Login
Menu et informations
Lot

Musique et musiciens d’Église dans le département du LOT autour de 1790

Sommaire

Liste des musiciens du Lot

Url pérenne : http://philidor.cmbv.fr/musefrem/lot

Clément Marot, poète né à Cahors, chante en son temps les beautés naturelles – « de mille fruictz, de mainte fleur & plante » – de ces plateaux calcaires des Causses du Quercy, sillonnés par les vallées du Lot, du Célé ou encore de l’Aveyron. « Montagnes pierreuses rendans liqueurs fortes & savoureuses », plus favorables à la culture de la vigne qu’à l’art musical, peut-être. Loin de ces vers de l'Enfer où 

     Le fleuve Lot coule son eau peu claire,
     Qui maints rochers traverse & environne,
     Pour s’aller joindre au droict fil de Garonne.

Les voûtes de la cathédrale de Cahors, comme celles de la collégiale de Figeac, n’en n’ont pas moins fait résonner les voix et instruments de leurs chapelles de musique.

• • •

I - Le Quercy : un territoire rural faiblement peuplé

Le Lot de 1790 à 1808 (avant la création du Tarn-et-Garonne)

Le département du Lot et ses 6 districts (1790-1808), Archives départementales du Lot, Atlas historique du Quercy.

Le département du Lot est parcouru au nord par la Dordogne et au sud par le cours sinueux du Lot, grossi des eaux du Célé. Entre ces vallées s'étendent les plateaux du Causse, propices à l'élevage ovin, tandis que la vigne est cultivée depuis les temps anciens sur les contreforts du Lot.
Ce cadre naturel, l'actuel Parc naturel des Causses du Quercy, des grottes, des gouffres, un riche patrimoine architectural (site de Rocamadour) le développement d'activités liées à la gastronomie (vignoble, truffes, foie gras… ) qui font aujourd'hui du tourisme la première activité économique du département, donnent une vision toute différente de ce qu'était cette région durant l'Ancien Régime : un pays essentiellement rural avec une faible densité de population.

Le cœur du département est constitué de l’ancien diocèse de Cahors, dont il a intégré les 587 paroisses. Toutefois il englobe aussi à l’est une partie de l’ancien diocèse de Rodez, et à l’ouest une fraction de celui d’Agen. Lors de la formation des départements, en 1790, le Lot est divisé en six districts (Cahors, Figeac, Gourdon, Lauzerte, Montauban et Saint-Céré), remplacés par quatre arrondissements (Cahors, Figeac, Gourdon et Montauban) le 17 février 1800. Quelques années plus tard, en réponse aux doléances des habitants de Montauban (alors sous-préfecture), l’empereur Napoléon crée le 21 novembre 1808 le département du Tarn-et-Garonne, réduisant ainsi le département du Lot à trois arrondissements.

Les villes du Lot sont relativement peu peuplées : en 1793 la population de Cahors est estimée à environ 12 000 habitants. Pour la même année, celle de Figeac est la moitié de celle de Cahors, soit environ 6 000 habitants. Cette petite ville située sur la rive droite du Célé, voit en 1790 la naissance du futur égyptologue Jean-François Champollion. La commune du Vigan, située entre Gourdon et Rocamadour, compte en 1789 environ 1 700 habitants, tandis que Marcilhac-sur-Célé, non loin de Figeac et de Cahors, rassemble en 1793 une population de 814 personnes seulement.

La physionomie modeste du département du Lot au XVIIIe siècle explique le faible nombre de lieux où s'exerce une activité musicale.

II - Cahors

• • • Située dans un méandre du Lot, la ville de Cahors, chef-lieu du département, abrite l’unique cathédrale, placée sous le vocable de Saint-Étienne.

Reconstitution de Cahors vers 1650

Le quartier cathédral de Cahors, d’après Jean Calmon et René Prat, Les cadastres des XVIe et XVIIe siècles de la ville de Cahors. Archives départementales du Lot, fonds Prat. Plan complet sur le site de la Mairie de Cahors.

À la veille de la Révolution, son chapitre, aux revenus estimés à 60 000 livres, est constitué de quatorze chanoines dont quatre dignitaires ; l’évêque en est membre. Le bas chœur compte quatre hebdomadiers, quatorze semi-prébendés, treize chapelains, huit « officiers » et « un corps de musique », d’après La France ecclésiastique.

