour".
• 24 mars 1781, Le Mans : Il signe comme parrain du premier enfant Gaillourdet. Il est dit "cousin de l'enfant". Aucun poste n'est spécifié le concernant. On peut penser qu'il a retrouvé une place à la cathédrale Saint-Julien, sans doute en remplacement de Louis GODÉ. Le maître de musique est alors René LEMERCIER.
• Jean-François ROBERT est attesté au Mans au moins jusqu'en juin 1786, sa présence est attestée dans les registres paroissiaux, et probablement y reste-t-il en réalité jusqu'en juillet 1787. Comme GAILLOURDET, Robert chante sous la direction de Jean-François LESUEUR durant sa brève période à la tête du chœur de la cathédrale (de mi-mai 1782 à début février 1783), puis sous la direction de François MARC.
• 18 août 1787, Tours : Il est reçu comme basse-contre à la collégiale Saint-Martin. On précise qu'il est du diocèse de Paris et on lui verse 30 livres de frais de voyage. Le secrétaire n'a pas précisé de quelle ville il venait. Au Mans, il est remplacé par Martin Antoine ARNOULT, lui aussi né à Houilles.
• 23 août 1787, Tours : Le chapitre lui accorde une avance sur ses gages de 150 livres; il remboursera cette somme chaque mois avec des prélèvements de 15 livres.
• 12 janvier 1788, Tours : La fabrique lui verse 12 livres en raison de ses ennuis de santé.
• 10 juillet 1788 : Le chapitre annonce que ses gages passeront à 1 100 livres par an à la prochaine Saint-Jean-Baptiste.
• 10 septembre 1788 : Jean-François ROBERT "musicien de St-Martin, demeurant paroisse St Venant", comparaît devant le lieutenant de police, car sa belle-fille, Marie Rome, 17 ans, a été manipulée par une tireuse de cartes chez laquelle elle a peut-être dépensé 10 livres en tout, estime son beau-père (à raison de 12 sols la séance) et qui lui a promis “quelle seroit mieux à Paris qu’icy, qu’elle y feroit plus de fortune”. On apprend que c'est le musicien qui s’occupe de la jeune fille, qui l'a installée dans une chambre louée et qui a financé divers effets (draps, casaquins de coton etc.…).
• 15 novembre 1788 : Les chanoines décident d'augmenter ses appointements annuels à 1 200 livres à partir du 25 novembre.
• 7 mars 1789, Tours : André Laurent GAILLOURDET est reçu à son tour basse-contre à la collégiale Saint-Martin ; le rôle joué par son ami ROBERT dans ce recrutement semble évident.
• 3 février 1790, Tours : Avec GAILLOURDET, il signe comme témoin au mariage paroisse Saint-Venant de son frère Sébastien Robert, compagnon menuisier avec Marie Mabille, fille d'un marchand fabricant de draps d'Amboise.
• 23 février 1790, Tours : À la suite de la requête qu'il a présentée lors du chapitre général du mois de novembre précédent, et nonobstant les rumeurs qui courent sur lui en ville, jugées infondées par le chanoine qui avait été commis à enquêter, la compagnie décide de lui octroyer la somme de 700 livres en titre perpétuel.
• 6 novembre 1790, Tours : Jean-François ROBERT est toujours en poste comme basse-contre à Saint-Martin. Il est rétribué "sur le pied de 1 200 L" et jouit par acte capitulaire d'un titre perpétuel en retraite de 700 livres. Il a chanté trois ans sous la direction du maître de musique Julien Élie LEROY.
• 1er février 1791, Tours : Le directoire du district stipule qu'il doit avoir la somme de cinq cent livres de pension.
• 11 juillet 1791, Tours : Un arrêté du district lui accorde un secours de 150 livres.
