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Musique et musiciens d'Église dans le département de la CÔTE-D'OR autour de 1790
Le 9 février 1790, après d'âpres discussions au sein des députés de la Bourgogne en raison des intérêts concurrents de Dijon, Autun, Mâcon et Chalon, est paraphé le procès-verbal de délimitation de ce nouveau département « de forme elliptique dont le plus grand diamètre du nord au midi était de 22 lieues ». Dijon en devient – sans difficulté – le chef lieu. Le baptiser fut plus difficile, aucune des propositions forgées à partir des usages hydronymiques en vigueur n’ayant convenu (Seine-et-Saône, Haute-Seine…). C’est l’avocat André-Rémi Arnoult qui entre dans l’histoire en inventant – dit-on – « Côte-d’Or », assimilant le produit du vignoble de la Côte de Bourgogne, l'escarpement séparant l'ouest montagneux de la plaine de la Saône, au métal le plus précieux.
Villes, vignes, églises et orgues : visages diversifiés de la Bourgogne
La nouvelle Côte-d’Or compte officiellement 427 000 habitants, en réalité sans doute 50 000 de moins selon Pierre Palau (Histoire du département de la Côte-d’Or, 1978). Elle constitue une fraction de l’ancienne province de Bourgogne (laquelle s’étendait aussi sur ce qui devient en 1790 l’Yonne, la Nièvre, la Saône-et-Loire). Cette Bourgogne à la veille de la Révolution a été amplement – quoique incomplètement – documentée par les sept volumes publiés par l’abbé Courtépée entre 1775 et 1781.
• • • Une solide armature urbaine
Sans reliefs puissamment marqués, le nouveau département n’est pas pour autant uniforme. Les nuances entre les petites régions qui le composent se traduisent notamment par des contrastes dans la densité de peuplement. Au sud et à l’est, les vallées, les grands axes de circulation et la vigne dessinent des pays très peuplés (plaine dijonnaise, val de Saône, Beaunois). Ceux-ci se distinguent des zones septentrionale (Châtillonnais) et occidentale (Morvan, Auxois) qui le sont beaucoup moins.
La hiérarchie urbaine bourguignonne de la fin du XVIIIe siècle, longuement auscultée par Christine Lamarre, fait apparaître au sommet une ville capitale, Dijon, avec près de 23 000 habitants. Elle est suivie, à l’échelle de la province entière, de cinq villes moyennes de 8 à 10 000 habitants, dont une seule, Beaune, se trouve en Côte-d’Or. Une série de localités plus modestes forme une solide armature urbaine à travers le territoire. On peut en leur sein distinguer un groupe de quatre petites villes de poids démographique comparable, entre 3 500 et 4 500 habitants : Semur-en-Auxois, Châtillon-sur-Seine, Saulieu, Auxonne. Les autres petites villes comptent entre 2 et 3 000 habitants.
La structure administrative d’Ancien Régime juxtaposait plusieurs niveaux de pouvoir. Les États et le Parlement se proclamaient les représentants et les défenseurs naturels des habitants. Ayant survécu au rattachement du duché au domaine royal en 1477, les États de Bourgogne se réunissaient tous les trois ans à Dijon – sous la présidence de l’évêque d’Autun. Face à eux, le Gouverneur – issu depuis 1631 de la famille des Condé – et l’Intendant représentaient le pouvoir royal. L’autorité réelle du premier ne cessait de décliner, tandis que le second était, au nom du Roi, le véritable maître de la région et le « tuteur vigilant des villes » (Chr. Lamarre). On le voit même veiller au choix des organistes lorsque ceux-ci sont payés par les municipalités !
• • • Artisans, commerçants et vignerons
La plupart des villes ont une activité artisanale diversifiée, parfois avec une spécialisation – comme à Châtillon où dominent les métiers de la métallurgie (forges et hauts fourneaux), ou à Nuits où la coutellerie et la fabrication des armes, quoique en déclin, subsistent. Le travail du textile est répandu partout : drapiers, droguetiers, mousseliniers, « sergiers », « tixiers de toille »…, aperçus en nombre dans l’entourage des musiciens.
Les activités que l’on appellerait aujourd’hui ‘tertiaires’ sont présentes en proportion plus ou moins forte. Auxonne, longtemps ville frontière entre duché et comté de Bourgogne, reste une place militaire importante, où un jeune officier nommé Buonaparte effectua deux séjours (1788-1789 et 1791). La présence de l’école d’artillerie et d’un régiment à demeure marque profondément sa physionomie. Soldats, officiers et ingénieurs y forment, écrit Chr. Lamarre, « une société assez nombreuse pour peser statistiquement sur les activités urbaines ».
Mais Auxonne est également un important port fluvial, ce qui multiplie les « marchands » de tous types, comme à Pontailler en amont, à Saint-Jean-de-Losne et à Seurre en aval. La Saône et ses affluents navigables (le Doubs et la Seille) sont utilisés pour le commerce de Lyon vers la Suisse, la Franche-Comté, l’Alsace. À l’inverse, vers Lyon et au-delà vers la France du Midi, la Bourgogne envoie du vin, des grains, du bois…
Le transport par voie terrestre est actif aussi à Châtillon, Saulieu, Arnay-le-Duc, ou encore à Nuits dont le vignoble réputé a suscité un négoce important. Concurrente de la route Paris-Lyon par le Bourbonnais, la principale route est celle qui, d’Auxerre va à Chalon puis à Lyon. Au point que Courtépée écrivit à Expilly : « Saulieu est une des villes les plus commerçantes de l’intérieur de la France ». Si ce jugement est évidemment exagéré, on perçoit bien à travers registres paroissiaux et rôles fiscaux l’activité commerciale (marchands, voituriers) et surtout le rôle d’étape (aubergistes, charrons, maréchaux) de Saulieu.
Les travailleurs de la terre, et notamment les vignerons, sont nombreux en raison des exigences de la vigne en main d’œuvre. Des groupes statistiquement importants de vignerons se remarquent en particulier à Semur-en-Auxois et à Nuits. Activité induite de la production et du commerce viticoles, la tonnellerie est une activité majeure à Saulieu et à Nuits. Tous ces groupes sociaux s’entrevoient aussi dans les parentèles des musiciens.
• • • Cinq diocèses mais une seule cathédrale
Dans la géographie ecclésiastique d’Ancien Régime, le territoire de la future Côte-d'Or comptait près de 700 paroisses réparties entre les cinq diocèses de Langres, Dijon, Autun, Chalon-sur-Saône et Besançon. Il ne comportait cependant qu’une seule cathédrale, Saint-Étienne de Dijon, cathédrale d’un petit diocèse récent, créé en 1731. On y recense dix collégiales et une centaine d'abbayes, prieurés et couvents – 66 d’hommes, 35 de femmes. On note l’existence de vingt méparts ou familiarités, sociétés de prêtres-chapelains associés dans la gestion des fondations. L’abbé Pierre Collon (1755-1832), historien de la petite ville de Vitteaux, voit dans son mépart « l’ornement de la ville de Vitteaux, un avantage honorable pour les enfants de ses habitants, un soulagement pour les curés de l’église Saint-Germain, et en même temps la décoration de cette même église par la célébration des offices divins qui s’y faisaient avec plus de dignité… (Mémoires historiques sur la ville de Vitteaux…, t. 1, p. 470).
Principalement citadins, les méparts sont peuplés des fils de la bourgeoisie urbaine. Ils participent à l’éclat des fêtes religieuses paroissiales et ils chantent le plain-chant lors des offices – ce qui réduit d’autant la part des chantres laïcs.
Les villes bourguignonnes entretiennent entre elles d’intenses liens économiques et commerciaux. Il en va de même sur le plan des déplacements des musiciens, qui vont et viennent d’un diocèse à l’autre. Ainsi, en 1753, ce bel exemple de chassé-croisé entre Beaune (diocèse d’Autun) et Dijon : le 17 avril, le gagiste FLUTTE, joueur de serpent à Notre-Dame de Beaune, réclame son compte « attendu qu’il est reçu à Dijon et qu’il veut partir au plus tôt » ; le 21 avril, le chapitre beaunois prend lecture d’une missive du maître de la Sainte-Chapelle de Dijon (Pierre Louis POLLIO) présentant la candidature de MAGNY « qui sçait jouer du serpent ». Les limites diocésaines ne sont en rien des frontières.
• • • Les orgues émergent de l’ensemble des musiques d’Église
Les listes établies par l’administration en 1790-1791 et envoyées au Comité ecclésiastique à Paris (An/ D XIX) ont permis une première pesée des effectifs musicaux ‘côte-d’oriens’. Des explorations obstinées aux archives départementales de la Côte-d’Or ont apporté de nombreux compléments mais sans faire surgir – à l’exception de quelques-unes – les précieuses requêtes individuelles généralement si riches en précisions biographiques. Les connaissances sur les deux principales églises dijonnaises, la cathédrale Saint-Étienne et la Sainte Chapelle, souffrent de la perte de leurs registres capitulaires (partiellement compensée par la conservation des pièces comptables et, pour la cathédrale, par celle des archives de la paroisse Saint-Médard desservie au sein du même édifice). Il faut saluer en revanche la splendide série des registres de la collégiale Notre-Dame de Beaune, le grand intérêt de ceux de la collégiale Saint-Andoche de Saulieu ainsi que la richesse des délibérations et comptes de Saint-Jean et de Notre-Dame de Dijon.
Au sein des musiciens d’Église, la catégorie des organistes bénéficie d’un éclairage plus vif car elle occupe une place importante dans l’historiographie musicale bourguignonne. La première pierre en est le manuscrit – plus souvent recopié que cité – de Joseph Dietsch, ancien facteur d’orgues. Conservé à la BM de Dijon, ce document est dédié « à la mémoire vénérée de mon cher et illustre ami Félix Danjou… ». Sous le titre « Dijon. Les orgues, les organiers. 1424-1887 », il regroupe des informations précieuses, même si elles nécessitent d’être autant que possible vérifiées. Doivent ensuite être cités plusieurs spécialistes successifs passionnés d’orgues, dont on trouvera les titres indiqués en bibliographie : Jacques Gardien au milieu du XXe siècle, Jean-Marc Baffert (décédé en 2017), Pierre Marie Guéritey et Erik Kocevar actuellement.
« Sur le territoire qui deviendra le département de la Côte-d'Or, on dénombre alors une quarantaine d'orgues, dont la moitié environ à Dijon » écrit P. M. Guéritey. Faisant le point à la veille de la Révolution, il ajoute : « Plusieurs ont été construits ou rénovés récemment et presque tous fonctionnent correctement. »
Parmi les grands noms de la facture d’orgue en Bourgogne, il faut évidemment citer les frères RIEPP, Rupert (1711-1749) et Karl-Joseph (1710-1775). Après 1755, bien qu’il demeure toujours à Dijon et achète des vignes dans la côte de Nuits, Karl-Joseph Riepp travaille moins en Bourgogne selon P. M. Guéritey, son activité s’exerce davantage en Franche-Comté et dans son pays natal, l’Allemagne du sud. À la mort de Riepp, l’entretien de ses orgues est repris par son neveu Joseph RABINY (1732-1813) et par Louis WEBER ancien compagnon de Riepp, en concurrence avec Bénigne BOILLOT (1725-1795) puis avec le Troyen Jean RICHARD (1732-1815) et François CALLINET (1754-1820) à la fin des années 1780.
La cathédrale, plusieurs collégiales, certaines abbatiales et les principales églises paroissiales urbaines possèdent des orgues. On y reviendra ci-après, en examinant successivement ces diverses catégories d’églises. Chr. Lamarre souligne l’implication des villes dans le financement des orgues paroissiaux. À la toute fin de l’Ancien Régime, elle relève sur l’ensemble de la Bourgogne 11 villes où le budget municipal comporte une ligne dédiée à l’entretien de l’orgue et au salaire de l’organiste, dont 8 dans la future Côte-d’Or : Auxonne, Châtillon-sur-Seine, Flavigny, Nuits, Saint-Jean-de-Losne, Semur-en-Auxois, Seurre et Vitteaux. Une 9ème ville avait été dans ce cas, Arnay-le-Duc, mais elle avait perdu ses orgues au milieu du XVIIIe siècle, à l’occasion de travaux sur le clocher.
La sollicitude des échevins envers les orgues et ceux qui les touchent transparaît à travers de nombreux documents. Ainsi les officiers municipaux de Châtillon écrivent-ils à l’Intendant en 1775 que Jean MIELLE, dont ils veulent tripler le salaire (jusque là très faible : 50 livres / an), est « fort bon organiste et très habile musicien ». En ne le payant pas mieux, ils risquent de le perdre car « on lui a offert en d’autres petites villes un sort beaucoup plus avantageux qu’il ne l’a à Châtillon ». Les avantages découlant de la présence d’un organiste sont clairement exprimés par les édiles : « Indépendamment des enfants de la ville qu’il a pour écoliers, beaucoup d’étrangers envoyent les jeunes filles en pension pour être à portée de prendre des leçons du sieur Mielle. »
Ainsi, selon la formule de Chr. Lamarre, l’organiste – dans certains cas – est plus qu’un musicien au service de Dieu, il est aussi un musicien au service des enfants de notables.
