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CHAPUZOT, Jeanne (1701-1774 ap.)
État civil
NOM : CHAPUZOT     Prénom(s) : Jeanne     Sexe : F
Autre(s) forme(s) du nom : CHAPPUZOT
CHAPUSOT
Date(s) : 1701-9-29   / 1774 ap.
Notes biographiques

Il y a plus invisible que la femme d'un organiste, c'est la belle-sœur d'un organiste ! Dans l'historiographie des orgues, le nom de la belle-sœur d'Edme LAUSSEROIS, organiste à Beaune puis à Dijon, qui cumule les tribunes grâce à l'aide de son épouse et de la sœur de celle-ci, n'est pas même cité. Pourtant, Jeanne CHAPUZOT – s'il s'agit bien d'elle – ne manquait pas de caractère : en témoignent l'action qu'elle intente contre les fabriciens de Saint-Pierre de Beaune qui l'avaient peu élégamment dépossédée de son poste, ou encore sa candidature, à l'âge de 73 ans, à la tribune de Nuits.

•  29 septembre 1701, Seurre [Côte-d'Or] : Sans doute née le jour même, Jeanne CHAPUZOT est baptisée dans l'église paroissiale de cette petite ville située à 40 km au sud de Dijon et à 25 km à l'est de Beaune. L'enfant reçoit pour parrain "Monsieur François Deslande Bailly de Pommard sous Beaune" et pour marraine une certaine Delle Jeanne Goudier, l'un et l'autre étant absents au baptême et s'y étant fait représenter.
Son père, "Maistre François Chapuzot, principal du collège de Seurre", et sa mère, Marguerite-Désirée Courtois, s'étaient mariés dans la même ville le 21 janvier 1698. Ils avaient eu un premier enfant, Antoine, le 10 novembre 1698, dont le parrain était "Maistre Anthoine Chapuzot, aussi principal du dit lieu" et la marraine la veuve d'un "bourgeois" de Seurre. Puis, le 20 février 1700, était née Anne [future organiste], qui avait eu pour parrain un "conseiller du roy, eslu des estats de la province et maire perpetuel de la ville de Seurre" et pour marraine la fille d'un "avocat à la cour". On se situe là, clairement, dans le cercle étroit des élites locales.

• On peut supposer que la fillette reçoit une éducation soignée dans laquelle la musique occupe une place importante. L'une de ses sœurs (au moins), Anne, sera également musicienne.

• [date inconnue, après 1701] : La famille Chapuzot quitte Seurre pour une destination qui reste à déterminer.
• [date inconnue, avant 1730] : La famille Chapuzot s'installe à Beaune, paroisse Saint-Martin. Abandonnant la gestion de collège, le père intègre l'administration fiscale.

• 20 mai 1730, Beaune : Sa sœur Anne, "musicienne jouant de l'orgue en l'église paroissiale Saint Pierre du dit Beaune", est marraine du septième enfant de Jean-Bernard GAULON, serpent de la collégiale. Le parrain est Edme LAUXERROIS, l'organiste de la collégiale. Jeanne assiste-t-elle à la cérémonie ? Leur père, le sieur François Chapuzot, est alors dit "contrôleur des traites foraines du dit Beaune".

• 7 janvier 1733, Beaune : Sa sœur Anne CHAPUZOT se marie avec l'organiste de la collégiale, Edme LAUSSEROIS.

Les années suivantes, on ne voit jamais Jeanne CHAPUZOT tenant un rôle dans les diverses cérémonies familiales. Les parrains et marraines recrutés par le couple Lausserois-Chapuzot appartiennent tant aux élites beaunoises qu'à la famille proche, grand-père, grande-tante, tante des enfants (le 31 juillet 1740, Claudine Chapuzot, "fille majeure, sa tante", est la marraine de la petite Claude-Anne Lausserois). On ignore (actuellement) si sa sœur Anne avait continué à toucher l'orgue de Saint-Pierre de Beaune après son mariage ou si, éventuellement, Jeanne l'y aurait remplacée.
Durant l'été 1743, la famille Lausserois quitte Beaune pour s'installer à Dijon où son beau-frère est devenu l'organiste de la Sainte-Chapelle. Jeanne a-t-elle suivi tout de suite, ou seulement lorsqu'on a eu besoin d'elle pour suppléer sa sœur et son beau-frère ?

• 5 avril 1744, Dijon : Edme LAUSSERROIS signe une convention avec l’église Saint-Pierre de Dijon par laquelle il s’engage à toucher l’orgue personnellement lorsque son service à la Sainte-Chapelle le lui permettra, ou, en son absence – ce qui sera évidemment le cas le plus fréquent –, à le faire toucher par son épouse, Anne CHAPUZOT, ou la sœur de cette dernière. Au vu de ce que l'on sait d'elle ensuite, il s'agit très probablement de Jeanne.

• 22 août 1745, Dijon : Les époux Lausserois passent une convention avec les fabriciens de l’église Notre-Dame de Dijon qui permettra à Anne Chapuzot d’exercer son art comme suppléante officielle de son mari. En cette fin d’août 1745, Edme Lausserois est officiellement titulaire de trois postes d’organiste, ceux de la Sainte-Chapelle, de Saint-Pierre et de Notre-Dame, ce qui reste possible puisqu'il se fait aider non seulement par son épouse, mais aussi par l’une de ses belles-sœurs explique Erik Kocevar ("Les servitudes des organistes de Notre-Dame de Dijon au XVIIIe siècle", L'Orgue, n°252, 1999).

