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DOLLÉ, Pierre Louis Nicolas (1763-1851)
État civil
NOM : DOLLÉ     Prénom(s) : Pierre Louis Nicolas     Sexe : M
Autre(s) forme(s) du nom : DOLLÉ Pierre Louis Nicolas
DOLLET
DOLET
DOLLÉE
DOLLEY
DOLEY
Date(s) : 1763-6-18   / 1851-4-4 
Notes biographiques

Au soir de sa longue vie, Pierre Louis Nicolas DOLLÉ pouvait se targuer d'avoir vécu plusieurs expériences bien différentes. Formé à la musique comme enfant de chœur dans sa ville natale de Saint-Quentin, il commence une carrière classique de maître de musique, d'abord dans une modeste cathédrale, celle d'Avranches, puis à la métropole de Besançon. La Révolution vient interrompre brutalement cet itinéraire qui semblait tout tracé. DOLLÉ regagne sa Picardie natale, se marie, devient juge puis président du Tribunal de commerce de Vervins, ville où il exerce également des responsabilités municipales... avant d'être promu chevalier de la Légion d'honneur. Un profil de notable local.

• 18 juin 1763, Saint-Quentin [Aisne] : Pierre Louis-Nicolas DOLLÉ naît du mariage "du sieur Nicolas Dollé, marchand fabricant de toiles, et de Damoiselle Anne-Thérèse-Pierrette Legret". Ses parents s'étaient mariés le 13 septembre 1762, sur la même paroisse de Sainte-Pécinne. Pierre-Louis-Nicolas est donc leur premier enfant. Un autre fils, prénommé François-Louis, naît le 9 novembre 1764, toujours même paroisse (voir ci-dessous au 17 octobre 1824).
Pierre-Louis-Nicolas est baptisé le lendemain, avec pour parrain un "mulquinier" qui est vraisemblablement un oncle maternel, et la femme d'un maître maçon, sans doute une tante paternelle. Tous deux savent signer. Remarquons que son premier prénom ne sera pratiquement jamais utilisé par la suite, en dehors des actes les plus officiels.
Cette date et ce lieu de naissance correspondent bien aux indications livrées ultérieurement par sa supplique de 1790-1791 où il résume son itinéraire.

• 27 mai 1771, Saint-Quentin : Pierre Louis Nicolas DOLLÉ entre comme enfant de chœur à la collégiale royale Saint-Quentin en Picardie, à l'âge de 7 ans. Il affirmera dans sa requête de 1790 s'être "livré dès sa plus tendre jeunesse à l'étude de la musique et de la composition". Il aura comme maîtres de musique Louis JOLLIEZ (jusqu'à son départ en 1775) puis Bernard JUMENTIER.

• 5 juin 1778, Saint-Quentin : Le chapitre autorise DOLLÉ et GELLÉ, enfants de chœur, à aller à Noyon "recevoir la tonsure".

• 17 mai 1779, Saint-Quentin : À propos du travail de composition des enfants de chœur, le registre capitulaire dit que DOLLÉ "auroit [...] donné un motet de sa composition, mais auroit donné depuis quelques sujets de mécontentements, Messieurs pour le punir ont ordonné qu'il ne lui seroit seulement accordé la somme de 20 sols pour lui rembourser le papier", au lieu des trois livres habituelles.

• Avril 1782, Saint-Quentin : Louis-Nicolas DOLLÉ sort de la maîtrise. Le 10 mai 1782, il reçoit un certificat en latin du chapitre, attestant que pendant onze années il a servi l'église de Saint-Quentin avec droiture et diligence. La durée indiquée positionne sa réception plutôt en 1771. Il dit n'en être sorti "qu'à l'âge de 18 ans pour aller occuper la place de maître de musique à la cathédrale d'Avranches en Basse-Normandie". Il a en réalité presque 19 ans.
• Avril ou mai 1782, Avranches [Manche] : DOLLÉ devient maître de musique à la cathédrale d'Avranches.