Dijon : « l’Athènes de la Bourgogne »
L’abbé Expilly rédige ainsi sa description de Dijon : « Ville ancienne, grande, belle et riche, très peuplée et l’une des plus considérables du royaume. Capitale de la Bourgogne. » Ce jugement laudatif est repris sur tous les tons par les contemporains : « On peut regarder Dijon comme l’Athènes de la Bourgogne » affirme l’Almanach de Bourgogne (1769) ; c’est une ville « grande et belle », renchérit l’Almanach general du commerce (1778), « dont les avenues sont riantes et commodes », précise Jean-Aymar Piganiol de La Force (Nouveau voyage de France, 1740)…
• • • Une belle capitale de province
Toutes les vues de Dijon dessinées au cours du XVIIIe siècle montrent une forte densité bâtie et notamment un hérissement de clochers. Un recensement fait en 1759 par le collecteur des tailles pour imposer le don gratuit par tête – donc sérieusement mené – comptait 21 254 habitants. Un dénombrement effectué par la Municipalité en 1784 en compte 22 786. L’intervalle de vingt-cinq ans qui les sépare donne de la cohérence à ces deux chiffres. Le grand mérite du dénombrement de 1784 est d’indiquer la répartition sociale de cette population dijonnaise, finement distribuée par l’administration en 24 sous-catégories. On y remarque d’emblée le poids de la vigne puisque plus de 4 000 personnes sont classées « vignerons pour autrui ». En leur ajoutant les vignerons propriétaires et les jardiniers, on arrive à 21 % de la population dijonnaise vivant de la terre. Par ailleurs on note l’importance du clergé (948 personnes, 4,1 %), les abbés de Fontenay et de Saint-Bénigne, les doyens des chapitres de la Sainte-Chapelle et de la cathédrale Saint-Étienne en étant les dignitaires principaux.
Mais « ce sont les serviteurs de l’État et les parlementaires qui donnent le ton à la cité et la font vivre » écrit Joëlle Doussot. Siège des États de Bourgogne, Dijon est une des huit villes parlementaires de l’Ancien Régime. La vie musicale de la cité est régulièrement ponctuée par les sessions triennales des États, qui durent environ vingt jours et sont entourées d’un faste particulier. Elles sont ouvertes par une messe du Saint-Esprit en grande pompe à la Sainte-Chapelle, attenante au Palais des États. Au cœur du Palais, la chapelle des Élus (parfois appelée chapelle des Condé) construite en style rocaille à la fin des années 1730 par l’architecte Gabriel, présente un somptueux décor sculpté, dû à l'artiste dijonnais Claude Saint-Pierre, où affleure la thématique musicale.
Ces institutions et les élites qui leur sont liées ont modelé l’espace urbain. La principale opération d’urbanisme est à partir de 1680 la construction du Palais des États qui intègre divers éléments composites de l’ancien palais des ducs de Bourgogne. L’ensemble est solennisé par l’aménagement de la Place royale, en hémicycle devant le Palais, dominée par la statue équestre de Louis XIV.
Les hôtels particuliers sont nombreux, et leur construction ou leur embellissement se poursuit en cette seconde moitié du XVIIIe siècle. J. Doussot cite l’hôtel Chartraire de Montigny, rue Vannerie, « où se déroulèrent les fêtes les plus grandioses du Dijon des Lumières ». Cependant au cours du XVIIIe siècle ce patriciat parlementaire perd peu à peu son monopole culturel, que lui dispute âprement la bourgeoisie dijonnaise, en particulier le monde des avocats et officiers de justice, très nombreux (1 030 personnes sont classées en 1784 parmi les « officiers roturiers »).
• • • La sociabilité des élites dijonnaises
Salons et sociétés diverses réunissent des cercles étroits liés par « un intérêt commun pour l’humanisme, la musique, la comédie, ou simplement les joies de la conversation » écrit Daniel Ligou (Histoire de la Bourgogne, J. Richard (dir.), p. 300). L’Académie de Dijon est entrée dans l’histoire en couronnant Jean-Jacques Rousseau en 1750 pour son discours polémique autour de la question de savoir « si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les mœurs ». La Franc-Maçonnerie dijonnaise est nuancée en plusieurs courants (dont certains, plus ouverts, atteignent les maîtres artisans).
Très ancienne, une autre forme de sociabilité subsiste en 1789 : les sociétés para-militaires et ‘sportives’, de l’Arquebuse, de l’Arbalète et de l’Arc. Elles jouent un rôle de premier plan dans les cérémonies publiques mais sont en décadence à la toute fin de l’Ancien Régime, les notables ayant cessé de s’y intéresser. Certains musiciens en font partie, comme François MIELLE qui, en 1778, dirige la musique d’une messe offerte par la Compagnie de l’Arquebuse : Les Affiches le disent « l’un des Chevaliers de cette Compagnie & son Maître de Musique ». C’est le cas également – à titre honorifique – de Claude BALBASTRE en 1775, alors installé à Paris mais venu en visite dans sa ville natale :
Le 3 septembre [1775], les chevaliers de l’arquebuse firent chanter une grand’messe aux Jacobins ; elle fut suivie d’un Te Deum pour le sacre du Roy. M. Balbâtre, fameux organiste de Notre-Dame de Paris, toucha de l’orgue et attira un grand nombre d’auditeurs. Le soir, il fut reçu chevalier de l’arquebuse et ces messieurs luy firent bien des honneurs. Il a été fort fêté pendant son séjour à Dijon, sa patrie… (« Mercure dijonnois… », voir bibliographie, ici p. 276.)
Tout cela concourt à faire de Dijon une ville active sur le plan culturel et intellectuel (théâtre, bibliothèques, Affiches hebdomadaires…). Sur la base des travaux de Thierry Favier au sujet des concerts publics dijonnais, on peut retenir que Le Mercure galant de 1680 signalait déjà un concert donné une fois par semaine chez un notable. Par la suite, trois sociétés de concert à abonnement, fragiles et à courte durée de vie, se sont succédé à Dijon entre 1725 et 1761, la première prenant le nom d’Académie de musique dès 1728 (elle disparaît en 1734). Les concerts privés sont par ailleurs nombreux et admis par l’institution ecclésiastique : les contrats de chaque maître successivement engagé à la Sainte-Chapelle prévoient qu’il lui « sera loisible de faire une fois la semaine seulement un concert de musique en ladite maîtrise et d’y inviter telle personne que bon lui semblera, soit pour entendre le concert soit pour l’exécuter ». Comme dans toutes les villes, ces concerts, publics et privés, regroupent amateurs et professionnels, au premier rang desquels les musiciens des églises.
Ces derniers sont également actifs au collège. Après le départ des jésuites en 1762, c’est la Ville qui prend possession du collège des Godrans et nomme un conseil pour l’administrer. Si la danse semble s’effacer (plus de ballets lors des distributions de prix), la musique en revanche reste bien présente, quoique l’orgue ait disparu en 1769. Les reçus comptables conservés à partir de 1761 attestent que Jean CÉRÈS, basson de la Sainte-Chapelle, coordonnait les musiciens recrutés pour la fête annuelle, pour le compte desquels il recevait 108 livres – puis 132 livres à partir de 1773 lorsque le temps de répétition fut pris en compte. Le dernier reçu signé de sa main, le 14 août 1782, fait même état de deux répétitions et de ce fait la somme reçue monte à 168 livres « pour douze musiciens emploïés ». Après le décès de CERÈS en 1783, c’est François DELAURIÈRE, lui aussi joueur de serpent et de basson à la Sainte-Chapelle, qui prend le relais. Le 20 août 1785 il reçoit 200 livres, « prix convenu pour la Musique qu’il a bien voulu procurer au Collège », et Bailly le principal précise qu’on a ajouté 32 livres cette année-là « afin d’avoir une meilleure musique ». On a là une belle illustration de la place occupée par les musiciens des églises dans les célébrations profanes et un ordre de grandeur des revenus complémentaires que cela pouvait leur procurer.
Les pièces comptables du collège donnent un raccourci saisissant des changements intervenus dans l’esthétique musicale avec les débuts de la Révolution : pour la distribution des prix de 1791, il n’est plus question de « symphonie », mais de tambours battant la caisse, de trompettes et de timbales…
Les deux principales églises dijonnaises
La ville de Dijon est le principal centre de musique d’Église du futur département : avec un peu plus de 60 musiciens actifs en 1790, les Dijonnais représentent la moitié des effectifs recensés en 1790 sur l’ensemble de la Côte-d’Or. Beaune, deuxième centre musical, en totalise 28. Dijon comporte plusieurs églises dotées de musique ou a minima d’orgues. Aux premiers rangs se trouvent la cathédrale et la Sainte-Chapelle.
• • • Saint-Étienne, cathédrale de 1731 à 1792
Lorsqu’en 1731 est créé le diocèse de Dijon, taillé dans le tiers sud de celui de Langres, c’est l’église alors collégiale de Saint-Étienne qui est choisie pour cathédrale. À la veille de la Révolution, le chapitre de Dijon compte, selon La France ecclésiastique, six dignités et douze chanoines, l’un de ces douze canonicats étant à la nomination du Roi. La même source indique que le bas chœur comporte deux sous-chantres, six chapelains, un sacristain et « un corps de musique » sans plus de détails.
L’enquête Muséfrem est parvenue à éclairer assez solidement ce « corps de musique ». En 1790, sous la direction du maître de musique François COUET, on entend au chœur de Saint-Étienne six enfants de chœur, quatre basse-contre (André BAILLY, Jean-Baptiste BRICARD, UTINET, Henri VERPAULT), une basse-taille (Joseph BORGET), une haute-taille (Sébastien MALLOGÉ), une haute-contre (Dominique MANDRAY), deux serpents (Jacques LEFRANC et Claude MAGNY), un basson (Louis-François SAGOT), et bien sûr l'organiste, François LECLERC, issu d’une famille où six organistes au moins, hommes et femmes, ont été repérés sur trois générations. Un joueur de basse ou de violoncelle, Nicolas-Joseph ARNAULD, n’exerce qu’à temps partiel (les dimanches et fêtes) et est surtout imprimeur. Il est néanmoins considéré comme appartenant à la musique de la cathédrale et fera à ce titre toutes les démarches pour obtenir une indemnisation en 1790-1792, allant jusqu’à faire établir en 1814, afin d’obtenir la prorogation de sa pension, un certificat de notoriété assurant qu’au moment de la suppression du chapitre il « n’avait pas d’autre état que celui de musicien attaché à la Cathédrale de Dijon ». Avec cette douzaine d’hommes, la cathédrale de Dijon offre des effectifs similaires à ceux des cathédrales voisines comme celles d’Auxerre ou de Nevers.
Les musiciens sont payés au mois, sauf l’organiste et le bassiste qui sont payés par trimestre. François COUET, le maître de 1790, avait déjà occupé ce poste de 1772 à 1775. S’étaient ensuite succédé Jean-Baptiste CEZARD et Jean-François LESUEUR, avant que COUET ne renoue avec le chœur de Saint-Étienne à l’automne 1782.
• • • La Sainte-Chapelle du Roy, première église dijonnaise
Avec 17 chanoines et cinq dignités – selon la France ecclésiastique – un bas chœur de deux sous-chantres, six chapelains, un sacristain et « un corps de musique », la Sainte-Chapelle est de loin la plus puissante des églises dijonnaises. « Elle jouit des mêmes honneurs & privilèges que celle de Paris » affirme la même publication. Nombre de documents retrouvés appellent les chanoines « Messieurs les Vénérables de la Ste-Chapelle du Roy », et à l’occasion rappellent que la Sainte-Chapelle est « immédiatement soumise au Saint-Siège » (Ad21/ G 1146). Au départ chapelle particulière des ducs de Bourgogne, elle occupait l’aile orientale du palais. Elle a été détruite en 1802-1804.
En l’absence de registres capitulaires conservés, distinguer le personnel musical s’est avéré ardu. Les comptes de 1790 regroupent « messieurs les Prêtres, Chapelains et Chantres du second chœur » en une seule rubrique. Des feuilles de comptes mensuelles très bien tenues détaillent les rémunérations, mais sans préciser les emplois. En les recoupant avec les tableaux envoyés au Comité ecclésiastique, avec les rôles fiscaux de 1790 et avec les registres paroissiaux, le corps de musique a fini par se dessiner avec une relative netteté.
« Les officiers laïcs attachés au service de la Chapelle du Roi sous le titre de musiciens » étaient au nombre de douze constate en février 1791 le Directoire du district de Dijon, qui précise : « entre douze ils ne se partageoient qu’une somme de 7 550 livres » alors que leurs fonctions « exigeoient une éducation distinguée et des talens ». Ce chiffre de douze correspond à ce que les sources de 1790 ont livré – en mettant à part les gagistes extérieurs et le maître de musique, François COLIN, rémunéré sur une autre bourse et seul clerc de ce corps de musique.
Comme lui, ses prédécesseurs étaient en général clercs, voire prêtres. Parmi ceux dont on a retrouvé trace, plusieurs ont atteint une réelle célébrité tel Joseph MICHEL (surnommé « le Lalande dijonnais ») qui y exerça de 1709 à sa mort en 1736 – et qu’il convient de ne pas confondre avec Simon MICHEL, reçu, lui, en juillet 1771. Citons aussi François-Robert DORIOT (de 1736 ou 38 à 1744), Henri BREUVART (1745-1751), Pierre Louis POLLIO (1751-1762), Jean-Claude Augustin GUIGNET (1762 ?-1771).
