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LESUEUR, Jean François (1760-1837)
État civil
NOM : LESUEUR     Prénom(s) : Jean François     Sexe : M
Autre(s) forme(s) du nom : LE SUEUR
SUEUR
Date(s) : 1760-2-15  / 1837-10-6
Notes biographiques

Formé à la collégiale d'Abbeville puis à la cathédrale d'Amiens, Jean-François LESUEUR (1760-1837) entame très jeune une carrière de maître de musique en diverses villes de province (Sées, Dijon, Le Mans, Tours). Recruté en 1786 par le chapitre de la cathédrale Notre-Dame de Paris, il séduit les mélomanes de la capitale mais s'attire l'hostilité des chanoines les plus conservateurs, rebutés par son goût jugé immodéré pour la musique à grand orchestre. Après son renvoi en 1787, il s'oriente vers la scène lyrique et connaît le succès avec les opéras La Caverne et Ossian ou Les Bardes. Il revient à la musique d'Église en 1804, lorsqu'il succède à Paisiello comme directeur de la Musique de la Chapelle impériale. Au début du règne de Louis XVIII, il obtient le poste de surintendant de la Musique du roi. Parallèlement, il enseigne la composition au Conservatoire, où il a notamment pour élèves Berlioz et Gounod. Il peut sans conteste être considéré comme l'un des plus grands compositeurs français de l'époque classique.

• 15 février 1760, Drucat [Somme] : Jean-François LESUEUR est baptisé paroisse Saint-Martin. Il est le fils de Jean-François Sueur et de Marie-Jeanne Duchaussoy ; son parrain est Louis Le Clerc, sa marraine Cécile Platel, qui signent tous les deux. Le mémoire de 1802 indique qu'il serait "né d'un simple cultivateur" (d'un "pauvre paysan", d'après son camarade René TIRON), ce qui ne paraît guère compatible avec ce qu'avance Hector Berlioz selon lequel il était issu "d'une ancienne famille du comté de Ponthieu, dont plusieurs membres ont rempli avec distinction divers emplois dans le militaire, la robe, le sacerdoce, les lettres et les arts". On peut faire l'hypothèse que son condisciple a moins enjolivé la réalité que ne le fera le disciple.

• [Vers 1767], Abbeville [Somme] : Le jeune LESUEUR, doté de "dispositions évidentes pour la musique [qui] se manifestèrent en lui dès l'âge le plus tendre" (Berlioz), est reçu enfant de chœur à la collégiale Saint-Vulfran grâce à M. Descaule, receveur du domaine du Ponthieu (patron de son père) et à l’abbé Duponchel, curé de Drucat.

• 1770, Amiens : Jean-François LESUEUR poursuit son apprentissage à la cathédrale sous la houlette du maître de musique Dominique LEUDER. René TIRON raconte : "Comme il était doué de la plus belle voix de soprano que j’aie jamais entendue, son père l’enleva aux chanoines de Saint-Vulfran, et l’alla présenter à ceux de la cathédrale d’Amiens, qui s’empressèrent de l’admettre au nombre de leurs enfans de chœur". Il y était depuis moins d’un an lorsque TIRON, qui devint son ami, fut reçu (1771). "Son père, en le plaçant à Amiens, avait lui-même quitté son village, où rien ne le retenait, et était venu vivre de son industrie dans la ville où demeurait son fils", ajoute-t-il. Ici on peut s'interroger sur le type d'"industrie" qui pouvait être pratiquée par l'ex "pauvre paysan" et soupçonner TIRON d'une légère contradiction.

• 1770-1776, Amiens : "Nos journées étaient partagées entre l’étude de la musique et celle du latin. Notre maître de musique demeurait avec nous, et un prêtre de la ville venait nous donner l’après-midi des leçons de latin" (René TIRON). LESUEUR montre au départ un goût égal pour les lettres et les études musicales, rapporte TIRON, qui démystifie le personnage, ce qui ne l'empêche pas de l'admirer : "Le Sueur, dans sa première enfance, ressemblait à tous les enfans de cet âge, jouant comme eux avec des hannetons, des cerfs-volants et des oiseaux […]. Il y avait même quelques-uns de nos confrères qui annonçaient plus de talent que lui, et qui cependant sont restés dans l’ombre". Assez vite, il se distingue par sa puissance de travail hors norme, allant jusqu'à lire des partitions pendant des heures la nuit, à la lueur d'une bougie.