• 16 juillet 1783, Besançon [Doubs] : Pour succéder à Jean-Baptiste-Luc TRABOUILLET, qui avait exercé durant vingt-quatre ans comme maître de musique de la cathédrale Saint-Jean de Besançon, le chapitre cathédral choisit le sieur DOLLÉ, clerc dans l'église d'Avranches. Il est invité à transmettre ses certificats de vie & mœurs et à dire quand il pourrait venir. Il expliquera en 1790-1791 que la place "de maitre de musique à la métropole de Besançon venant à vaquer, Mrs du chapitre le mandèrent pour l'occuper". Le chapitre confirme que c'est "sur notre invitation" que DOLLÉ est venu occuper cette place. Sans doute a-t-il été repéré par l'intermédiaire de François-Robert DORIOT, ancien maître à Besançon devenu maître de la Sainte Chapelle de Paris, qui connaît bien le vivier des jeunes maîtres disponibles sur le marché de l'emploi. Le Journal de la Franche-Comté confirme que c’est bien DORIOT qui a servi d’intermédiaire lorsqu’il écrit que DOLLÉ a "paru au Chapitre sous les auspices d’un maître célèbre que nous regrettons, & dont il fera sans doute oublier l’éloignement" (8 décembre 1783).
• 25 juillet 1783, Évreux [Eure] : Le chapitre de la cathédrale reçoit comme maitre de musique, le sieur DOLLÉ, toujours alors maître à Avranches, pour remplacer Marie Louis Urbain CORDONNIER. DOLLÉ ne s'y présente pas, et pour cause, ayant été reçu peu avant à Besançon. Dès la fin du mois de septembre, c'est Pierre Louis Augustin DESVIGNES qui occupe la place ébroïcienne.
• Fin juillet / début août 1783, Avranches : DOLLÉ quitte la cathédrale d'Avranches où il déclare être resté quinze mois. Le certificat (en latin) qui lui est délivré par le chapitre d'Avranches le 4 août 1783 parle, lui, d'un service d'environ quatorze mois.
• 2 août 1783, Besançon : Le chapitre invite DOLLÉ à venir à Besançon dès que possible.
• 17 septembre 1783, Besançon : Ce jour-là a lieu la réception officielle de "maître DOLLÉ, clerc, afin d’occuper le poste de maître [recteur] de cette église, aux émoluments de 100 livres par mois". De plus le chapitre ordonne que pour les frais de son voyage il lui soit remis la somme de 200 livres.
• 22 novembre 1783 : Une "fête brillante" est célébrée en l’honneur de Ste Cécile. Le Journal de la Franche-Comté juge que "le jeune homme intéressant que le Chapitre métropolitain a appelé depuis peu dans son sein pour diriger sa musique a annoncé dans ses essais les talens d’un maître consommé", au point que les mauvaises langues locales le soupçonnent de ne pas être l'auteur de la musique produite ce jour-là. Le journal souligne que "Tous les amateurs ont distingué unanimement le Laudate pueri Dominum ; le Qui propter & l’Ascendis Dominus, dont les brillans morceaux ont fait la plus vive sensation". Il mentionne la participation des musiciens locaux, HISPACH (cor), NOEL (flûte), BROEMER ("clairinette"), MICHAUX (violon), ainsi que "parmi les Artistes qui font honneur à notre patrie, les sieurs ARNOUX & AUBRI", sans doute Jean-Philippe ARNAUD et Louis-François AUBRY. S'est aussi distinguée "parmi les voix qui se sont fait entendre", "celle d’un jeune enfant de chœur, qui, monté sur des degrés pour parvenir aux cahiers de musique, a développé son organe enfantin avec une précision, une exactitude, une régularité qui a enchanté tout l’auditoire".

• 12 mai 1784, Besançon : Monsieur Louis-Nicolas DOLLÉ, "maître de musique de la métropole", est le parrain de Marie-Madeleine-Cécile, née la veille paroisse Saint-Maurice, fille de Pierre-Philippe MARGAULX, "musicien de la métropole".
• 18 août 1784 : Le chapitre autorise le maître des enfants de chœur à les conduire à l’église des religieuses de la Visitation "pour y chanter un motet à la bénédiction à la fin des vêpres des fêtes de Ste Jeanne-Françoise".
• 15 septembre 1784 : Le secrétaire capitulaire dit DOLLÉ "recteur des enfants de chœur" lorsqu'il enregistre le congé de huit jours que vient de lui accorder le chapitre. On remarque que, peu avant, le même secrétaire avait enregistré des congés de trois semaines accordés à THOUVEREZ, FLAMAND et LÉPINE : pour chacun d'eux, il justifiait cette permission d'absence par "les affaires de son commerce", suggérant une pluriactivité officiellement sue et reconnue. Il n'en va évidemment pas de même pour le maître.