À ses maîtres, le chapitre demande une production musicale soutenue dont la quantité est fixée dans chacun des contrats conservés. Celui du sieur de REY (Claude DEREY) en 1691 prévoyait 27 pièces par an, « messes, motets, hymnes ou pseaulmes ». Celui de Simon MICHEL en juillet 1771 n’en exige plus que huit :
… sçavoir une messe pour les fêtes Décanales [fêtes où le doyen officie en personne], une autre messe pour les jours ordinaires, les six autres pièces seront hymnes, pseaumes, cantiques ou motets, dont trois desdites pièces seront plus travaillées pour les fêtes solennelles, suivant que le dit sieur MICHEL les jugera nécessaires et convenables…
B. Dompnier souligne que le chapitre est attaché à ces musiques écrites pour ses cérémonies et a la volonté de se constituer un patrimoine musical propre, tous les maîtres devant céder les pièces qu’ils composent à leur employeur. Certaines parfois surprennent le public provincial et les autorités ecclésiastiques par leurs innovations stylistiques, comme le montre l’épisode dit de la messe en ariettes (décembre 1772) étudié par Th. Favier – le maître étant alors un mystérieux FORQUET. Après lui, arrivent Laurent DUPUY (en août 1780) puis Claude-Edme-Emmanuel LENOIR, qui meurt précocement, en septembre 1785. C’est à lui que succède François COLIN, le maître de 1790.
En 1790, chantent à la Sainte-Chapelle huit enfants de chœur, une haute-contre récitante (Nicolas BORNE), une haute-taille récitante (Pierre JARLOT), deux basse-taille (André CAILLOT et le sieur REGNAULT), une basse-contre récitante (Antoine BERTHOT) et trois basse-contre (Jean FAIVRE, Pierre-Alexandre FEUVRIER, François PARISOT). Deux musiciens jouent du serpent et du basson, Jean-Baptiste MILLOT et François DELAURIÈRE, ce dernier donnant des leçons d’instruments aux enfants de chœur. L'organiste est Pierre-Philibert LAUSSEROIS, fils du précédent organiste de la Sainte-Chapelle, Edme LAUSSEROIS – lequel avait été auparavant organiste de Notre-Dame de Beaune – et de son épouse Anne CHAPUZOT – laquelle avait été organiste à Saint-Pierre de Beaune avant de l’être à Saint-Pierre de Dijon et à Notre-Dame. On trouve aussi mention d’un « musicien » – sans précision de poste –, le sieur SIRJEAN, moins bien documenté que les précédents, dont les biographies ont finalement pu être assez finement reconstituées. Longtemps musicien en titre à la Sainte-Chapelle, Jacques PAILLOT semble en 1790 ne plus y intervenir que ponctuellement en renfort, au même titre que le joueur de violon François BARY. L’un et l’autre apparaissent pour de petites sommes dans les comptes de 1790.
• • • Deux corps de musique comparables
Que nous apprend la comparaison ligne à ligne de ces deux corps de musique (voir tableau ci-dessous) ? Pour chacune des deux églises reste posée la question du rôle des six chapelains. L’un de ceux de la Sainte-Chapelle, Pierre BOUCHÉ, se proclame « chapelain-musicien », tous les autres restent muets sur la question. Trop d’incertitudes les enveloppant, ils ne sont pas pris en compte ici, même si à n’en pas douter ils étaient les acteurs principaux du plain-chant. De même, les instrumentistes externes (basse, violons) ne sont pas mentionnés, leur nombre pouvant varier selon les fêtes.
Structure des deux principaux corps de musique dijonnais en 1790
postes musicaux | Cathédrale St-Étienne | Sainte-Chapelle du Roy |
Maître de musique | 1 | 1 |
Organiste | 1 | 1 |
Basse-Contre | 4 | 4 dont 1 « récitante » |
Basse-Taille | 1 | 2 |
Haute-Taille | 1 | 1 « récitante » |
Haute-Contre | 1 | 1 « récitante » |
Serpent / Basson | 3 | 2 |
Musicien sans précision | / | 1 |
Enfant de chœur | 6 | 8 |
TOTAL | 18 | 21 |
La légère supériorité de la musique de la Sainte-Chapelle se lit tant dans ses effectifs que dans le niveau de qualification (trois chanteurs sont dits « récitants »). Compte non tenu des enfants de chœur, l’âge moyen des deux corps de musique est proche : 42 ans 10 mois à la cathédrale, 41 ans 8 mois à la Sainte-Chapelle. La différence la plus flagrante est l’aire de recrutement. Celle de la cathédrale est beaucoup plus étroite que celle de la Sainte-Chapelle. Les lieux de naissance des musiciens de la première se situent à une distance moyenne de 63 km (9 cas documentés sur 12), contre 113 km pour la seconde (10 cas sur 13). Un seul homme de la cathédrale est né à plus de 100 km (le maître de musique, né à Meaux, soit 270 km en itinéraire pédestre), tandis qu’ils sont quatre dans ce cas à la Sainte-Chapelle, le record étant détenu par le serpent-basson François DELAURIÈRE originaire de Poitiers (400 km).
Contrairement à ce qu’on pourrait supposer, ce recrutement à plus longue distance ne signifie pas nécessairement l’arrivée d’artistes issus de prestigieuses maîtrises. Alors qu’une formation maîtrisienne est fermement attestée pour dix des douze musiciens de la cathédrale, elle l’est pour seulement six des treize de la Sainte-Chapelle. Si le doute subsiste pour certains des sept autres hommes, on est certain que trois au moins sont en fait ‘issus du rang’ : Jean FAIVRE, Pierre-Joseph FEUVRIER ou Antoine BERTHOT sont des maîtres d’école chantres de villages propulsés grâce à la qualité de leur voix dans l’église la plus importante du diocèse. Le même mécanisme s’observe à la cathédrale, mais pour un seul de ses musiciens : lorsque Henri VERPAULT, fils d’un recteur d’école, y est reçu pour chanter la basse-contre, à presque 30 ans, il doit « apprendre la musique ».
Les collaborations entre les deux grandes églises dijonnaises ne sont pas rares. Brillantes lorsque les deux corps de musique unissent leurs forces pour donner un éclat particulier à une cérémonie (fête de la Rosière en 1788), elles peuvent aussi être discrètes comme dans ces nombreux cas où il faut pallier une absence. Ainsi lorsque SAGOT le basson de la cathédrale est indisponible, c'est CÉRÈS celui de la Sainte-Chapelle qui vient jouer à Saint-Étienne pour une « grande messe » de sépulture en octobre 1782. Ou encore lorsque l’une des églises fait appel à un musicien de l’autre pour des leçons : en 1787 Jean-Baptiste MILLOT, de la Sainte-Chapelle, enseigne le serpent au grand enfant de chœur de la cathédrale, Jacques LEFRANC. En cette même année 1787, les comptes de Saint-Étienne mentionnent au moins cinq interventions des musiciens de la Sainte-Chapelle (dans plusieurs autres cas l’origine des hommes rémunérés n’est pas précisée : « pour les musiciens qui ont chanté et accompagné aux Leçons des Tenèbres »).
• • • Les musiciens dijonnais face à la Révolution
Jusqu’au cœur de l’été 1792, l’ancien maître de musique de la Sainte-Chapelle supprimée a continué à habiter la maison de la maîtrise avec sa domestique. À la fin de juillet 1792, « François COLIN musicien resté seul à la dite maîtrise » est invité à assister à l’inventaire par le commissaire du District de Dijon. Tout est encore en place : les cinq douzaines d’aubes d’enfants dans une mauvaise armoire de bois de sapin, un basson et une basse, deux pupitres et les livres en latin dans la salle de classe… Une autre basse se trouve dans le cabinet de travail qui jouxte la chambre du maître, ce qui peut laisser penser qu’il en jouait lui-même. La trace de François COLIN se perd à compter de cette date.
Son homologue de la cathédrale, François COUET, a eu une attitude plus active face à la Révolution commençante. Dès octobre 1790, il envoie au Comité ecclésiastique des « Observations d'un citoyen de la ville de Dijon » qui montrent sa lucidité sur les transformations en gestation. Il plaide pour le maintien des maîtrises, « seules écoles de musique en France », où dit-il « ont été formés nos meilleurs artistes », et aussi pour le maintien de la musique dans les cathédrales non supprimées. N’évoquant que très marginalement la splendeur du culte, ses arguments essentiels sont qu’ainsi « l'art conservera ses écoles, et les citoyens trouveront dans leurs villes des maîtres pour leurs enfants ».
Le 8 mai 1791, le nouvel évêque constitutionnel de la Côte-d’Or, Volfius, propose au directoire du département un plan de réorganisation de la musique de la cathédrale, très probablement inspiré par François COUET, nommé à sa tête. Celui-ci connaît parfaitement les musiciens et les chanteurs localement disponibles. Son ‘casting’ –comme on dirait aujourd’hui– respecte à peu près la parité entre églises d’origine:
- six enfants de chœur
- quatre basse-contre, deux venant de la ci-devant Sainte-Chapelle (BERTHOT et FAIVRE), deux étant déjà précédemment à la cathédrale (BRICARD et VERPAULT)
- une basse taille, BORGET, de la cathédrale
- une taille, JARLOT, de la Sainte-Chapelle
- la haute contre de la Sainte-Chapelle, Nicolas BORNE
À ces voix s’ajoutent trois instrumentistes : l’organiste de la cathédrale, François LECLERC, les serpentistes DELAURIÈRE et MILLOT de la Sainte-Chapelle, et le violoncelliste MICHAUD – sur lequel on ne sait strictement rien, sauf une petite note indiquant que « selon M. Couet Michaud est hors d’état ». La musique est ensuite transférée de Saint-Étienne à l’abbatiale de Saint-Bénigne, devenue cathédrale constitutionnelle en juillet 1792.
L’organiste de la Sainte-Chapelle, Pierre-Philibert LAUSSEROIS, suit son orgue déménagé et remonté dans l’église Saint-Michel durant le second semestre 1793 par le facteur François CALLINET. Secondé par Joseph PARIN, LAUSSEROIS continue à toucher l'orgue lorsque Saint-Michel devient Temple de la Raison. « Jusqu’au 1er fructidor an VIII, [l’orgue] a servi pour les cérémonies décadaires », écrit P. M. Guéritey.
Certains des ci-devant musiciens des églises de Dijon trouvent une planche de salut provisoire en enseignant à l’Institut de musique créé à l’instigation de la municipalité le 19 frimaire an II (9 décembre 1793), soit un mois après celui de Paris (Cl. Théhorel, 2004). Installé dans l'ancienne chapelle des Jésuites, il fonctionne jusqu’en 1797 ou 1798. Les documents qui concernent cet Institut éclairent utilement les spécialités diverses des musiciens engagés. Ainsi Jacques LEFRANC, le jeune serpent issu de la maîtrise de Saint-Étienne, est-il recruté pour enseigner chant, violoncelle, violon, guitare, clavecin et serpent : cette gamme étendue atteste ses compétences variées. L’Institut de musique engage aussi plusieurs « institutrices de musique ». Celles qui sont chargées d’enseigner le clavecin, les citoyennes Bernarde BOILLOT et Jacquette LABOUREY, étaient discrètement organistes antérieurement (la première à Saint-Pierre, la seconde on ne sait où).
Une terre de collégiales
Selon le médiéviste Vincent Tabbagh, la Bourgogne était particulièrement pourvue en collégiales : « Alors que sept collégiales ont existé en moyenne dans chaque diocèse de France au Moyen Âge, celui de Chalon-sur-Saône, modeste, en a compté huit, Auxerre dix-sept, Autun vingt-deux et Langres vingt-sept ». En 1790 perdurent encore des témoignages de cette densité et de cette vitalité passées – surtout dans le diocèse d'Autun.
• • • La collégiale Notre-Dame de Beaune
La collégiale la plus puissante – et de loin la mieux documentée – est Notre-Dame de Beaune, dans le diocèse d’Autun. La France ecclésiastique ne lui consacre pourtant qu’une ligne unique, mentionnant seulement son Doyen et un Archidiacre. Aujourd’hui encore son architecture, caractéristique de l’art roman bourguignon et plus particulièrement du style clunisien, témoigne de la richesse du chapitre. Les registres capitulaires montrent une vie musicale active, dont le sommet est la grande fête mariale du 15 août. À cette occasion, on soigne le décorum tant visuel (achat d’étoffe « afin que les enfants soient habillés pour l’Assomption ») que musical (« faire venir les musiciens nécessaires pour célébrer la fête de l’Assomption »).
En 1790, le maître de musique est le sieur ÉVRARD sur lequel on reste – paradoxalement – mal renseigné, les sources beaunoises ne mentionnant pas même son prénom. Celui-ci (Jean-Pierre) a été livré par son passage par la cathédrale de Toul, quelques années auparavant, où il chante la haute-contre durant un mois et demi. Quelques uns de ses prédécesseurs jouissent aujourd’hui d’une certaine notoriété comme François-Nicolas HOMET, Nicolas SAVART, Nicolas ROZE, ou, plus anciennement en poste, Joseph GARNIER et Jean-Marie ROUSSEAU, dont des pièces ont été conservées.