• 7 août 1776, Amiens : "MM. ayants égard à la requeste verbale de Me le Sueur, petit vicaire de leur église, luy ont permis de faire chanter en leur église le jour de la fête prochaine de l’Assomption, et qu’en leur maîtrise il y prenne le lait d’ânesse pour le rétablissement de sa santé". René TIRON rapporte que ses soucis étaient dus au surmenage.
• 16 août 1776, Amiens : MM. ont accordé à maître LESUEUR, petit vicaire sur le point de sortir de la maîtrise, sur sa requête verbale, les gratifications ordinaires. On lui accorde 24 livres pour avoir fait chanter le jour de l’Assomption.
• 2 octobre 1776, Amiens : "MM. ayant égard à la requette de Me Le Sueur, petit vicaire de leur église sortant de leur maîtrise, luy ont accordé la totalité de la somme destinée pour les habillemens et qu’on accorde ordinairement aux petits vicaires qui ont servi pendant dix années, et seulement portion de la gratification ordinaire en argent, au prorata du temps qu’il a demeuré en leur maîtrise".
• [octobre 1776-juillet 1777], Amiens : Il poursuit ses études au collège de la ville. 
• 30 juillet 1777, Amiens : "MM. ayant égard à la requête verbale de Me Lesueur, ancien petit vicaire de leur église, à la veille d’être maître de musique à Sées, luy ont accordé 150 l., et ont priés [sic] M. le grenetier de luy payer pour luy tenir lieu des muids de bled de gratification qui peuvent luy revenir". 

• [vers août 1777 - vers février 1778], Sées [Orne] : Jean-François LESUEUR est maître de musique de la cathédrale, un "théâtre peu digne d’un jeune homme qui aspirait à une grande célébrité musicale", note TIRON. Il ne reste à ce poste que six mois.

• [vers février 1778 - début 1779], Paris : Il est sous-maître de musique de l'église paroissiale des Saints-Innocents, sous l'autorité de l'abbé Nicolas ROZE, avec lequel il complète sa formation.

• Entre février et mai 1779, Dijon : Jean-François LESUEUR devient maître de musique de la cathédrale Saint-Étienne. Il succède à Jean-Baptiste CÉZARD, qui a été nommé maître à Langres le 25 janvier 1779. Et, le 8 juin de la même année, c'est LESUEUR qui est rémunéré pour la "musique extraordinaire du jour St Médard", fête patronale de la paroisse Saint-Médard dont la musique est toujours confiée au maître de la cathédrale. Il a donc pris son poste à Saint-Étienne entre ces deux dates.
À la cathédrale Saint-Étienne, il a sous sa direction une dizaine de musiciens et six enfants de chœur, parmi lesquels Pierre Louis Augustin DESVIGNES. Vingt ans plus tard, LESUEUR raconte : "Pendant l'espace de trois années qu'il occupa ce poste, il y fut singulièrement accueilli et encouragé par M. de Vogué, évêque de Dijon, amateur passionné de l'art musical ; par M. de Vergennes, alors ambassadeur de France, près la république de Venise, et qui passait habituellement une partie de l'année à Dijon ; par M. Latour-du-Pin, gouverneur de Dijon ; par M. de Surget, conseiller au parlement de la même ville, qui avait une bibliothèque enrichie de toutes les partitions de nos grands maîtres italiens, allemands et français ; par M. de Montigny, trésorier des états de Bourgogne, et par beaucoup d'autres personnages distingués" (mémoire de 1802).

• 23 octobre 1780, Abbeville : Sa mère Marie-Jeanne Duchaussoy décède.

• 21 mars 1782, Paris : Le Beatus vir que LESUEUR vient de composer est interprété au Concert spirituel par mademoiselle Gazet, Legros et Chéron. La presse parisienne n'est pour l'heure guère enthousiaste. 
• 5 avril 1782, Paris : Au Concert spirituel, son Magnificat est chanté par madame Saint-Huberti et François LAŸS, de l'Académie royale de Musique. Par la suite, il fera encore entendre ses compositions à quinze reprises dans ce cadre prestigieux.
À Dijon, LESUEUR parti est brièvement remplacé par Sébastien MALLOGÉ, qui assure un intérim avant la nomination de François COUET.