La cathédrale Saint-Étienne de Cahors

La cathédrale Saint-Étienne de Cahors. Photo Neurdein, publiée dans le Bulletin de la société d’études littéraires, scientifique et artistique du Lot, 1910, tome 35, p. 95.

Pour le milieu du XVIIe siècle sont connus les noms du maître de musique VALETTE, de l’organiste Pierre JARNAL, du serpentiste NÉGRIÉ, d’un chanteur TÉRION, de deux « entonneurs » Balthazar MAURY et Pierre ASTORG et de deux des enfants de chœur GRÉPON et Charles BERTIÉ. En 1750, c’est un dénommé SALOMON, venu de la cathédrale de Rodez qui dirige la chapelle de musique pour laquelle il compose, entre autres, un Magnificat qui a été conservé. Un inventaire de 1790 dresse les charges du chapitre et nous renseigne sur les douze musiciens et cantoraux de la chapelle, en particulier : Louis Joseph FIÉVÉ maître de musique, Jean LANGE sous-maître de musique (et musicien), Raymond SAUVAGE organiste, Jean ARMAND bassoniste, Carlo CAVALLETI haute-contre, violoniste et compositeur. La maîtrise dispense un enseignement à dix enfants de chœur. Ils sont logés au moins en 1791, sinon avant, dans une maison avec une cour et des dépendances correspondant aux actuelles maisons n° 7, 9 et 11 de la rue Saint-James. En 1790 des instruments de musique (une épinette, un violon, trois basses et un hautbois) se trouvent dans la chambre du maître de musique. Le 2 février 1791, après la dissolution du chapitre, la cathédrale conserve le statut d’église épiscopale, avec une nouvelle maîtrise qui sera en activité jusqu’à sa fermeture le 21 mars 1794.

'Magnificat' de Salomon (1750)

Magnificat, motet en simphonie et la basse continue, par Mr SALOMON, maître de musique de l’église de Caors, 1750. Bibliothèque Nationale de France, Manuscrit Lavergne. Cliché Françoise Talvard.

• • • En 1790, quinze communautés religieuses sont recensées à Cahors : les Augustins, les grands Carmes, les Carmes déchaussés, les Pères de la Merci (ou Mercédaires) les Dominicains, les Cordeliers, les Capucins, les Chartreux, les religieuses de saint Dominique, les Ursulines, les Clarisses, les chanoines réguliers de la congrégation de Chancelade, les Bénédictines de la Daurade et les chanoinesses régulières de Saint-Géry.
Seuls les chanoines réguliers de Chancelade entretiennent une petite activité musicale, limitée à la présence d’un organiste. L’existence d’un orgue, aujourd’hui disparu, est mentionnée dans un inventaire des biens du chapitre dressé en 1790. Cette maison religieuse est à l’origine un prieuré de douze religieux, lié au grand séminaire fondé en 1644 par Alain de Solminihac (1593-1659), qui fut évêque de Cahors de 1636 à 1659. L’église de cette communauté fondée en 1647 est la chapelle du séminaire, aujourd’hui l’église Saint-Barthélemy (dont le vocable au XIIIe siècle était Saint-Étienne-des-Soubirous). À la période qui nous intéresse, la maison est en déclin et ne compte plus que quatre religieux ; ses revenus en 1790 sont de 13 739 livres, avec une dette de 9 364 livres. Les religieux furent dispersés en 1792 et leur établissement servit d’abord de caserne, puis, de 1808 à 1817, de siège au grand séminaire. Deux noms d’organistes sont connus : Jean RODOLOSSE, en poste avant 1784, et son successeur Pierre COUDERC, que l’on retrouve plus tard parmi les musiciens de la paroisse épiscopale de Cahors.

III - Figeac

Figeac et la collégiale Saint-Sauveur

Figeac et la collégiale Saint-Sauveur. Photographie ancienne d'Eugène Trutat, ca. 1898. Bibliothèque de Toulouse, Fonds Trutat, TRU C 759.