Peu de temps avant la Révolution, ÉVRARD avait remplacé Lazare GOOSSENS (1734-1811). Le destin de ce dernier a quelque chose de poignant. Ce musicien aux aptitudes reconnues pour la composition avait été reçu maître de musique à l’âge de 28 ans dans l’église où il avait été enfant de chœur. Le titre lui avait été retiré lorsque, quatre ans plus tard, il avait choisi de se marier : les chanoines de Beaune exigent en effet d’avoir un clerc à la tête de leur musique et de leur maîtrise. Seul problème : ils ne parviennent pas à en stabiliser un durablement. Se succèdent Nicolas SAVART (mars 1767- début 1768), Nicolas ROZE (février 1768 - mai 1770), Pierre ALOTTE (septembre 1770 - début août 1772), Laurent DUPUIS (décembre 1772 - avril 1775). Goossens prend fidèlement le relais lors des congés accordés au maître et lors des vacances du poste, il « fait chanter » lors des Assomptions sans maître comme en août 1770 et 1772, puis il rentre dans le rang lorsqu’un nouveau maître est nommé. Enfin, en 1775, le chapitre renonce à ses intenables principes et scinde le poste en deux : un jeune ecclésiastique à la maîtrise pour veiller aux enfants de chœur, et Lazare GOOSSENS à la tête de la musique. Cette période est pour le quarantenaire celle de l’épanouissement – durant laquelle il rejoint les rangs de la loge maçonnique créée à Beaune en 1777.
Le système bicéphale fonctionne bien durant une douzaine d’années. Jusqu’à ce que le maître de musique attrape une mauvaise fièvre qui le terrasse pendant plusieurs mois en 1786-1787. Les années 1786 à 1788 sont difficiles et marquées de conflits larvés entre le maître des enfants de chœur, Jacques DROUHIN, et le maître de musique affaibli Lazare GOOSSENS, qui sans doute ne peut plus conduire la musique mais qui est toujours musicien. Le premier correspond avec Nicolas ROZE à Paris, et en reçoit des partitions que le second juge nécessaire de retoucher (« la ditte messe avoit besoin d’être corrigée dans quelques endroits avant qu’elle ne fut exécutée », 1er février 1788). Nicolas Roze, qui a sans doute vent de ce sacrilège, vient en personne faire exécuter sa musique à Pâques 1788 – pour l’occasion, les chanoines recrutent un violon supplémentaire et font livrer au domicile parisien de Roze « une feuillette de bon vin, franche de tous droits ». Peut-être piqué, Goossens dédie et offre au chapitre six messes de sa composition. Puis, durant l’été 1788, il abandonne le combat et se démet du titre qu’il avait tant attendu. C’est alors ÉVRARD, haute-contre depuis 1785, qui est promu maître de musique : « Il battra la mesure, enseignera [la musique aux] enfants, apprendra à jouer des instruments à ceux en qui il trouvera de la disposition et chantera sa partie de haute contre ».
La longue requête que, dès le 29 mai 1790, « justement allarmés sur le sort qui [les] menace », les musiciens de « l’Insigne église collégialle Notre-Dame de Beaune » envoient à « Nos Seigneurs » de l’Assemblée, est signée de neuf noms.
En 1790, ÉVRARD conduit un chœur étoffé, composé de Léonard BALONCHARD, Jean-Baptiste FOURCHOTTE, Philibert JOROT, Jean-Louis LEVESQUE, MÉRANDON et Gaspard SAUSSET. Viennent se joindre les voix de deux anciens enfants de chœur ayant le statut de "chorial", présents les dimanches et fêtes tout en suivant des études au collège, Jacques-François CHAMPEAUX et Claude TRUCHEUR – ce dernier jouant également de la basse –, et enfin les voix des six enfants de chœur. Durant les derniers mois de fonctionnement du chapitre, ces six garçons sont, par ordre d’ancienneté, Charles FOURTIER (alias Fourtier aîné, reçu en août 1781), FOURTIER puiné (reçu en septembre 1782), MASSON (mars 1783), Louis CUINIER (novembre 1786), Edme JOLY (mai 1788) et Jean-Baptiste ROULOT (mai 1789). Tous sont natifs de la ville même, sauf le dernier recruté, né à Pernand, village viticole situé à 7 km au nord de Beaune. Si ÉVRARD est chargé de leur apprentissage musical, c’est le prêtre Jacques DROUHIN qui gère le quotidien de la maîtrise et leur dispense les autres enseignements. Enfin, le chœur est renforcé vocalement par des "habitués", prêtres, ou clercs et chapelains, comme Pierre DESFORGES, Jacques DROUHIN et François DURAND. En juillet 1790, l’un d’eux, nommé GAUTHEY, se fait remarquer car il se tient « habituellement assis » lorsqu’il « chante à la musique » et ne descend « point des hautes stalles pour chanter l’antienne de la sainte Vierge » avec « Mrs les musiciens », ce qui est tout à fait contraire aux usages et lui vaut une réprimande du chapitre, avec menace de sanction financière.
À cet effectif, s’ajoutent l’ancien maître, Lazare GOOSSENS, toujours présent au chœur où il est chargé de jouer de la basse, et l’organiste. Celui-ci est, depuis fin avril 1782, Jean-Nicolas MORISSET, envoyé de Paris par Nicolas Roze pour succéder à Pierre GUILLERMIER, décédé le 4 janvier (dans l’intervalle l’orgue a été tenu par l’une des filles du défunt). Ce Pierre GUILLERMIER, dont la qualité noble ne fait aucun doute (« écuyer », « seigneur de Montmartin au finage de Laines-aux-Bois » [Aube]), avait exercé durant presque quarante ans à Beaune puisqu’il y était arrivé en mars 1744 afin de remplacer Edme LAUSSEROIS, parti pour Dijon plusieurs mois auparavant.
• • • Saint-Andoche de Saulieu
Dans le diocèse d’Autun, Saulieu est une active petite ville dotée d’un bailliage. Le chapitre de Saint-Andoche compte 13 prébendes. Il est présidé par un Doyen, suivi d’un Prévôt et d’un Chantre, mais les chanoines sont rarement plus de cinq ou six à assister à l’hebdomadaire chapitre ordinaire. Établissement modeste, Saint-Andoche parvient cependant à entretenir une musique, que la bonne conservation des archives capitulaires permet d’éclairer dans le détail.
Sous la conduite d’un maître, on entend chanter deux « habitués » (qui en 1790 sont Georges-Étienne LAFOSSE et Philippe CHATELIN) et quatre enfants de chœur (en 1790 : Dominique François RENAUD, Nicolas PÉTOT, Antoine RIOLLET et François-Louis ROY, auxquels s'ajoute un autre fils du maître de musique, Jean-Baptiste PÉTOT). Ce petit corps de musique semble de bon niveau puisque le maître et le joueur de serpent sont régulièrement invités aux fêtes patronales d’autres églises (Avallon). Les chanoines de Saint-Andoche ont le souci d’avoir un service de qualité : en 1778, le serpent en poste « ne pouvant plus jouer du serpent à cause de son âge et de ses infirmités », le chapitre envoie à Autun un ancien enfant de chœur alors jeune « habitué », Philippe CHATELIN, « pour prendre des leçons de cet instrument ».
Les offices de Saint-Andoche sont accompagnés non seulement par le serpent mais aussi par une basse, comme l’indique le paiement en 1789 de « 3 livres pour fourniture des cordes de la basse ». Un organiste, Simon LA PERDRIX, avait été attesté jusqu’en 1729. Ceux qui lui ont succédé restent à éclairer. Les comptes de 1790 mentionnent une somme de 2 000 livres pour « les gages des habitués, maître de musique, enfans de chœur, marguillier & autres » sans évoquer d’organiste. À la veille de la Révolution, il ne semble plus y avoir d‘orgue en état de fonctionner puisque l’inventaire du 16 juin 1790 mentionne « les débris d’un jeu d’orgues placé dans la tribune ». Cinq ans plus tard, l’expertise menée par François LECLERC, l’organiste de la cathédrale de Dijon, confirme l’état pitoyable de ce « petit orgue de quatre pieds composé tant au positif quau grand orgue de douze jeux et trois petits soufflets, le tout dans le plus mauvais état, et dont la majeure partie des tuyaux ont été enlevé et ce qui reste tout bosselés ou cassé ». Il estime les vestiges à 200 livres.
La succession des maîtres de Saint-Andoche de Saulieu a pu être bien reconstituée : après Jean-Baptiste MIROLIN, en poste jusqu’à mi-1746, Jean-Michel DAGUET (dont la biographie est un vrai roman…) s’y était stabilisé de septembre 1746 à Pâques 1755. Ensuite ont exercé le jeune Edme ROZEROT de juin 1755 à fin février 1758, puis, plus longuement, Amable-Joseph HOUZÉ de juin 1758 à octobre 1785.
Ce dernier, au bout d'une année de service, avait obtenu du chapitre un contrat en bonne et due forme. Ce texte précise finement les tâches incombant à un maître dans un établissement de ce type. On retrouve bien entendu les obligations classiques : soigner et éduquer les enfants de chœur, composer « motets et autres pièces de musique tant pour la voix que pour les instrumens », qui « appartiendront en propre à la maîtrise », assister aux offices et porter la chape à son tour… Une originalité du fonctionnement de Saint-Andoche de Saulieu est la volonté d’organiser un ‘tuilage’ systématisé des générations d’enfants de chœur, qui ne sont alors que deux : « deux ans avant que les enfants de chœur qui sont actuellement à la maîtrise puissent en sortir, il [le maître] fera choix de deux autres pour les remplacer qu’il sera tenu de former pendant les dittes deux années ». Ces deux enfants supplétifs sont externes, ils seront à leur tour logés et nourris à la maitrise lorsque les deux précédents sortiront.
Le chapitre a rapidement été déçu par HOUZÉ, négligent face à ses devoirs. Au point que deux de ses fils, enfants de chœur pendant huit ans au lieu de six normalement, sont sortis de la maîtrise, rapporte un chanoine en 1785 « sans sçavoir ni lire ni écrire et moins encore leur religion » ce qui fait qu’ils sont comptés « dans la ville au nombre des libertins et des ignorans ». Le remplacement du maître défaillant – et vieillissant – donne lieu à de longs débats au sein de la compagnie capitulaire au fil de l’année 1785, les uns souhaitant le renvoyer « dès ce moment », les autres « inclinant au parti conforme à la charité et l’humanité » envers un serviteur à la longue ancienneté. Un compromis est finalement trouvé sous la forme d’une assez forte pension alimentaire servie au maître sa vie durant.
Lazare PÉTOT, 34 ans, hérite du poste à la Toussaint 1785 dans une atmosphère particulière, où se mêlent rancœurs et soulagement. Ancien enfant de chœur de la cathédrale d’Autun, il y jouait du serpent depuis quatre ans environ au moment de sa nomination à Saulieu. Entre temps il avait été durant quatorze ans « maître de musique au Régiment d'Aunis Infanterie ». L’aîné de ses fils, Nicolas, né à Arras en 1777, est reçu enfant de chœur de la collégiale de Saulieu en même temps que lui-même en devient le maître de musique.
• • • Saint-Denis de Nuits
Elle aussi dans le diocèse d’Autun, la petite ville de Nuits – aujourd’hui connue sous le nom de Nuit-Saint-Georges et dont la réputation viticole n’est plus à faire… – possède une collégiale dédiée à saint Denis, aux archives très lacunaires. La France ecclésiastique y mentionne seulement l’existence d’un Doyen.
À la veille de la Révolution, la collégiale Saint-Denis ne possède pas d’orgue. L’inventaire dressé en janvier 1791 n’enregistre comme trace matérielle d’une activité ‘musicale’ que « 16 livres tant pour le chant que missels ». Le maître de musique se nomme François PRIEUR. Laïc, marié et père de famille, il a, dit-il en 1791, passé cinquante-huit années « au service des autels », d’abord enfant de chœur puis sacristain à la collégiale Saint-Lazare d’Avallon, avant d’accéder au terme de cet humble cursus au poste de maître de la collégiale de Nuits. Là il gère quelques enfants de chœur et un petit corps de musique sur lequel les renseignements manquent.
• • • Notre-Dame de Semur
À Semur, capitale de l’Auxois, toujours dans le diocèse d’Autun, le chapitre est de création récente : c’est en 1731 que le dernier prieur de Notre-Dame obtient, avec le soutien de la Ville, la transformation de son prieuré en chapitre. Composé d’un doyen, d’un chantre et de dix chanoines, ce nouveau chapitre comprend le curé parmi ses membres et englobe le mépart. Il a la mainmise sur la vie religieuse locale qui a pour cadre Notre-Dame, l’ancienne église priorale devenue collégiale et aussi seule église paroissiale de la ville.
La collégiale de Semur est soucieuse de la qualité de sa musique. En témoigne l’annonce insérée dans Les Affiches de Bourgogne en 1778 pour recruter un ecclésiastique ayant « une belle voix de Chœur ». En témoigne aussi l’inventaire du 30 juin 1790 : « une [sic] aigle de cuivre servant de pupitre », deux serpents, de nombreux livres de chant et des vêtements liturgiques pour les enfants de chœur (16 aubes) et « pour les sous chantres et le serpent » (plusieurs surplis, soutanes, rochets).
