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JOURDAN, Charles François (1758-1838)
État civil
NOM : JOURDAN     Prénom(s) : Charles François     Sexe : M
Date(s) : 1758-12-31   / [1838]
Notes biographiques

L'église paroissiale Sainte-Croix de Nantes fait partie des douze églises paroissiales existant sous l'Ancien Régime. L'église reconstruite au XVIIe siècle ne semble pas avoir été dotée d'un orgue avant 1842. Quatre prêtres de chœur sont répertoriés dont Charles François JOURDAN. Son parcours a pu être documenté grâce au travail d'Alfred Lallié (Le diocèse de Nantes pendant la Révolution). Le ci-devant prêtre de chœur se mute en curé intrus, citoyen zélé et convaincu par les idées neuves. Il est mobile, touche à tout et finit par quitter Nantes pour La Havane. 

• 31 décembre 1758, Gavray [Manche] : Les registres paroissiaux de Gavray étant lacunaires pour les années 1758-1761, force est de reprendre les informations des sources indirectes (Lallié) qui concordent avec l'acte de mariage de 1794. Le rédacteur de l'acte a en mains l'acte de "naissance" de Charles François en date du 31 décembre 1758. Par ailleurs, les bribes de registres paroissiaux de Gavray ont établi que le père, Jean Jourdan, était cordonnier (25 septembre 1761, baptême de Marie Anne Jourdan).

• Comme souvent les lieux et périodes de formation du jeune JOURDAN restent à renseigner. Gavray étant à proximité de Coutances, peut-il avoir été enfant de chœur de la psallette de la cathédrale ?

• 23 mars 1789, Nantes [Loire-Atlantique] : Au moins onze prêtres de chœur sont réunis et signent le registre lors de l'inhumation de leur confrère Missire Jacques FOUCHER, décédé la veille paroisse Sainte-Croix. Il s'agit de Jean Joseph LE COUTEUX (doyen du chœur), DUMAINE, André VANDERVEKEN, Jean-Baptiste François GUYOT, Gilles DELAHAYE, Joseph PAVAGEAU, Brice LE PROVOST, Charles François JOURDAN, Charles CHAUVET et Joseph BRIANCEAU.

 • ? - 1790, Nantes : À quelle date JOURDAN est-il reçu prêtre de chœur de Sainte-Croix ? Ni les comptes de fabrique succincts ni les registres paroissiaux ne laissent apparaître son nom ou sa signature. Charles François JOURDAN est prêtre chapelain, bénéficier, soit potentiellement prêtre de chœur de la paroisse Sainte-Croix.

• En 1790, l'effectif cantoral de l'église paroissiale Sainte-Croix est constitué de quatre prêtres de chœur qui sont Joseph BRIANCEAU, Jean Joseph LE COUTEUX, Joseph PAVAGEAU et Charles François JOURDAN avec une incertitude quant à Gille DELAHAYE. Y sont attachés deux prêtres habitués, trois vicaires et deux diacres sous l'autorité du recteur prieur Delaville.

• 1790, Nantes : Charles François JOURDAN est vicaire assermenté de la paroisse Saint-Clément.

• 17 juillet 1791-[1796], Saint-Étienne-de-Montluc [Loire-Atlantique] : Charles François JOURDAN est curé constitutionnel de la paroisse où il est rejeté par les paroissiens. Ses relations avec l'ex-curé et prêtre de chœur Pierre MICHEL sont tout aussi exécrables. Quant à la Mairie, elle lui enjoint à plusieurs reprises de quitter le presbytère. Malgré ce climat de rejet, JOURDAN résiste aux pressions, soutenu par ses amis du 5ème bataillon de la Manche.
• 21 août 1791 : Charles François JOURDAN prête le serment constitutionnel avec le vicaire Pierre MICHEL qui se rétractera au cours d'une grande messe suivie d'un Te Deum.
• 12 septembre 1791-8 décembre 1791 : Les Stéphanois adressent une pétition demandant l'éloignement de leur nouveau curé qui les "force à n'aller qu'à sa messe". S'ensuit une émeute réprimée par l'envoi de troupes de Nantes. Les altercations se répètent , le curé est interrompu en chaire, etc.
• 12 décembre 1791 : Ledoux, ancien maire de Savenay (Histoire de Savenay, 1875) rapporte comment JOURDAN manqua être écrasé par le cheval d'un dénommé Giffard qui le poursuivit un soir jusqu'à sa cure en lui jetant des pierres, escaladant les murs de la façade. L'homme était déterminé à tuer le curé qui n'échappa à son destin que grâce à une arme défensive...