• • • La collégiale Saint-Sauveur, ancienne riche abbaye d’hommes de l’ordre de Saint-Benoît, sécularisée au XVIe siècle par le pape Paul III, possède une maîtrise. Le chapitre collégial compte treize chanoines dont cinq dignitaires, quatre hebdomadiers, deux diacres, deux sous-diacres et huit prébendés. En septembre 1729 il avait été décidé d’établir dans la collégiale un second chœur (bas chœur) le premier chœur étant constitué des chanoines. Le projet prévoyait l’établissement de « 4 hebdomadiers, 2 diacres, 2 clercs, 1 bedeau, 4 enfants de chœur et un maître de bonne vie et mœurs et instruit du chant ». Une relation du 29 avril 1741, explique que les semi-prébendés, lors de la prise de possession de leur semi-prébende, passent une sorte d’examen devant le doyen et le chapitre. Les candidats sont interrogés et doivent chanter « le plein champ » de l’église. De rares noms de musiciens sont conservés pour la fin du XVIIe siècle et le XVIIIe siècle : Jean VILHÈS, maître de musique en 1668, Géraud MARMAUDET, musicien en 1703, et deux chantres François GUARY et François POUZOT.
Au moment de la suppression du chapitre en 1790 trois musiciens ont été retrouvés : Jean Pierre BASTIDE et Jean Martin RAYNAL tous deux qualifiés de maître de musique et Gérard MARTY, enfant de chœur. La documentation ne permet pas de savoir précisément si l'un des deux maîtres exerce ses fonctions dans un autre établissement de Figeac. Deux inventaires, l’un daté du 28 octobre 1790, l’autre du 11 juin 1793, mentionnent, outre de nombreux livres de chant et autres antiphonaires, des soufflets et tuyaux d’orgues conservés dans des armoires. Ces traces d’un instrument qui aurait disparu bien avant la Révolution expliquent peut-être pourquoi aucun organiste n’a été retrouvé dans les documents d’archives. La maison de la maîtrise est située au dessus de la chapelle Notre-Dame-de-Pitié.

IV - Le Vigan

La collégiale Notre-Dame de l'Assomption du Vigan compte quatre dignitaires, douze chanoines, deux hebdomadiers et trois prébendés et dispose d'un revenu de 36 000 livres. Un seul musicien, François FROMENT, a été trouvé à l’époque révolutionnaire, sans que sa qualification précise soit connue.

V - Marcilhac-sur-Célé

L'abbaye Saint-Pierre de Marcilhac-sur-Célé

L'abbaye Saint-Pierre de Marcilhac-sur-Célé. Photo du site Pays de Figeac.

L’abbaye bénédictine Saint-Pierre de Marcilhac-en-Quercy, sise dans la vallée du Célé, dispose d’un revenu moyen s’élevant à environ 10 000 livres en 1790. Les statuts de la communauté, datés du 23 avril 1747, mentionnent la présence de douze religieux, un chapelain, un musicien et trois enfants de chœur. En 1764 l’effectif du monastère est réduit, mais compte parmi les six officiers laïcs, un chapelain ecclésiastique (prêtre séculier) appelé « prêtre de Requiem », un « cantoral », un musicien et trois enfants de chœur. De cet effectif n’a été retrouvé en 1790 qu’un chantre Bernard CASTEL (peut-être est-ce le même qui est mentionné comme prieur dans les statuts de 1747 ?), sans que les documents ne permettent de déterminer s'il s'agit d'un musicien ou d'un chantre en dignité.

À la fin du XVIIIe siècle, certains établissements semblent curieusement dépourvus de chapelle de musique, comme par exemple la collégiale Notre-Dame de Rocamadour, où un orgue avait été construit au XVIIe siècle, ou bien l'abbaye Sainte-Marie de Souillac. À l'abbaye Notre-Dame de la Grâce-Dieu de Leyme, une annotation du 10 mai 1741 atteste une pratique musicale, certainement bien modeste : « Dame Charlotte de Mellon demande après son décès que l'on ajoute aux 10 religieuses du chœur du monastère de Leyme, 2 autres religieuses sachant le plain chant et la musique, si faire se peut, pour chanter, soutenir le chœur et enseigner cet art aux postulantes, novices & professes ». La pratique du plain-chant, somme toute commune à ce genre d'établissements, n'implique pas obligatoirement la présence, parmi les religieuses, de musiciens avec un statut de "professionnels".

• • •

Si le département du Lot avec son unique diocèse n’est pas une région musicalement riche, cette recherche révèle la présence à Cahors et à Figeac d’une maîtrise et de maîtres de musique capables de composer. Au moment de la Révolution une vingtaine de musiciens d’Église sont en activité dans le département du Lot, parfois recrutés à l’extérieur du département : tels Jean ARMAND formé à la maîtrise d’Angoulême, Joseph CAPELLE de Douai, Louis Joseph FIÉVÉ d’Auteuil, Joseph TESTAT d’Albi, Raymond SAUVAGE de Mende ou encore Carlo CAVALLETI, né à Rome. Les trois maîtrises de Cahors, Figeac et Marcilhac sont en capacité, durant le XVIIIe siècle, de former à la musique dix-sept enfants de chœur.