Le corps de musique comporte un nombre inconnu d'enfants de chœur et de chantres, dont deux ont été identifiés pour 1790, Louis POILVEY, basse-contre, et Jacques TROUSSEAU, renforcés par les voix des chapelains comme Nicolas BOQUIN qui a passé douze ans à la maîtrise de la collégiale, et soutenus par un serpent, Jean LAMBLOT, sous la conduite d’un maître de musique. Jusqu’à l’été 1789, ce maître était Claude AMIDEY qui décède à son poste le 5 août 1789, à l’âge de 55 ans. Le nom de son successeur n’a pas surgi des sources dépouillées. Il est possible qu’AMIDEY n’ait pas été remplacé, ce qui expliquerait l’absence de toutes traces concernant un maître de musique à Notre-Dame de Semur en 1790.
La collégiale de Semur se distingue de celle de Saulieu par des orgues en bon état de fonctionnement en 1790, touchées par Antoine PASCAL, membre d’une large famille comptant plusieurs autres organistes. En l’an III, « après avoir pris des renseignement auprès des gens de l’art », l’administration décrit l’instrument comme « un quatre pieds avec positif sans pédale & la montre d’un huit pieds ».
• • • La Chapelle-aux-Riches de Dijon
Dans le diocèse de Dijon, les collégiales étaient au nombre de trois seulement, selon La France ecclésiastique : Champlitte [actuellement en Haute-Saône], La Chapelle-aux-Riches, et Saint-Jean, à Dijon même.
La Chapelle-aux-Riches tiendrait son nom de deux frères, Dominique et Évrard Le Riche, qui à la fin du XIIe siècle avaient fondé une maison pour recevoir les pauvres passants et les pèlerins, maison rapidement confiée à un collège de chanoines séculiers placés sous la tutelle de l’abbaye de Saint-Bénigne. L’hôpital et sa chapelle étaient situés dans l’actuelle rue Berbizey, longtemps appelée rue de la Chapelotte. Malgré l’étroitesse de cette chapelotte, les comptes de 1790 révèlent la présence de deux chantres rémunérés 36 livres par an. Au début de l’année, ce sont Étienne GRAVIGNARD et le sieur CHEVALIER. Après le décès du premier, mi-juillet 1790, son rôle est confié à Denis GRAILLOT, par ailleurs chantre chez les Dominicains.
• • • Saint-Jean de Dijon
L’église Saint-Jean est à la fois collégiale et paroissiale. Ses archives sont riches, juxtaposant sources capitulaires et fabriciennes, en particulier diverses pièces comptables. La structure musicale se dessine avec netteté. Un organiste est payé par la fabrique (depuis 1774 c’est l’Alsacien Joseph PARIN) tandis que le serpent l’est pour moitié par le chapitre et pour moitié par la fabrique (en 1790 il s'agit de Jacques CHAMP, dit DUMONT, par ailleurs marchand faïencier). Des allusions à « des chantres » indiquent qu’il y en a au moins deux, dont a été identifié le cordonnier Étienne GRAVIGNARD (déjà rencontré à La Chapelle-aux-Riches voisine), basse-contre de Saint-Jean depuis 1779 et jusqu’à son décès. À compter du 1er août 1790 son poste est pourvu par un certain POINSOTTE. Le second poste était antérieurement occupé par Léonard BALONCHARD, jusqu’à son départ pour Beaune à l’été 1786.
On ne trouve pas mention d’un maître de musique sensu stricto mais d’un maître des enfants de chœur. En 1790 il a nom Nicolas-Joseph BOUCHIN, en poste depuis Pâques 1788. Sa charge de travail est bien connue par la convention détaillée que la fabrique avait établie lors du recrutement de son prédécesseur, Louis HACQUARD, à Pâques 1782 : elle est entièrement orientée autour de la gestion de la maîtrise et de l’éducation des quatre enfants de chœur. Deux d’entre eux sont choisis et entretenus par le corps capitulaire. Un conflit larvé oppose d’ailleurs les chanoines aux fabriciens sur ce sujet. Les seconds doivent en effet agréer la nomination des garçons choisis. Or ils les font chanter, donnent leur avis, en somme leur font subir un second examen. Cette intrusion dans leur domaine réservé déplaît aux chanoines, même si finalement leurs choix sont toujours ratifiés. Les deux autres enfants de chœur sont financés par la fondation d’une paroissienne, Jeanne Joly, en 1700. Neuf décennies plus tard, leur nomination appartient toujours à ses héritiers, ce qui nous vaut une belle liste d’enfants successivement choisis tout au long du siècle. La durée de service de ces garçons n’est que de sept ans, et peu d’entre eux deviennent musiciens ultérieurement. Le seul à avoir été clairement repéré dans ce cas est Pierre VIENNE, organiste à Tonnerre puis à Dijon – et marchand épicier. Sur les quatre enfants de chœur de 1790, trois ont été identifiés : Jacques GRAVIGNARD, le fils du cordonnier basse-contre, Pierre BOURGENOT, reçu en 1787, fils d’un tailleur de pierres, et Jean-Baptiste VAILLIARD, fils d’un domestique, entré en août 1789.
• • • D’autres petites collégiales subsistent à la fin de l’Ancien Régime, ici ou là dans ce qui va devenir la Côte-d’Or
-> Sur la collégiale Saint-Symphorien d’Époisses, dans le diocèse d’Autun, les sources sont rares, mais la requête de François BLESSEAU en septembre 1790 détaille les charges qui ont été les siennes : « assister à tous les offices, allumer les cierges, sonner les cloches, servir les messes, balayer l’église et la sacristie, entretenir et nettoyer les ornements ». Il termine son énumération par « même fait les fonctions de chantre à la dite église collégialle ».
Moins de six mois après la dissolution du chapitre, la municipalité engage Jacques-Edme BLESSEAU, fils de François, pour aider le maître d’école à « chanter à tous les offices » et pour « conjointement avec lui porter chapes ». On voit là l’expression d’un besoin nouveau par les paroissiens : « vu que Mrs les ex chanoines que nous avions n’assistent plus à l’église » et qu’il faut bien pourtant que les offices soient chantés, le relais doit être pris par la société civile pour maintenir les fonctions cantorales antérieurement assurées par le corps capitulaire. C’est une nouvelle preuve de l’importance du chant d’Église dans la société du XVIIIe siècle, y compris au fond des villages, comme l’avait magistralement montré Xavier Bisaro à partir de cas pour partie bourguignons, précisément (Chanter toujours, 2010).
-> Dans le diocèse de Langres, la collégiale Saint-Jean l’Évangéliste de Grancey-le-Château est enserrée dans les fortifications qui ceinturent le bourg construit sur un éperon rocheux. La France ecclésiastique ne lui consacre qu’une ligne, mentionnant seulement le nom de son Doyen. La série L indique qu’au moment de sa dissolution, le chapitre de Grancey comptait six prébendes, mais en réalité cinq chanoines seulement, le Doyen comptant double.
L’enquête Muséfrem a réuni de nombreux documents qui, tous, concernent un unique homme de la musique, Antoine GAUDIER, qu’il serait plus exact de qualifier d’ ‘homme à tout faire’ puisqu’il est à la fois chantre, sonneur et sacristain, triple charge qu’il exerce depuis l’âge de 15 ans pour un revenu de 130 livres par an, y compris son logement et « trois ou quatre voitures de bois qu’on lui donnoit à couper au gré du Chapitre ».
-> La collégiale de la Sainte-Trinité, à Vic-sous-Thil, dans le diocèse d’Autun, fondée au XIVe siècle, se dresse toujours sur la butte de Thil (bien figurée sur la carte de Cassini). C’est une église fortifiée à chevet plat, avec une tour-clocher et une nef voûtée en berceau brisé. En 1790, son chapitre ne compte plus que six prébendes. Deux étant vacantes, l’une par la mort, l’autre par le rapide mariage de leurs titulaires, quatre ex-chanoines seulement figurent dans les dossiers 1790-1791. Le ci-devant Doyen précise au détour de son exposé budgétaire « qu’il n’était pas chargé de participer au traitement du chantre », indiquant au passage que le chapitre faisait appel à une voix extérieure pour étoffer le chant des offices. L’enquête Muséfrem n’a pas – pour l’instant – identifié cet homme.
Les organistes des abbayes et des couvents
Depuis le Moyen Âge, la Bourgogne possédait des abbayes puissantes. Dominique Dinet a montré que, sous des formes renouvelées, le monachisme avait conservé un grand dynamisme aux XVIIe et XVIIIe siècles dans cette province où jamais, écrit-il, on n’avait connu « une telle densité d’établissements religieux, même pendant '’l’âge d’or médiéval’’ ». Le monachisme féminin, notamment, essaime finement et « jamais autant de femmes n’avaient porté l’habit religieux » (Dinet, vol. 2, p. 847). Le même historien note que dans les diocèses d’Auxerre, Langres et Dijon par lui étudiés, plusieurs communautés « s'efforcèrent d'entretenir leurs orgues avec soin […] pour mieux chanter la gloire du Seigneur ».
Le chant étant essentiellement assuré par les moines et les moniales, l’activité musicale monastique qui a la meilleure visibilité archivistique est en effet celle qui est liée à l’orgue : gages versés à un ou une organiste laïque, et surtout travaux de construction, de réfection ou d’entretien… patiemment auscultés depuis plusieurs générations par les historiens des orgues.
• • • À Dijon, les délibérations capitulaires et les comptabilités révèlent des travaux importants sur les orgues des carmes en 1739, des dominicains en 1758 (par Karl Joseph RIEPP), des cordeliers en 1776-1777 (par Bénigne BOILLOT), des bénédictins de Saint-Bénigne en 1740-1745 (construction par les frères RIEPP) puis en 1787-1788 (réfection par Jean RICHARD, de Troyes). Des orgues sont également attestées en 1790 (PV de visite établi en 1792 par Bénigne Boillot) chez les bernardines de Notre-Dame de Tart, installées rue des Craies à Dijon, et chez les bénédictines de Saint-Julien. Dietsch évoque enfin des orgues chez les jacobines de Dijon, tout en reconnaissant n’avoir « aucun renseignement » à leur sujet.
À ces tribunes en 1790 on retrouve certains des organistes dijonnais déjà rencontrés. Ainsi chez les bernardines, c’est François LECLERC, l’organiste de la cathédrale, qui fait le service au moins depuis le début des années 1770, où il touchait des « honoraires » de 36 livres par semestre, avant de passer à 50 livres en 1783. Chez les dominicains, officie Louis CAMUS, par ailleurs organiste de la paroisse Saint-Michel (le couvent rémunère également un chantre, le sieur GRAILLOT, et un serpent, René-Bénigne GENDARME). À Saint-Bénigne c’est l’organiste de Saint-Jean, l’Alsacien Joseph PARIN, qui en mars 1780 a obtenu l’autorisation de cumuler les deux postes, le service de l’orgue des bénédictins n’étant « point incompatible avec l’heure des offices de ladite église St-Jean ». Précédemment, l’orgue tout neuf avait été touché par Claude RAMEAU dès 1743, puis par le facteur de clavecins et organiste Nicolas PIGALLE (1709-1786). En 1790, le chant des moines de Saint-Bénigne est soutenu par un serpent, joué par un laïc, Didier MORLOT.
Chez les cordeliers, des chantres sont attestés par « les quatre escabots des chantres » inventoriés en 1790, et le serpent de « frère Ferdinand » est réparé en 1786 : les chantres semblent être, comme le serpent, des religieux. Quant à l’orgue de Bénigne BOILLOT, après un bail de neuf ans rempli par Louis CAMUS – encore lui – pour 135 livres par an, il est confié à partir de La Toussaint 1788 à la demoiselle TILLET, payée 120 livres seulement. Notons pour l’anecdote que quelques années plus tard la jeune organiste convolera avec l’un des ci-devant religieux du couvent, reconverti en musicien.
• • • Orgues monastiques hors de Dijon
P. M. Guéritey (2012) explique que hors de Dijon, il n'y a finalement que peu d'orgues dans les couvents des petites villes. Par exemple les inventaires de 1790-92 ne citent aucun orgue dans les nombreux couvents de Beaune, pas plus que dans les couvents d'Auxonne, d'Arnay-le-Duc ou encore de Semur. On peut s'étonner de ne pas trouver d'orgue à Bèze, riche abbaye bénédictine située à quelque 30 km au nord-est de Dijon…
À l’inverse, la succession des organistes de l’abbaye mauriste de Saint-Seine, au nord de Dijon, a pu être reconstituée sur trois générations. En 1790 c’est Claude MATHIEU, par ailleurs « procureur du Roy », qui est à la tribune. Il a succédé à Nicolas REGNAUDOT qui en 1743 avait lui-même pris la suite de Louis MATHIEU, père de l’organiste de 1790.
La célèbre abbaye de Cîteaux avait à la veille de la Révolution des orgues magnifiques reconstruites cinquante ans plus tôt par Karl Joseph RIEPP. Les officiers publics qui dressent l’inventaire de l'abbaye en mai 1790 font état d’un « jeu d’orgue à deux claviers dont le Buffet est très beau et très ancien » (4 mai 1790). Comme les orgues, les archives ont été détruites. De loin en loin on aperçoit dans le registre paroissial du village voisin certains « des hommes à gages » employés pour toucher l’orgue (J. Gardien, 1943). Ils semblent ne pas rester longtemps, comme si des contrats courts se succédaient. Ainsi en décembre 1768 et janvier 1769, puis en 1772-1773, sa signature atteste la présence de Jean-Joseph VIENNE. Entre temps, c’est Simon FRUICKER qui apparait comme organiste de l’abbaye en 1769-1770. Le « compte définitif » qui en mars-avril 1791 clôt le dernier exercice comptable de Cîteaux mentionne la somme de 34 livres payée « à Mr REBUILLOT organiste pour ce qui lui était dû de ses gages depuis le 20 7bre dernier jusques et compris le 31 Xbre suivant » (merci à P. M. Guéritey pour cette information inédite).