• 15 septembre 1791, Tours : Jean François ROBERT est reçu comme l'un des quatre chantres de la nouvelle paroisse Saint-Martin dont la fabrique fonctionne depuis le mois de juillet précédent. Il y retrouve ANGO et PINSON et trois chantres, VASSEUR, MANDREVILLE, GAILLOURDET. En réalité, tous étaient déjà en poste en mai car le culte n'a pas été interrompu. Chacun recevra "trente trois livres six sols huit deniers par mois, pour leur service ordinaire dans la ditte Eglise" soit un revenu annuel de 400 livres. soit trois fois moins qu'à la collégiale. Le 25 novembre suivant, tous rédigent une requête à l'intention de la fabrique, réclamant d'être enfin payés. Cette dernière dégage un secours de cent livres à chacun, somme correspondant à un trimestre échu en octobre.
• 25 mai 1792, Tours : ROBERT se trouve dans le cas de plusieurs musiciens qui, ayant retrouvé une place dans les nouvelles paroisses de la ville, ne peuvent toucher la pension de 200 livres maximum prévue par la loi du 26 août 1791.
• 24 août 1792, Tours : Le directoire du département fixe sa pension à 700 livres par an; elle sera versée par trimestre de 175 livres.
• 2 octobre 1792, Tours : On lit dans le registre de la fabrique de la paroisse Saint-Martin que" ... le citoyen ROBERT l'un des chantres de cette Eglise [s'est] engagé d'etre plus honeste a l'égard desdits citoyens vicaires dans le service de cette Eglise".
• 1er mars 1794, Tours : Il touche du directoire du département la somme 73 livres 5 sols 6 deniers qu'on lui devait encore pour deux mois et six jours ses gages de chantre à Saint-Martin échus au 31 décembre 1793, c'est-à-dire le jour de la suppression de la paroisse.
• 12 mai 1794, Tours : Jean François ROBERT, musicien, perd son épouse, âgée de 54 ans; elle s'éteint à leur domicile de la rue de la Grosse Tour à cinq heures du matin.
• 20 novembre 1798, Argenteuil [Val d'Oise] : Le citoyen Jean-François ROBERT, qui est revenu au métier paternel de menuisier, se remarie avec la citoyenne Marie Anne Constantin, âgée de 31 ans, originaire de Montesson.
• 28 février 1801, Paris : Dans le courrier qu'il adresse au préfet d'Indre-et-Loire pour réclamer le versement de sa pension, André Laurent GAILLOURDET associe Jean François ROBERT qui se trouve dans le même cas que lui. Il parle en son nom : "Nous n’avons personne à employer auprès de vous pour solliciter votre bienveillance, nous préférons d’ailleurs mettre notre confiance entière en vous, espérant tout de votre humanité et de l’accélération que vous pourrez plutôt mettre vous-même à un retard qui nous est très préjudiciable". ROBERT avait entrepris à cet effet des démarches auprès du préfet de Seine-et-Oise qui lui avait répondu de justifier que les anciens musiciens de Saint-Martin avaient bien prêté le serment exigé par la loi du 14 août 1792, sous faute d'être déchu de leur pension. Il faut des expéditions de procès-verbaux et non des certificats, ce qui justifie la démarche de GAILLOURDET. Elle permet de constater que les deux amis sont toujours en relations et s'entraident.
• 5 juillet 1806, Paris : Jean François ROBERT, mentionné à nouveau comme chantre, domicilié rue du Jour (Section des Marchés), entre à l'Hôpital de la Charité pour hémophtisie. Il en sort (guéri ?) le 1er août suivant. La rue du Jour passe aux pieds de l'église Saint-Eustache où il est très probable qu'il officiait alors.
• 28 janvier 1813, Paris : Atteint de fièvre, Jean François ROBERT, chantre, qui a été encore hospitalisé la veille à la Charité, salle Saint-Louis, meurt à huit heures du soir. Il résidait alors au 24, "rue du Signe", actuelle rue du Cygne, pas très loin encore de Saint-Eustache, et il était à nouveau veuf.
• • • Bibliographie :
Sylvie Granger, « Itinéraires de quatre chantres ordinaires dans la base de données Muséfrem 1790 », La circulation de la musique et des musiciens d’Église (France, XVIe-XVIIIe siècle), X. Bisaro, G. Clément et F. Thoraval (dir.), Paris, Garnier, collection Musicologie, 2017, 396 pages, p. 325 à 341.
Mise à jour : 28 juin 2022