Françoise TALVARD,
CHEC, MSH Clermont-Ferrand (février 2015)
Le travail sur les musiciens de ce département a bénéficié des apports de, notamment : 
Bernard Dompnier, Sylvie Granger, Isabelle Langlois...

Mise en page et en ligne : Sylvie Lonchampt et Agnès Delalondre (CMBV)
Cartographie : Isabelle Langlois (CHEC, Université Clermont-Auvergne)

>>> Si vous disposez de documents ou d’informations permettant de compléter la connaissance des musiciens anciens de ce département, vous pouvez signaler tout élément intéressant ici.
Nous vous en remercions à l’avance.
L’amélioration permanente de cette base de données bénéficiera à tous.

Les lieux de musique en 1790 dans le Lot

Carte des lieux de musique du Lot en 1790

Les lieux de musique d'Église documentés en 1790 dans le département du Lot

Les lieux de musique documentés pour 1790 dans le département sont présentés par diocèses et par catégories d’établissements : cathédrale, collégiales, abbayes, monastères et couvents, autres établissements (par exemple d’enseignement, de charité… ) paroisses (ces dernières selon l’ordre alphabétique de la localité au sein de chaque diocèse).

Diocèse de Cahors

Pour en savoir plus : indications bibliographiques

  • François LESURE, Dictionnaire musical des villes de province, Paris, Klincksieck, 1999, 367 pages [sur Cahors : p. 119-120].
  • Abbé Edmond ALBE, « Quelques notes sur l’abbaye de Marcillac », Bulletin de la société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, 1901 (tome 26), p. 111-135.
  • Jean-Baptiste CHAMPEVAL de VYERS, Figeac et ses institutions religieuses, Cahors, Imprimerie L. Laytou, 1898, 224 pages.
  • Guy CHASSAGNARD, La franc-maçonnerie en Quercy : enquête dans le passé, Figeac, Segnat éditions, 2008, 320 pages.
  • Louis COMBARIEU, « Charges et revenues de la cathédrale et des communautés religieuses de Cahors en 1790 », Bulletin de la société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, 1876, (tome 3), p. 5-35.
  • A. COMBES, « Analyse des registres municipaux de la commune de Cahors tenus pendant la Révolution », Bulletin de la société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, 1905 (tome 30), p. 5-25, 386-403, 465-475 ; 1906 (tome 31), p. 5-20, 65-80, 127-142 ; 1907 (tome 32), p. 5-20, 65-80, 123-143, 188-203 ; 1908 (tome 33) p. 3-19, 65-80, 129-144, 185-200 ; 1909 (tome 34) p. 5-82 ; 1910 (tome 35) p. 5-20, 61-75, 131-138, 181-196 ; 1911 (tome 36) p. 125-140, 181-196, 245-260 ; 1912 (tome 37) p. 5-23, 73-88, 145-160, 213-228 ; 1913 (tome 38) p. 35-40, 81-96, 166-172, 191-204, 235-257 ; 1914 (tome 39) p. 5-139.
  • Joseph DAYMARD, « Le vieux Cahors », Bulletin de la société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, 1906, (tome 31), p. 187-202, 1907, (tome 32), p. 81-95.
  • Jean-François DEBONS, Annales ecclésiastiques et politiques de la ville de Figeac en Querci, diocèse de Cahors, Toulouse, Augustin Manavit, 1829, 533 pages.
  • Paul de FONTENILLES, « Inventaire du Chapitre Cathédral dressé en 1790 », Bulletin de la société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, 1896, (tome 21) p. 10-20 et 81-93.
  • Justin GARY, Notice sur le clergé de Cahors pendant la Révolution, publiée par M. l'abbé Justin Gary, Cahors, Delsaud, 1897, 339 pages.
  • Aimé GUILLON, Les martyrs de la foi pendant la Révolution française ou martyrologie des pontifes, religieux, religieuses, laïcs de l’un ou l’autre sexe qui périrent alors pour la foi, Paris, chez Germain Mathiot libraire, 1821, second volume, 602 pages.

Bibliographie élaborée par Françoise Talvard
(février 2015)

<<<< retour <<<<