• 1792, Saint-Étienne-de-Montluc : Les archives révolutionnaires, L 757, consignent un certain nombre d'évènements qui corroborent les notes de Lallié, Ledoux et qui sont imputables à JOURDAN, à savoir la dénonciation de trois prêtres insermentés avec réquisition de la gendarmerie et des volontaires. Sont répertoriés les notes de dépenses du curé JOURDAN pour le recrutement des volontaires ayant accompagné son installation ainsi que les plaintes et dénonciation des habitants contre ledit curé.

• 5 avril 1793, Nantes : Le département fait état des appointements versés aux curés dont JOURDAN à Saint-Étienne-de-Montluc.

• 18 novembre 1793, Saint-Étienne-de-Montluc  : JOURDAN, homme de conviction s'il en est, signe un acte de mariage en précisant "curé républicain d'Étienne".
• 22 décembre 1793, Savenay [Loire-Atlantique] : Prenant le commandement d'un détachement de la garde nationale de Saint-Étienne qui se trouvait à la Mouëre, JOURDAN participe à la bataille de Savenay qui clôt les guerres vendéennes. Probablement pris dans l'escarmouche précédent la grande bataille du 23 décembre, JOURDAN et ses hommes se replient sur Le Croisic.

• 30 germinal an II [19 avril 1794], Saint-Étienne-de-Montluc : Le citoyen Charles François JOURDAN, qui a renoncé à la prêtrise, épouse Julie Fromont. Renonce-t-il vraiment ou est-il apostat ? En effet, les premières lignes de l'acte ont un ton quasi bravache : "ci-devant prêtre et curé de cette commune". Son épouse est quant à elle divorcée, originaire du Pellerin en Loire-Inférieure, près de Paimboeuf. La cérémonie est résolument républicaine, ne serait-ce que par les amis du citoyen JOURDAN, à savoir Minée, ex-évêque constitutionnel devenu administrateur du département ainsi que Pierre Le Bettet, commandant du 5ème bataillon de la Manche, un bras armé sur lequel JOURDAN peut s'appuyer lors de ses déboires avec les paroissiens. Il faut aussi mentionner Brillaud, autre administrateur ainsi que Jean-Baptiste Fromont, père de la mariée, qui restera un des fidèles de JOURDAN.
L'ancien maire de Savenay Ledoux raconte comment avant son mariage il avait rassemblé ses paroissiens "au pied de l'arbre de la liberté" pour solliciter leur approbation avant son mariage. Les explications semblent avoir été convaincantes.

• An II [1794] : La série L 757 mentionne l'arrestation de l'abbé Aufffray, prêtre réfractaire.

• [1794]- 5 thermidor an III [22 juillet 1795], Saint-Étienne-de-Montluc : JOURDAN est élu membre du comité de surveillance qu'il préside jusqu'à la suppression des comités.

• 22 pluviôse an III [10 février 1795], Saint-Étienne-de-Montluc : Le citoyen JOURDAN, ci-devant curé de la commune et demeurant au bourg, déclare la naissance de Julie Anne née le 6. Le grand-père et la tante maternels sont présents et signent avec le père. L'enfant meurt en nourrice le 12 avril 1795.

• [1796] Saint-Étienne-de-Montluc : JOURDAN quitte Saint-Étienne.

• 9 ventôse an IV [28 février 1796], Nantes : Charles François JOURDAN est désormais négociant et demeure à Nantes. Il déclare la naissance de Julie, assisté de Brillaud devenu agriculteur ainsi que d'un rentier.

• 9 pluviôse an V [28 janvier 1797], Pontchâteau [Loire-Atlantique] : JOURDAN, se présente comme marchand à la Mairie pour déclarer le décès de sa femme Julie Renée Fromont. Il est assisté de Gabriel Balouz, citoyen et prêtre ainsi que du notaire public Lescuyer, soit deux notables "vieux style".