L’abbaye bénédictine Notre-Dame de Molesmes, située à la lisière de la Champagne et de la Bourgogne, possédait elle aussi des orgues. Leur dernier titulaire est le fils d’un couple d’organistes dont les itinéraires ont été antérieurement reconstitués par l’équipe Muséfrem, François BAINVILLE et Marie-Claude RENAULT. Né à Chartres en 1753, Michel-François BAINVILLE a vécu à Angers, Orléans, Paris… avant d’arriver à Molesmes entre juin 1785 et octobre 1788. Il s’y marie fin 1789. L’instrument de l’abbaye est le premier du département à être vendu, le 4 avril 1791. Acquis par la fabrique des Riceys [Aube], il est immédiatement installé dans l'église Saint-Pierre-ès-Liens par le facteur Bénigne BOILLOT : les travaux sont reçus dès le 16 octobre 1791. Michel François BAINVILLE suit son orgue et s’installe à Ricey-Bas, où il est attesté jusqu’en 1794. Brièvement revenu à Molesmes, il en repart à la fin de la décennie révolutionnaire pour l’ouest où on le retrouve organiste à La Ferté-Bernard (Sarthe) puis à Falaise (Calvados).
Quelques autres orgues en activité à la fin de l’Ancien Régime ont été repérés ici ou là dans des établissements conventuels à travers le territoire qui allait devenir la Côte-d’Or, comme ce petit orgue assez récemment signalé par P. M. Guéritey au couvent des Carmes de Saint-Jean-de-Losne. Les Carmes de Semur-en-Auxois avaient eux-aussi un orgue qui en 1763 résonnait d'airs "profanes et mondains peu convenables à la sainteté du lieu". Était-il toujours en fonctionnement en 1790 ? Certains de ces orgues conventuels restent peut-être encore à découvrir.
Puissantes et modestes églises paroissiales : des chantres et quelques organistes
Des chantres exerçaient probablement dans à peu près toutes les paroisses, quelle que soit leur taille. Dans les villes, ils côtoient – irrégulièrement – quelques organistes.
• • • Dijon comptait sept paroisses dont les archives sont inégalement conservées. Toutes sont dotées d’un mépart ou familiarité. Le plain-chant étant assuré par les prêtres mépartistes et les enfants de chœur, les organistes sont seuls - ou presque – visibles dans les sources disponibles.
• 1°) L’église paroissiale Notre-Dame de Dijon est célèbre pour son Jacquemart, horloge à personnages, prise de guerre de Philippe-le-Hardi dans les Flandres en 1382. Sur le plan musical, elle s’illustre par ses orgues et ses organistes dont la succession est connue pour l’ensemble du XVIIIe siècle : Jean RAMEAU (1690-1704), Jean-Philippe RAMEAU (1709-1713, le futur célèbre musicien), Joseph-André LORIN (1713-1735), Claude-Bernard RAMEAU (1735-1737), Étienne LORIN (1737-1745), Edme LAUSSEROIS, assisté très officiellement par son épouse, Anne CHAPUZOT — on dirait aujourd’hui co-titulaire — (1745-1757), et Antoinette DUPLUS à partir de décembre 1757, jusqu’à la Révolution. Soit huit organistes successifs, dont les obligations de service sont bien connues grâce à l’article minutieux que leur a consacré Érik Kocevar en 1999.
Les comptes de Notre-Dame attestent que cette église emploie également un suisse, au moins deux chantres restés obstinément anonymes (« pour une année de gages de l’un des chantres de la ditte église, 100 livres »), trois enfants de chœur et leur maître. À la veille de la Révolution, et depuis 1774, ce dernier est Bernard RIAMBOURG, prêtre. En 1791, les deux chantres se nomment CHEVALLIER et GRAILLOT, on ignore s’ils y chantaient déjà les années précédentes.
Antoinette DUPLUS, devenue « madame Camus » en 1765, restera à l’orgue de Notre-Dame par delà la Révolution jusqu’en 1804. Jacques LEFRANC, qui lui succédera alors, restera en poste plus de 50 ans, jusqu’à sa mort le 23 juillet 1853.
• 2°) À Saint-Michel, les recherches (à paraitre) de Jean-Pierre Roze montrent que le seul musicien gagé était l’organiste. Celui de 1790 est le mari d’Antoinette DUPLUS, Louis CAMUS, qui complète les maigres revenus de leurs orgues en étant par ailleurs « marchand ».
En septembre 1792 on le voit demander et en novembre obtenir sa mise à la retraite. Peu après, le 3 févier 1793, la municipalité donne son accord pour que l’orgue de la Sainte-Chapelle ne soit pas vendu aux enchères comme prévu mais réservé pour Saint-Michel, où il est transféré par le facteur François CALLINET à partir de juin. C’est Pierre-Philibert LAUSSEROIS, l’ancien organiste de la Sainte-Chapelle, qui est désigné pour le toucher. Il continue à le faire, secondé par Joseph PARIN, lorsque Saint-Michel est affecté au culte décadaire. Louis CAMUS, quant à lui, se reconvertit en « officier de paix » puis en agent de police.
• 3°) À Saint-Nicolas, les orgues sont en 1790 entre les mains d’une femme, la dame GELIN. Celle-ci était en poste en 1781 lorsque les fabriciens la chargent avec Joseph PARIN, organiste de Saint-Jean, d’expertiser à nouveau l’orgue construit par le facteur RABINY afin de parvenir à sa réception (cet orgue litigieux avait déjà fait l’objet d’un rapport en avril 1773 établi par François LECLERC, l’organiste de la cathédrale, puis en 1776 une autre visite avait été demandée à Pierre-Philibert LAUSSEROIS, organiste de la Sainte-Chapelle).
Après enquête, il semble que cette mystérieuse « dame GELIN » ne soit autre que la demoiselle LATREILLE dont le manuscrit Dietsch puis J. Gardien affirment tous deux qu’elle avait succédé à Jacques BELIN, l’organiste licencié par les fabriciens de Saint-Nicolas en 1761.
• 4°) À Saint-Pierre, on repère antérieurement à la tribune successivement Anne CHAPUZOT, Thomas CHAIGNEY et Pierre VIENNE. En 1790, c’est le fils de ce dernier, Jean-Joseph VIENNE, qui est appointé (135 livres par an) comme organiste, ayant pris le relais de son père au tout début des années 1780. Il meurt le lendemain de la Fête de la Fédération, le 15 juillet 1790, à l’âge de 36 ans. Tandis que sa veuve reçoit le semestre dû, l’orgue est confié à Bernarde BOILLOT, fille du facteur qui entretient l’instrument. La jeune fille – elle a 19 ans – reçoit 100 livres au tout début de 1791 « pour six mois d’appointements », ce qui traduit une augmentation très sensible. La paroisse Saint-Pierre supprimée, son orgue est vendu le 23 janvier 1793 pour 1 000 livres à un certain Corberaud et l’ancienne église démolie à partir du 19 février 1793 (P. M. Guéritey).
• 5° et 6°) Les paroisses Saint-Médard et Saint-Jean sont desservies, la première au sein de l’église cathédrale Saint-Étienne, la seconde au sein de la collégiale Saint-Jean. En conséquence elles bénéficient d’une mutualisation des ressources musicales mises en œuvre par les chapitres, partageant certains frais avec eux (voir ci-dessus).
• 7°) L’église paroissiale de Saint-Philibert possède également des orgues, réparées, augmentées et entretenues par Karl Joseph RIEPP puis par Joseph RABINY. La succession des organistes antérieurs a pu être assez bien reconstituée jusqu’en 1767 – date à laquelle s’arrêtent les comptes conservés : Bénigne BALBASTRE, Jeanne puis Claudine ORMANCEY, François BERTHELEY, Pétronille DOUBLET-DELAHAYE. Une requête de novembre 1791 prouve que depuis six mois au moins Anne TILLET – déjà rencontrée chez les Cordeliers – était l’organiste de Saint-Philibert, à 200 livres par an. L’était-elle déjà en 1790 ?
• • • À Beaune, les sources ont permis d’identifier au moins un chantre dans chacune des églises paroissiales de la ville et de ses faubourgs.
• En 1790 celui de Saint-Pierre, l’une des paroisses du centre ville, est un prêtre habitué, Jean-Charles PORTIER. Arrêté comme réfractaire, il meurt en prison à Dijon. Cette église Saint-Pierre possède des orgues dont le titulaire en 1790 est l’Alsacien Jacques BRICKER. Ce sont ces orgues qu’avait touchées Anne CHAPUZOT avant son mariage en 1733 avec Edme LAUSSEROIS, et sans doute encore après ce mariage, potentiellement jusqu’au départ de la famille pour Dijon durant l’été 1743. Sa sœur Jeanne CHAPUZOT lui avait probablement succédé. On sait en tout cas qu’en décembre 1760 Jeanne avait signé une convention pour six ans avec la fabrique. Mais son service est brutalement interrompu par des dégâts importants causés par la foudre en juillet 1764. C’est alors que la fabrique remplace peu élégamment Jeanne Chapuzot par Bricker, qui promettait de réparer l’orgue à moindres frais, à condition d’obtenir le poste.
• Le chantre de la paroisse Saint-Martin est Jean GIBOULOT, dont la biographie a pu être reconstituée pratiquement sans lacune, ce qui est rare pour un chantre paroissial. Avant de venir exercer dans cette paroisse urbaine, il était en poste dans un village proche, où il s’était trouvé héros malgré lui d’un conflit autour du choix du maître d’école.
• À Saint-Nicolas le chantre et maître d’école est Bernard MALLARD, père. Avant de s’installer à Beaune il avait lui aussi exercé durant environ dix-huit ans dans un village, en Auxois.
• Quant au chantre du faubourg de la Madeleine, il se nomme Jacques SIROT. Dès le début de l’année 1791, il est évincé de son poste par Jean-Baptiste FOURCHOTTE, l’un des chantres de la collégiale, qui après la suppression du chapitre cherche à se placer dans une église paroissiale. On voit là une trace concrète des bouleversements opérés, dont les répercussions descendent en cascade dans l’échelle des musiques des églises.
• • • Tout au nord du département, Châtillon-sur-Seine, active petite ville du diocèse de Langres, comporte deux paroisses, Saint-Vorles et Saint-Jean. En 1682, les réjouissances organisées par la ville à l’occasion de la naissance du Duc de Bourgogne avaient eu les honneurs du Mercure galant. Outre « les Violons, Hautbois, Fifres, & Tambours » qui font danser « jusques à minuit », l’article évoque les « marques de joye que donnerent les Maisons Religieuses », et notamment chez les Dames Ursulines « un merveilleux Concert, où les Voix meslées avec les Instrumens, charmerent également tout le monde ». On ignore si un siècle plus tard de telles ressources musicales existaient encore dans la ville.
Les registres paroissiaux montrent que les chantres de chacune des églises collaboraient entre eux à l'occasion de certaines cérémonies. Antoine CHARLES, actif chantre de la paroisse Saint-Vorles en 1790, est aussi son recteur d’école depuis 1762. À Saint-Jean, c’est Joseph POILLIOT qui officie, depuis 1773, lorsqu’il a succédé à Simon SOULIER, qui avait lui-même succédé à Georges ODINOT en 1768.
Un organiste, Jean MIEL, est en poste à Saint-Vorles depuis 1756 environ. Ses 150 livres annuelles lui sont versées par la municipalité, autorisée du bout des lèvres par l’Intendant qui écrit en mars 1775 à propos du passage des honoraires de l’organiste de 50 à 150 livres : « C'est avec quelque peine que j'ay signé cette ordonnance. Il y a des choses plus nécessaires que celles de ce genre… ».
C’est probablement Jean MIEL qui a initié à l’orgue Sébastien JULLY (lequel, en 1790, est organiste de la cathédrale de Sens). Le père de ce dernier, Antoine JULLY, connu comme peintre tout au long de son existence, est tout à coup mentionné en tant que « organiste et peintre en cette ville » [de Châtillon] au hasard d’un acte paroissial daté du 12 juin 1790, ce qui ne laisse pas d’intriguer.
• • • Auxonne, à 32 km au sud-est de Dijon, est implantée « outre Saône », sur la rive gauche, ce qui la fait relever du diocèse de Besançon. Dès le XVe siècle, l’église paroissiale Notre-Dame d’Auxonne possédait des orgues, plusieurs fois remaniées. Depuis octobre 1784, l’organiste en est Pierre TERRIER, qui avait alors remplacé l’organiste précédent, François CHAMPY, mort après quarante ans de service. En 1789, les orgues sont reconstruites « à neuf » par le facteur François CALLINET qui, « après avoir fait la visite generalle de l'orgue actuelle », écrivait en octobre 1788 qu’il était « en majeure partie, réduit en pourriture et hors des proportions ». Durant la durée du chantier, l’organiste de la paroisse est envoyé à Beaune, à 55 km de là, pour se perfectionner auprès de l’organiste de la collégiale, Jean-Nicolas MORISSET.