• 15 août 1748, Dijon : Les fabriciens de l’église Saint-Pierre engagent un nouvel organiste, Thomas CHAIGNAY, et le 28 août 1748 le receveur de la fabrique verse à Edme LAUSSEROIS sa dernière demie-année de gages. Le poste de Saint-Pierre était peut-être trop peu lucratif.

Les années suivantes, lors des renouvellements des conventions entre les fabriciens de la paroisse Notre-Dame et Edme LAUSSEROIS, ce dernier mentionne son épouse, mais on ne trouve plus d'allusion à sa belle-sœur. Jeanne serait-elle déjà repartie pour Beaune ?

• [1757-1758] : À cette date-là, il est très probable que Jeanne ne se trouve plus à Dijon. Cette hypothèse trouve une confirmation dans le fait que le 18 décembre 1757, la jeune Antoinette DUPLUS est reçue organiste à Notre-Dame en remplacement des Lausserois. Les sœurs Chapuzot n'ont donc plus de fonctions à Dijon. Puis le 26 septembre 1758, Edme LAUSSEROIS meurt "subitement". Son fils Pierre-Philibert prend son relais à la tribune de la Sainte-Chapelle, dont il touchera l'orgue jusqu'à la Révolution.

• 28 décembre 1760, Beaune : Les fabriciens de la paroisse Saint-Pierre de Beaune passent bail de leur orgue pour six ans avec "demle Jeanne CHAPUZOT fille majeure en cette ville", devant le notaire Larcher "pour toucher l’orgue de l’Eglise St Pierre sous la rétribution de deux cent livres par année".

• 26 juillet 1764, Beaune : Le "tonnerre" tombe "sur ladite orgue". L'instrument est trop endommagé pour que l'organiste puisse continuer à le toucher. La fabrique cherchant à le faire réparer passe un accord avec l'Alsacien Jacob BRIGUER (alias Jacques BRICKER) qui promet de le raccommoder... à condition d'obtenir le poste d'organiste ensuite.

• 30 janvier 1765 : Jeanne CHAPUZOT somme les fabriciens de "luy remettre les clefs de l’orgue pour parachever le tems de sa convention en conséquence toucher lad. orgue" et le 8 février elle les fait assigner dans le même but, ou à défaut, de "luy payer les interests d’inexécution de sa convention", intérêts qu’elle estime "au prix entier de sa convention".
Les fabriciens consultent un homme de loi à Dijon, discutent, et reconnaissent que si l'affaire allait en justice, ils seraient forcément condamnés à payer en effet un dédommagement à la demoiselle Chapuzot puisque, sans attendre l'échéance du contrat qui les lie à elle, ils ont passé une convention avec le sieur Jacob BRIGUER "tant pour racomoder lad. orgue que pour en toucher". Ils se déclarent "unanimement d’avis de finir et terminer cette affaire amiablement". Aussi proposent-ils de payer à l'organiste "pour tout ce quelle pourroit prétendre" 100 livres par an, soit la moitié de sa rémunération initialement prévue, en deux termes annuels, "pendant les trois années qu’aurait encore du subsister sa convention".
L'organiste accepte cet accord, dont il est convenu qu'il cessera "en cas de deces de ladite demlle chapuzot avant l’expiration desdites trois années". Elle signe "Jeanne chappuzot".

• En juillet 1774, Nuits : Pour succéder à l'organiste Christine FRAILLERY qui vient de décéder, Melle CHAPUZOT, de Beaune, est proposée. Malgré l'absence de prénom, il s'agit très vraisemblablement de Jeanne.
Elle a eu en sa faveur "les témoignages les plus avantageux", répètent les échevins dans leurs échanges de courriers avec l'Intendant, sans jamais donner davantage de détails quant à ces témoignages. On apprend toutefois que "outre le talent de toucher de l'orgue, [elle] peut donner ses soins à l'instruction de la jeunesse du sexe" , c'est-à-dire aux filles de la paroisse. Elle demande 150 livres sans se charger de l'entretien de l'orgue ni du paiement du souffleur. Par 11 voix contre 3, les habitants, rassemblés à la demande de l'Intendant de Bourgogne, lui préfèrent le sieur de la BALEINE, de Dijon, pour "faire les fonctions d’organiste et de maître d’écriture moyennant 300 livres et au besoin encore celles de grammairien", donc sans doute plutôt pour les garçons.
• À compter du mois d'août 1774, Pierre-Joseph BALAINNE est organiste de Saint-Symphorien de Nuits.

• L'enquête reste à mener pour savoir ce que devint alors Jeanne CHAPUZOT. Elle avait déjà 73 ans.
Sa sœur Anne, "veuve de sieur Edme LAUXERROIS organiste de la Ste Chapelle du Roy", décède à Dijon, paroisse Saint-Jean, le 10 mars 1775.

Mise à jour : 24 décembre 2018

Sources
E. Bergeret, "La Musique à Nuits"…, 1906-1907 ; F-Ad21/ BMS Seurre en ligne ; F-Ad21/ C 1425 ; F-Ad21/ G 2822 ; J.Gardien, L'orgue et les organistes en Bourgogne…, 1943  ; É. Kocevar, "Les servitudes des organistes…", L'Orgue, 1999

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