• 17 octobre 1787 : Louis-Nicolas DOLLÉ, le maître de musique, obtient six jours de congé. Le même jour, LÉPINE, chantre, a lui aussi demandé un congé et il s'est vu accorder "trois semaines pour les affaires de son commerce". La présence du maître au quotidien est plus indispensable que celle du chantre, notamment car il faut surveiller les enfants de chœur.

1790, Besançon : Louis-Nicolas DOLLÉ est toujours maître de musique de la cathédrale Saint-Jean de Besançon.
Il y côtoie notamment les chantres Pierre-Philippe MARGAULX, Guillaume-Joseph ÉMERY, Claude THOUVEREZ et Jean-Baptiste LÉPINE, les musiciens Antoine FLAMAND et Jean-Baptiste ROBERT, le serpent-basson Didier HUMBLOT, le joueur de basse Joseph FISCHER, ainsi que l'organiste Jean-Baptiste JECKER.
DOLLÉ s'occupe de la formation des enfants de chœur et compose de la musique. Pour remplir ces deux fonctions, il touche 2 548 livres 10 sols; il doit avec cette somme nourrir les huit enfants de chœur à sa charge, si bien qu'il lui reste finalement moins de 1 500 ou 1 200 livres (sources contradictoires sur ce sujet). Il commande également de quoi vêtir et chausser les enfants de chœur. En plus de ce revenu, il dispose d'un logement, d'un jardin et de petits bénéfices. Les enfants de chœur identifiés en 1790 se nomment CLÉMENT, THELMIE, MARULLIER, VALDOSKY, GOUGET, BADASQUE, FOURNIER et PROPHETE.
• 16 août 1790, Besançon : Le sieur DOLLÉ, "maitre de musique de la métropole de Besançon", est le premier témoin cité de la sépulture du chanteur haute-contre Jean-Baptiste ROBERT, au cimetière de la paroisse Saint-Jean-Baptiste. Il signe "Dollé mtre de Musique".
• [1790-1791] : DOLLÉ fait une demande de pension au Comité ecclésiastique, dans laquelle il explique en détail en quoi consistait sa charge de maître. Il signe "Dollé clerc tonsuré et maître de Musique à la métropole de Besançon". Une requête des huit enfants de chœur est jointe.
• 3 janvier 1791 : Le marchand de drap a "fourny a Monsieur Doley Maitre de musique à la métropole, pour habits, gilets et culotes de huit enfans de cœur qui vont être envoyé chez leurs parents, en drap de Silésie fin vert bouteille bon teint". Les huit garçons seront licenciés vêtus de neuf, tous de la même couleur.
• 30 janvier 1791 : Le district de Besançon propose d'accorder à DOLLÉ une pension de 600 livres. Les enfants de chœur toucheront eux une gratification proportionnée à leur âge et à leur ancienneté au sein de la maîtrise. Les quatre plus anciens recevront 300 livres et les quatre plus jeunes 200 livres.
• 3 février 1791 : Le directoire du département accorde à DOLLÉ une pension de 500 livres. Selon le directoire départemental, le maître serait favorable aux changements en cours ("on l'entend faire hautement l'apologie de la nouvelle Constitution").

• 29 octobre 1792, Besançon : Le sieur Louis-Nicolas DOLLÉ reçoit une gratification de 1 500 livres comme maitre de musique de la métropole. C'est la dernière trace de lui à Besançon. Quelque temps auparavant, peut-être dès 1791, il est reparti vers sa Picardie natale.

• 2 septembre 1793, Vervins (Aisne) : Est célébré le mariage de Louis-Nicolas DOLLÉ, "demeurant en cette ville", avec Madeleine Alliot, veuve de défunt Nicolas-Louis Louette/Jouette, vivant négociant à Vervins. Aucun métier n'est donné pour le marié. On sait seulement qu'il est "fils majeur de défunt Nicolas Dollé, vivant demeurant à Saint-Quentin, et de défunte Thérèse-Perette Legret". Les mariés sont accompagnés de quatre "amis", deux négociants, un marchand orfèvre et un "cultivateur". L'acte de décès ultérieur de la mariée révèle qu'elle avait environ 42 ans au moment de son mariage, soit douze ans de plus que son mari.

• Brumaire III (octobre-novembre 1794), Vervins : Louis-Nicolas DOLLÉ devient juge au tribunal de commerce de Vervins, fonctions qu'il exerce jusqu'en floréal V (avril-mai 1797) puis qu'il retrouve en floréal X (avril-mai 1802) jusqu'en août 1806... avant d'y revenir encore en 1810-1813, puis 1814-1815.