Un intéressant programme daté du 6 thermidor de l’an III [24 juillet 1795] a été publié par P. M. Guéritey. Il montre que l’orgue remis à neuf est utilisé au sein des fêtes civiques : « Le cortège étant entré au temple, l’orgue commencera par l’ouverture de La Caravane […] L’orgue touchera La Bataille de Prague… »
• • • À 18 km en aval d’Auxonne, Saint-Jean-de-Losne est ancrée sur la rive droite de la Saône, donc dans le diocèse de Dijon. Cette petite ville a eu longtemps un rôle défensif à la frontière entre Bourgogne et Franche-Comté. Durant la Révolution, elle est du reste renommée « Belle-défense ». C’était aussi un centre administratif important. L’histoire de ses orgues a été scrutée de très près par Pierre Marie Guéritey (1990 et 2001). Dans l’histoire de la musique, la ville a acquis une certaine renommée indirecte pour avoir été le lieu d’exercice d’un frère du célèbre Claude Balbastre, lui aussi prénommé Claude, né en 1717. Ce Claude BALBASTRE aîné y est reçu organiste une première fois en 1731 mais ne donne pas suite. Puis, après une tentative avortée à Dijon, il revient à Saint-Jean-de-Losne et s’y établit solidement à partir de 1739, s’y mariant et y exerçant diverses activités commerciales et administratives. Le service de ses affaires le conduit à négliger celui des orgues, ce qu’aggravent ses nombreuses absences pour cause de voyage, notamment à Paris. En 1760, les échevins le remplacent, contre son gré, par le jeune Pierre BOILLAUD.
P. M. Guéritey a montré qu’en dehors de sa fonction d’organiste, et après en avoir été déchu, Claude BALBASTRE aîné avait largement contribué à animer la vie musicale de la petite ville, y apportant les modes parisiennes grâce aux relations qu’il entretenait avec son frère. En témoignent deux livres de musique datés tous deux de 1770, étudiés en 1987 par P. M. Guéritey et D. Paquette (voir bibliographie), où voisinent musique d’église (quelques pièces pour orgue de son frère) et musique de salon, « avec le clavecin, des chanteurs, quelques instruments et déjà le piano-forte » (P. M. Guéritey, 1990, p. 29).
En 1790, les orgues de Saint-Jean-de-Losne sont toujours aux mains de Pierre BOILLAUD, dont un frère est prêtre de la « familiarité » de l’église. Entretemps le vieil instrument de 1610 a été remplacé par un orgue neuf construit de 1765 à 1768 par le facteur Bénigne BOILLOT, qui se dit élève de Dom BEDOS et a été « aprenty » de Karl Joseph RIEPP autour de 1748. Ce « petit huit pieds » de deux claviers et pédale, pratiquement conservé dans son état d’origine, ainsi que son buffet de style rocaille, ont été classés MH en 1976.
• • • Seurre, un peu plus en aval sur la Saône, rive gauche, donc dans le diocèse de Besançon, est un port fluvial où les marchands sont nombreux. C’est aussi une ville où l’activité artisanale est prépondérante, étoffée dans tous les secteurs. L’église Saint-Martin de Seurre possédait un petit orgue qui est vendu en 1792 pour la faible somme de 397 livres, après que la fabrique ait fait l'acquisition (pour 2 136 livres) de l'orgue "à 26 jeux" de l'abbaye cistercienne de Maizières, située à environ 10 km de Seurre (en Saône-et-Loire). Son remontage est confié à Bénigne BOILLOT, facteur d'orgues à Dijon, dont c'est le dernier chantier connu (P.M. Guéritey, 2021).
Jusqu’en 1772 l'orgue de Seurre avait eu pour organiste Joseph TOURNEUR puis son fils François. On ignore actuellement qui le touchait à la veille de la Révolution, mais on sait qu’il – ou elle – recevait 150 livres par an (Chr. Lamarre, 1993, p. 282).
Le chant était assuré par les prêtres de la « familiarité ». Ce qui explique le refus sec opposé en mai 1792 à la demande municipale de récompenser un maître d’école nommé MARROT qui « fait assidûment l’office de chantre en ladite église depuis le 1er novembre 1791 ». Le refus est ainsi justifié : « attendu qu’il n’est point au pouvoir de l’administration d’entretenir un chantre dans une église où il n’en existoit point auparavant ».
• • • À Nuits, l’église paroissiale Saint-Symphorien est dotée d’orgues, contrairement à la collégiale Saint-Denis précédemment évoquée. Elles existent toujours aujourd’hui et viennent de faire l’objet d’une restauration en profondeur. Le splendide buffet a retrouvé sa polychromie d’origine. La date indiquée en bandeau sur la tribune « Fait / Laudate Dominum in Organo / en 1761 » correspond à la construction du buffet de l’orgue. L’instrument lui-même agrège des éléments de plusieurs périodes, y compris des tuyaux du tout début XVIIe siècle. La campagne de 1761 est due très probablement au facteur d’orgues Bénigne BOILLOT, originaire de Nuits. Installé à Dijon en 1765, il revient à Nuits en 1787-1789 pour de nouveaux travaux importants. Ce facteur était neveu de l’organiste Christine FRAILLERY, attestée à la tribune de Saint-Symphorien de Nuits au moins de 1717 à 1774. Lui succèdent plusieurs organistes beaucoup moins stables qu’elle : Pierre-Joseph BALAINNE, originaire du diocèse de Liège, son gendre Jean-Georges WALTER, puis Jean CHAUVENET à partir de la mi-mai 1789.
• • • La ville de Saulieu comporte une seule paroisse officielle, dite « paroisse de Saulieu » mais qui juxtapose curieusement deux structures paroissiales nettement discernables à travers le registre BMS pourtant commun. Chacune d’elle a son chantre, très présent aux cérémonies – mariages, et surtout sépultures. En 1790, le chantre de Saint-Nicolas de Saulieu est François CAUZARD, par ailleurs « huissier audiencier au bailliage ». Celui de Saint-Saturnin est Jean RENAUD, par ailleurs ouvrier drapier : il a pris en 1750 la succession de son père qui y chantait depuis 1710 au moins, soit plus de quatre-vingts années de service à eux deux.
À travers l’observation des liens qu’ils entretiennent entre eux ainsi qu’avec le corps de musique de la collégiale, on voit se dessiner les grands traits du réseau de sociabilité unissant ces familles qui, dans une petite ville, mettent le talent vocal de leurs hommes au service du chant d’Église.
• • • Deux petites villes de l'Auxois méritent une mention
Les églises paroissiales de Flavigny et de Vitteaux possèdent des orgues en activité en 1790, dont les organistes sont, comme dans six autres villes, payés sur les fonds municipaux. À Saint-Genest de Flavigny c’est toujours François LECLERC père qui les touche : âgé de 79 ans, et par ailleurs marchand épicier, il est en poste depuis plus de 55 ans ! À Saint-Germain de Vitteaux c’est au contraire une jeune femme, Huberte BIDAUT, qui est à la tribune depuis une dizaine d’années. Native du pays, elle avait été envoyée à l’âge de seize ans se former à Dijon auprès « des maîtres les meilleurs ».
• • • Dans les villages
Comme ailleurs en Bourgogne on retrouve ici le profil des maîtres d’école chantres de village. Les preuves de cette double activité sont fréquentes notamment dans la zone morvandelle du diocèse d’Autun, en prolongement de ce qui a été observé dans l’Yonne. Edme CUNAUT père, dans le bourg d’Époisses, en offre un bel exemple puisqu’il était lui même fils d’un sonneur, et que deux de ses fils, au moins, Edme fils et Lazare, sont devenus eux aussi chantres et recteurs d’école. De même Brice LAGNEAU, à Saint-Léger-de-Fourches (aujourd'hui Champeau-en-Morvan) est fils et frère de deux chantres maîtres d'école exerçant dans des villages proches. D’autres cas se sont révélés particulièrement intéressants, tel François CHARLES, à Saint-Martin-de-la-Mer, bien documenté, ou encore René CHATELAIN qui en l’an IV déclare « chanter les offices du culte » à la demande des habitants de Flagey, près de Nuits, qui n’ont pas de prêtre. Il est un exemple éloquent de ces maîtres d’école retrouvés en nombre par Xavier Bisaro, chantant des « messes blanches » sans prêtre, et que les autorités tentaient en vain de faire taire.
Parfois les traces initiales sont des plus ténues. La fabrique du village de Balot (diocèse de Langres) inscrit dans son budget 1790-1791 le prix de la chandelle nécessaire pour éclairer le chantre lors de la messe de minuit. Celui-ci a pu être identifié : il s’agit de François SOCQUARD, recteur d’école et chantre paroissial.
Les relevés de ces chantres de village restent largement tributaires du hasard des dépouillements. Dans leur cas, plus encore que pour les églises urbaines, il ne saurait être question d’exhaustivité, très loin de là.
• • •
Au terme de cette enquête, un rapide bilan permet de faire état de 130 musiciens et musiciennes en activité en 1790, qui sont accompagnés dans la base de données de plusieurs dizaines d'autres musiciens ou chantres ayant exercé peu avant dans les églises de l’actuelle Côte-d’Or.
Il faut signaler la présence dans ce corpus d’assez nombreuses femmes organistes qui en 1790 touchent – ou qui avaient touché antérieurement – les orgues d’églises paroissiales ou abbatiales. Certains conseils de fabrique leur sont peut-être plus favorables que d’autres. À Saint-Michel de Dijon, par exemple, trois des sept organistes connus au long du XVIIIe siècle sont des femmes (Anne FORTIER en 1713-1715, Jeanne MONGEOT de 1729 à 1744, Pétronille DOUBLET de 1745 à au moins 1754…), mais celui de 1790 est un homme (Louis CAMUS). Les femmes organistes de 1790 exercent à Dijon dans les églises paroissiales Notre-Dame (Antoinette DUPLUS-CAMUS), Saint-Nicolas (Anne LATREILLE-GELIN) et Saint-Pierre (Bernarde BOILLOT, à partir de juillet 1790), ainsi que chez les cordeliers (Anne TILLET). En dehors de Dijon, on rencontre deux autres musiciennes en activité, l’une chez les bernardines du Lieu-Dieu à Beaune (Thérèse BRENET), l’autre aux claviers de la paroisse de Vitteaux (Huberte BIDAUT). Quelques autres exerçaient ailleurs en toute discrétion, comme Jacquette LABOUREY et peut-être Pétronille DOUBLET-DELAHAYE, à des tribunes dijonnaises qui restent à éclairer.
Ces 130 musiciens et musiciennes de 1790 exercent dans un peu plus de cinquante lieux de musique différents, dont une cathédrale, une Sainte-Chapelle, huit collégiales, neuf abbayes ou couvents, un hôpital, les autres étant des paroisses, urbaines ou villageoises. À ces lieux documentés, il faut en ajouter sept (au moins) où une activité musicale – en général un orgue en état de fonctionner – est attestée, sans que ses acteurs 1790 soient identifiés.
Le recensement est à l’évidence incomplet. Plusieurs lieux de musique supposés manquent à l’appel comme les abbayes de Bèze ou de Flavigny, les actives petites villes de Montbard, Arnay-le-Duc, Pontailler ou Is-sur-Tille…
Pour éclairer ces points restés obscurs, l’équipe Muséfrem compte sur l’aide des chercheurs et des curieux de tous ordres qui pourraient avoir découvert des pièces manquantes à ce grand puzzle et seraient prêts à les partager. Que tous et toutes soient ici par avance remercié.e.s.
Sylvie GRANGER,
TEMOS-FRE 2015 (Le Mans-Université)
(octobre 2018)
Mise à jour : Sylvie GRANGER,
chercheuse associée au Laboratoire Temos (TEmps, MOnde, Sociétés) UMR 9016 CNRS,
(15 octobre 2021)
Le travail sur les musiciens de ce département a bénéficié des apports de nombreux contributeurs, notamment : Cyril Amado, David Audibert, Jean-Marc Baffert (†), Xavier Bisaro (†), Alain Blanchard, Édouard Bouyé, François Caillou, Michel Cuvelier, Bernard Dompnier, Thierry Favier, Pierre Marie Guéritey, Érik Kocevar, Isabelle Langlois, Germaine Lemétayer, Christophe Maillard, Jean-Marie Meillier, Michel Meunier, Frédéric Pige, Jean-Pierre Roze…
Ainsi que les étudiants de L3 Histoire 2015-2016 de l’Université du Mans qui ont travaillé sur les contrats de mariage des musiciens dijonnais :
Erwan Aidat, Hélène Baudrier, Marion Berthelot, Alexandrine Charles, Quentin Closset, Robin Cosson, Camille Coutelle, Romain David, Rayan Diomi Vita, Wissam Ghemame, Alexis Goëthal, Jason Héricher, Emma Jarri, Arthur Laenger, Stéphanie Mariette, Gwendoline Morel, Marion Moulin, Laura Rosier, Florian Runger, Valentin Tréhoux.
Sans oublier l’équipe Patrimoine musical Bourguignon qui avait effectué le premier dépouillement des registres capitulaires de Beaune.
Mise en page et en ligne : Sylvie Lonchampt et Agnès Delalondre (CMBV)
Cartographie : Isabelle Langlois (CHEC, Université Clermont-Auvergne)
Merci à toutes et tous,
et tout particulièrement à Michel Meunier.
>>> Si vous disposez de documents ou d’informations permettant de compléter la connaissance des musiciens anciens de ce département, vous pouvez signaler tout élément intéressant ICI. Nous vous en remercions à l’avance.