• 20 floréal an VII [9 mai 1799], Chantenay [Loire-Atlantique] : Charles François JOURDAN, rentier, veuf, domicilié à Pontchâteau, se remarie avec Jeanne Sophie Maillard, mineure de vingt ans sa cadette, rentière, originaire du Palais à Belle-Ile en Mer [Morbihan]. Il épouse la fille de Claude Maillard officier d'artillerie, commandant de la batterie d'artillerie de Belle-Ile et chevalier de Saint-Louis. Maillard est venu de Belle-Ile pour le mariage de sa fille alors que la mère Jeanne Françoise Jamtel -parfois orthographié Jemtel ou Janitol- est défunte. Les témoins sont les indéfectibles J.B. Fromont et Brillaud alors juge au tribunal civil de Nantes. Sont aussi présents Gournay, officier de santé ainsi que Roland Hubert beau-frère de la future, rentier. Le mariage réunit donc une assemblée constituée de rentiers et de notables. Chantenay qui est mitoyen avec Nantes fut le théâtre des exactions de Jean-Baptiste Carrier, les noyades et fusillades de Nantes (1792-1793).

• 30 floréal an VIII [20 mai 1800], Pontchâteau : JOURDAN ex-curé intrus de Saint-Étienne de Montluc est installé comme Président de l'administration de Pontchâteau où il semble avoir "terrorisé la ville" (Bulletin et Mémoires, société d'émulation des Côtes-du-Nord, 1933).

• 13 brumaire an IX [25 octobre 1800], Nantes : JOURDAN et Jeanne Sophie ont une fille, Sophie Adèle. Les témoins sont Jean Stanislas Fromont, famille du premier mariage, et Jeanne Pélagie Maillard, tante maternelle de l'enfant et épouse de Roland d'Hubert. Sophie Adèle se mariera à Paris le 29 mai 1828 avec Pierre Ségur.
Si la vie professionnelle de JOURDAN est instable, il est fidèle dans ses amitiés.

• [1815]-1825 ap.,  La Havane : Plusieurs sources indirectes mentionnent que Charles François JOURDAN a quitté Nantes avec sa femme pour La Havane où il aurait été libraire. La date de son retour en France n'est pas connue ; quant à l'affirmation de son décès à Nantes.... elle est hasardeuse car JOURDAN n'est pas répertorié dans les tables décennales. Il ne figure ni à Nantes, ni à Saint-Étienne-de-Montluc, ni à Pontchâteau pas plus qu'à Gavray, Coutances ou Orléans.

• 16 juillet 1816, Nantes : Julie Jourdan, fille de Charles François épouse Marie Thomas Guichet, receveur de l'enregistrement au Pellerin. Compte tenu de son absence le père a envoyé son consentement manuscrit. Un membre de la famille attire l'attention, Denis Jean François Jourdan, oncle de l'épouse. La consultation des registres permet de savoir qu'il s'est installé à Nantes tardivement, y a perdu un enfant né à Gavray en 1794. Cette double délégation indique-t-elle que JOURDAN a pris la mer pour La Havane à cette époque ? Tout porterait à le penser.

• 28 mai 1861, Orléans [Loiret] : Deux jeunes négociants, Paul Émile Masson et Émile Narcisse Lemichon viennent déclarer à la Mairie le décès de Jeanne Sophie Maillard. Ils se présentent comme des amis de la défunte qui s'est éteinte la veille à 82 ans. Elle était née à Belle-Ile en Mer, veuve de Charles François JOURDAN, fille de Louis [Claude] Maillard, officier d'artillerie et chevalier de Saint-Louis et de Jamtel Frouteau de Laclos. La modification de patronyme s'expliquerait par la reprise du nom d'un de ses aïeux maternels.

Le parcours homérique de Charles François JOURDAN ci-devant prêtre de chœur de la paroisse Sainte-Croix, personnage haut en couleurs, s'éloigne radicalement de la musique après la Révolution. Il évoque néanmoins quelqu'un qui se fait entendre, une voix forte qui sonne haut, bien loin d'une psalmodie chuintée au sein d'un chœur paroissial.

Mise à jour : 22 novembre 2021

Sources
Revue de Bretagne..., 1894  ; A. Lallié, Le Diocèse de Nantes..., 1893 ; Bulletin et Mémoires, Côtes-du-Nord, 1933 ; F-Ad44/ BMS Nantes, Ste-Croix ; F-Ad44/ L 757 ; F-Ad44/ NMD Chantenay ; F-Ad44/ NMD Nantes ; F-Ad44/ NMD Pontchâteau ; F-Ad44/ NMD St-Etienne de Montluc ; F-Ad45/ NMD Orléans ; F. Ledoux, Histoire de Savenay, 1875 ; Les Affiches de Nantes  ; P. Grégoire, Etat du diocèse de Nantes en 1790, 1882  ; Revue de Bretagne..., 1894

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