• An VII (1798-1799) : Louis-Nicolas DOLLÉ exerce pour la première fois des responsabilités municipales en étant durant un an et un mois adjoint au maire de Vervins.

• 1816 : Après la chute de l'Empire, il revient à la Municipalité et est Premier adjoint pendant six mois, avant de devenir Maire pendant plus de six ans, jusqu'en 1822.

• 14 décembre 1821, Vervins : Un négociant de 36 ans et un capitaine retraité, chevalier de la légion d'honneur, et second adjoint de la ville de Vervins âgé de 52 ans, déclarent le décès de "Dame Marie-Madeleine-Grimonie Alliot, âgée de 70 ans, leur tante et amie native de Lesquielles, épouse de M Louis-Nicolas DOLLÉ, âgé de 58 ans, maire de la ville de Vervins", décès survenu le jour-même à dix heures du matin "en sa demeure au dit Vervins".
On remarque que le veuf ne se remariera pas ensuite et vivra finalement près de trente ans de veuvage. Une façon de renouer avec son célibat de clerc d'avant la Révolution ?

• 1824, Vervins : Louis-Nicolas DOLLÉ devient président du tribunal de commerce de Vervins, fonction qu'il exerce ensuite à plusieurs reprises, par mandats de deux ans. Lors de l'établissement de son dossier de Légion d'honneur, l'administration considère qu'il a servi 21 ans 2 mois "dans l'ordre judiciaire". On peut s'interroger sur l'activité exercée lors des interruptions nombreuses de ses fonctions judiciaires : pratique-t-il un négoce quelconque, ou bien vit-il de leçons de musique ?
• 17 octobre 1824, Vervins : Le sieur Louis-Nicolas DOLLÉ est dit "propriétaire" lorsqu'il assiste au mariage de son neveu Louis-Pierre DOLLÉ, professeur de musique, fils de son frère le sieur Louis-François DOLLÉ, lui aussi dit "propriétaire", et de dame Louise-Augustine Baudry. Le jeune homme, né à Angers, exerçait peu de temps auparavant à Orléans (où des bans ont été publiés). Cela ne fait que trois mois qu'il demeure à Vervins, "chez ses père et mère".

• 29 août 1825, 22 février 1827 puis 22 février 1836, Vervins : Louis-Nicolas DOLLÉ, ici dit "propriétaire", est l'un des deux témoins aux trois déclarations de naissance de trois enfants issus de son neveu Louis-Pierre, à chaque fois qualifié de "marchand". Il est manifestement resté lié avec son  neveu lui aussi anciennement musicien. Même s'ils ne gagnent plus leur vie en jouant ou en enseignant la musique, peut-être la pratiquent-ils encore ensemble...

• 1843, Vervins :  Louis-Nicolas DOLLÉ redevient maire par intérim pendant environ six mois.

• 30 mai 1849 : Pierre-Louis-Nicolas DOLLÉ est fait Chevalier de la Légion d’honneur. Son dossier fait état de 8 ans 3 mois de service dans l'administration municipale et de 21 ans 2 mois "dans l'ordre judiciaire".

• 4 avril 1851, Vervins : À onze heures du soir, Pierre-Louis-Nicolas DOLLÉ s'éteint "en sa demeure sise rue de Lille". Le petit-neveu par alliance et l'ami du défunt qui le lendemain effectuent la déclaration du décès précisent son âge ("87 ans neuf mois"), son lieu de naissance ("né à Saint-Quentin"), sa filiation, les prénoms et nom de feue son épouse et disent le défunt "propriétaire, chevalier de la légion d'honneur".

Mise à jour : 27 décembre 2021

Sources
Abbé Monnier, Histoire de la Maîtrise… 1929 ; Ad25/ L397 ; F-Ad02/ BMS Saint-Quentin, Ste-Pécine ; F-Ad02/ G820 ; F-Ad02/ NMD Vervins ; F-Ad02/G 818 ; F-Ad25/ G 228 ; F-Ad25/ G 229 ; F-Ad25/ L 755 ; F-Ad25/ L 759 ; F-Ad25/ L 760 ; F-Ad27/ G 1913 ; F-Am Besançon/ BMS Besançon, St-Jean-Baptiste ; F-Am Besançon/ BMS St-Maurice ; F-An/ DXIX/055/172/13-14 ; F-An/ DXIX/092/792/03,14-15 ; F-An/ LH/784/66 ; Journal de la Franche Comté

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