L’amélioration permanente de cette base de données bénéficiera à tous.
Les lieux de musique d'Église actifs en 1790 en Côte-d'Or
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Diocèse de Besançon
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Diocèse de Langres
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Pour en savoir plus : indications bibliographiques
Sources imprimées
- Claude COURTÉPÉE et Edme BÉGUILLET, Description générale et particulière du duché de Bourgogne : Bailliages de Dijon, Beaune, Nuits, Auxonne, Saint-Jean-de-Losne, et Autun, 1780 (réédité avec préface et notes de Pierre Gras et Jean Richard en 1967-1968).
- Annonces et Affiches, Dijon, Borget et Causse, février 1770-janvier 1771.
- Affiches, annonces et avis divers de Bourgogne…, Dijon, 1776-1779.
- Affiches, annonces et avis divers de Dijon ou Journal de la Bourgogne, Dijon, 1783-1794.
- Almanach de la Province de Bourgogne, 1788.
- « Journal d’un professeur à l’université de Dijon (1742-1774). Mercure dijonnois (1748-1789) », Mémoires de l’Académie des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Dijon, 3ème série, t. IX, 1885-1886, p. 1-357.
Bibliographie
• • • Sur l’histoire de la Côte-d’Or et de ses villes
- Jules d'ARBAUMONT, « Notice historique sur la chapelle et l’hôpital aux Riches », Mémoires de la commission des antiquités du département de la Côte d'Or, t. 7, 1865-1868, p. 61-204.
- Dominique DINET, Religion et Société : Les Réguliers et la vie régionale dans les diocèses d’Auxerre, Langres et Dijon (fin XVIe-fin XVIIIe siècle), Paris, PU Sorbonne, 1999, 2 vol., 950 p.
- Sylvie DUBOIS, Métiers d’art et société au XVIIIe siècle, L’exemple de Dijon, Dijon, Éditions Universitaires de Dijon, 2011, 260 p.
- Benoit GARNOT, Vivre en Bourgogne au XVIIIe siècle, Dijon, Éditions Universitaires de Dijon, 1996, 352 p. [à signaler : « Fêtes et spectacles », p. 303 à 312).
- Pierre GRAS (dir.), Histoire de Dijon, Toulouse, Privat, [1ère éd. 1981], 1987, 432 p.
- Christine LAMARRE, Petites villes et fait urbain en France au XVIIIe siècle, Le cas bourguignon, Dijon, Éditions Universitaires de Dijon, 1993, 638 p.
- Christine LAMARRE et Franck LAIDIE (dir.), Réjouissances citoyennes en Côte-d'Or, Cahier du Comité départemental pour l'histoire de la Révolution en Côte-d'Or, nouvelle série, n°1, Dijon, Ad de la Côte-d'Or, 2005, 96 p.
- Christine LAMARRE et Claude FARENC (dir.), Citoyennes et citoyens de Côte-d’Or en Révolution, Cahier du Comité départemental pour l'histoire de la Révolution en Côte-d'Or, nouvelle série, n°3, Dijon, Ad de la Côte-d'Or, 2010, 252 p.
- Christine LAMARRE, Claude FARENC et Franck LAIDIE (dir.), Religion et Révolution en Côte-d'Or, Cahier du Comité départemental pour l'histoire de la Révolution en Côte-d'Or, nouvelle série, n°4, Dijon, Ad de la Côte-d'Or, 2012, 334 p.
- Pierre LÉVÊQUE (dir.), La Côte-d’Or, de la préhistoire à nos jours, Saint-Jean-d’Angély, Bordessoules, 1996, 476 p.
- Daniel-Paul LOBREAU, Chers Frères et Bons Cousins : Franc-Maçonnerie & Sociétés Secrètes à Beaune et en Bourgogne (1760-1940), Paris, Lodi, 1981, 300 p.
- Pierre PALAU, Histoire du département de la Côte-d’Or, Dijon, Darantière, 1978, 268 p.
- Jean RICHARD (dir.), Histoire de la Bourgogne, Toulouse, Privat, 1988, 492 p.
- Jean-Pierre ROZE, L'abbaye Saint-Bénigne de Dijon ; et Saint-Bénigne de Dijon depuis la Révolution, PU de Dijon, Dijon, 2014 et 2016.
- Pierre de SAINT-JACOB, « Le réseau routier bourguignon au XVIIIe siècle », Annales de Bourgogne, t. 28, 1956, p. 253-263.
- Vincent TABBAGH, « Les collégiales de Bourgogne au Moyen Âge. Quelques résultats d’un programme de recherches », Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA [En ligne], 12 | 2008, mis en ligne le 1er juillet 2008 - URL : http://cem.revues.org/6842 ; DOI : 10.4000/cem.6842
- Éric WENZEL, « Un Prêtre de la Réforme catholique : Louis Carrelet, curé de Notre-Dame de Dijon de 1732 à 1781 », Annales de Bourgogne, n°68, 1996, p. 57-68.
• • • Sur musique et musiciens en Côte-d’Or
>>> François LESURE, Dictionnaire musical des villes de province, Paris, Klinksieck, 1999, 367 pages. [sur Dijon : p. 143-148; sur Beaune : p. 85-86 ].
- Charles AUBERTIN, Quelques renseignements sur la musique & les musiciens à Beaune, Beaune, imprimerie Arthur Batault, 1891, 186 p.
- Jean-Marc BAFFERT, « L’Orgue de Notre-Dame de Semur-en-Auxois », Connaissance de l'Orgue, n°75-76, 1990 et n°81, 1992.
- Émile BERGERET, « La Musique à Nuits », Mémoires de la Société d'archéologie de Beaune, histoire, lettres, sciences et arts, 1906-1907, p. 1-25.
- Nathalie BERTON-BLIVET, « Hommage de l'élève au maître. Que nous enseignent les motets de Joseph Michel refondus par Pierre-Louis Pollio ? », Musiques en liberté, Entre la cour et les provinces au temps des Bourbons, volume publié en hommage à Jean Duron, textes réunis par B.Dompnier, C. Massip et S. Serre, Paris, École des Chartes, 2018, p.237-357.
- Charles BIGARNE, « La Musique à Notre-Dame de Beaune », Mémoires de la SHAB, t. 3, Beaune, Batault-Morot, 1878, p. 79-108.
- Xavier BISARO, Chanter toujours, Plain-chant et religion villageoise dans la France moderne (XVIe-XIXe siècle), PUR, 2010, 246 p.
- Francis CLAUDON (dir.), Itinéraires mozartiens en Bourgogne, Paris, Klincksieck, 1992, 256 p.
- Joseph DIETSCH, L’Institut de musique, Premier conservatoire de Dijon, 1793-1796, Dijon, Lamarche, 1884, 64 p.
- Joseph DIETSCH, « Souvenirs de la Sainte Chapelle du Roy », Bulletin d’histoire et d’archéologie religieuses du diocèse de Dijon, 1884, p. 31-36 et 76-81 (suivi d’un court article sur Pierre Desvignes, p. 81-84).
- Bernard DOMPNIER, « Structure et pratique musicales des Saintes Chapelles en France au XVIIIe siècle », M.-B. Bouvet et H. Say (dir.), Les chapelles royales. De la gloire de Dieu à la gloire du prince, Paris, CTHS, 2015, p. 149-158.
- Joëlle-Elmyre DOUSSOT, Musique et société à Dijon au Siècle des Lumières, Thèse Doctorat, Université de Bourgogne, 1992, 2 vol., 471 p. et 325 p.
- Joëlle-Elmyre DOUSSOT, Musique et société à Dijon au siècle des Lumières, Paris, H. Champion, 1999, 237 p.
- Joëlle-Elmyre DOUSSOT, « Le panthéon dijonnais au 18e siècle », La Bourgogne & ses musiciens, 2003, p. 55-73.
- Thierry FAVIER, « Une messe en ariettes jouée à la Sainte-Chapelle de Dijon en 1772 : enjeux stylistiques, éthiques et politiques d’un scandale de province », B. Dompnier (dir.) Maîtrises & chapelles aux XVIIe et XVIIIe siècles, Des institutions musicales au service de Dieu, Clermont, PU Blaise-Pascal, 2003, p. 247-270.
- Thierry FAVIER, « Concert et espace musical en province : Lyon et Dijon au XVIIIe siècle », Espaces et lieux de concert en Europe, 1700-1920, H-E Bödecker, P. Veit et M. Werner (dir.), Berlin, Berliner-Wissenschafts-Verlag, 2008, p. 147-182.
- Annick FIASCHI-DUBOIS (dir.), La Bourgogne & ses musiciens, Dijon, L’Échelle de Jacob, 2003, 204 p.
- Eugène FYOT, « La maîtrise de la Sainte-Chapelle à Dijon », La Revue de Bourgogne, VIII/1, janvier-février 1920, p. 36-52.
- Jacques GARDIEN, L’Orgue et les organistes en Bourgogne et Franche-Comté au XVIIIe siècle, Paris, Droz, 1943, 577 p.
- Sylvie GRANGER, « En solo plus souvent qu’en duo : les femmes organistes de 1790 », C. Giron-Panel, S. Granger, B. Porot et R. Legrand (dir.), Musiciennes en duo, Mères, filles, sœurs ou compagnes d’artistes, préface de Michelle Perrot, Rennes, PUR, 2015, 256 pages, p. 177 à 189 [plusieurs exemples bourguignons].
- Sylvie GRANGER, « Muséfrem : une base de données sur les musiciens anciens où la Bourgogne est aux avant-postes », Annales de Bourgogne, t. 89-1, n°353, janvier-mars 2017, p. 63-77.
- Pierre Marie GUÉRITEY, Karl-Joseph Riepp et l’orgue de Dole, Thèse de Musicologie, D. Paquette (dir.), Université Lyon II, 1985, Bron, Ferréol, 1985, 2 vol., 649 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY et Daniel PAQUETTE, « Étude de deux manuscrits de Mr Balbastre de Saint Jean de Losne, 1770 », Revue internationale de musique française, n°23, juin 1987, p. 99-126.
- Pierre Marie GUÉRITEY, « L’orgue de l'ancienne collégiale Notre-Dame de Beaune, (1428-1988) », L'orgue de la Basilique Notre Dame de Beaune, Beaune, Amis de l'orgue, 1988, p. 15-29.
- Pierre Marie GUÉRITEY, Saint-Jean-de-Losne, L’église Saint-Jean-Baptiste et son orgue, 1990, 40 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY, Le Grand orgue de la cathédrale Saint-Bénigne de Dijon, 1745-1995, introd. J.-F. Bazin, Dijon, EuroMuses/ Les Amis de l’Orgue de la Cathédrale, 1996, V, 158 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY, « L'orgue dans l'église Notre-Dame d’Auxonne au XVIIIe siècle », J.-M. Baffert et P. M. Guéritey (dir.), L’Orgue ‘François Callinet 1789’, Auxonne, église Notre-Dame, Auxonne, Les Heures musicales en Auxonnois, 1999, 44 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY et alii, Autour de François Callinet, Fédération des Orgues de Côte d’Or, 2000, Dijon, 91 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY, « L’orgue de Saint-Jean-de-Losne, nouveaux documents sur sa construction, ses modifications et le décor baroque de l’église », L’orgue francophone, n°29-30, FFAO, 2001, p. 59-93.
- Pierre Marie GUÉRITEY, Les Orgues de Beaune, Beaune, Association Les orgues de Beaune, 2002, 22 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY, Orgues en Bourgogne, 20ème Congrès de la Fédération francophone des Amis des Orgues, 2003, 256 p.
- Pierre Marie GUÉRITEY, « Les orgues et la musique dans les églises de la Côte-d’Or pendant la Révolution française », Religion et Révolution en Côte-d'Or, op. cit. ci-dessus, 2012, p. 271-285.
- Pierre Marie GUÉRITEY, Bénigne Boillot (1725-1795) facteur d'orgues, L’orgue et les organistes, 1591-1798, chez l’auteur à Saint-Jean-de-Losne, 2021, 502 p.
- Érik KOCEVAR, « Les servitudes des organistes de l'église Notre-Dame de Dijon au XVIIIe siècle », L’Orgue : Des servitudes des organistes aux XVIIIe et XXe siècles, n°252, 4e trimestre 1999, p. 3-84.
- Bernard POULAIN, Les Orgues d’Avallon : avant et après la Révolution ; Paul Chazelle facteur d’orgues à Avallon, Orgues en Avallonnais et Amis du vieil Avallon, 2009, 103 p.
- Clothilde TREHOREL, « Le théâtre de Dijon : artistes et spectacles entre 1789 et 1810 », Ph. Bourdin et G. Loubinoux, Les arts de la scène et la Révolution française, Clermont-Ferrand, PUBP, 2004, p. 163-179.
- Paul VINCENEUX, « Notes sur l'histoire de la maîtrise de la collégiale N.-D. de Beaune », Mémoires de la Société d'archéologie et de littérature de Beaune, n°51, 1961, p. 5-46.
En ligne :
- Sur Dijon : http://www.dijonavant.com/
- Sur le facteur d’orgue Riepp et autres histoires d’orgues de Dijon ou des alentours… : http://karljosefriepp.blogspot.fr
Bibliographie élaborée par Sylvie Granger
(septembre 2018)
Mise à jour : 21 octobre 2021