• 12 mai 1782, Le Mans : Jean-François LESUEUR est nommé maître de musique de la cathédrale Saint-Julien. Pour lui faire place, le chapitre rétrograde René LEMERCIER, qui exerçait les fonctions de maître depuis 1773, au rang de simple serpent. Puis, pour satisfaire ses exigences, car "il se plaignoit qu’il n’y avoit point de Musiciens pour rendre sa Musique", selon ce que rapporte le chanoine Nepveu de La Manouillère dans son journal, le chapitre engage trois chanteurs en quinze jours : Jean BARILLET, Guillaume COURIOT et une taille qui n'est pas formellement identifiée. Au même moment, le vieux serpent Pierre ÉLIE est remplacé par le Picard Antoine-Firmin DURAND.
Mais au bout de six mois, le jeune maître est déjà sur le départ.

• 26 décembre 1782, Tours : Les chanoines de la collégiale Saint-Martin réunis "en galerie" à l'issue de la messe canoniale demandent à leur procureur général de faire venir du Mans ce musicien qui a postulé par courrier au poste de maître de psallette; il devra faire entendre sa musique. Par ailleurs, les chanoines écrivent à leur ancien maître Adrien Quentin BUÉE alors à Paris, afin qu'il se renseigne sur ses mœurs et qualités.
• 30 décembre 1782 : Après avoir présenté ses certificats de vie et mœurs "et scientia musicali", il est reçu aux conditions habituelles par le chapitre réuni en galerie après la grand messe [où il est fort possible qu'il ait dirigé la musique de sa composition]. "Le chapitre du Mans, jaloux de conserver Lesueur, lui offrit une augmentation considérable d'émolumens, et les mêmes avantages que ceux qui lui étaient promis à Tours. Lesueur préféra la maîtrise de Tours parce qu'elle conduisait plus directement à celle de Paris. Il porta encore dans cette nouvelle place les certificats les plus flatteurs sur sa moralité, sa conduite et son amour pour le travail" (mémoire de 1802).

• 16 janvier 1783, Tours : Le procureur général de la collégiale Saint-Martin est chargé de lui écrire afin qu'il fasse venir deux musiciens en vue d'être auditionnés.
• 21 janvier 1783, Tours : LESUEUR est toujours au Mans et sur le point de partir prendre son poste à Tours quand on lui écrit de Saint-Martin de Tours pour lui demander de faire venir plutôt des basses-contre.
• Fin janvier 1783, Le Mans : Après avoir organisé un concours de composition auquel participent Nicolas SAVART et Bernard JUMENTIER, LESUEUR quitte  la cathédrale Saint-Julien. Il est remplacé au Mans par François MARC, classé premier au concours.
• 4 février 1783, Tours : Le chapitre de Sait-Martin consent à augmenter ses gages de 400 livres par an en raison de la cherté des vivres.
• 6 février 1783, Tours : Il est reçu "aux draps" et installé dans le chœur, on lui verse 48 livres de frais de voyage.
• 4 mars 1783, Tours : Les intendants de la psallette sont chargés de lui rappeler qu'il doit s'occuper de faire lire et transcrire la musique aux enfants de chœur qui sont sous sa responsabilité. Il lui est demandé de ne pas garder à la psallette au-delà des fêtes de Pâques prochaines le jeune musicien DESVIGNES, son ancien élève à Dijon qu'il a fait venir en Touraine et qui loge depuis son arrivée auprès de lui.
• 11 mars 1783, Tours : Le fabricier lui rembourse la somme de 129 livres avancée pour acheter une contrebasse, sans doute celle qui servira à l'usage de DESVIGNES.
• 22 mars 1783, Tours : Les intendants de la psallette sont chargés d'enquêter sur les négligences rapportées au chapitre dans le service des maître de psallette et maître de grammaire.
• 24 mars 1783, Tours : Ils doivent également consulter les statuts de la psallette afin d'établir et définir une liste des devoirs que le maître de psallette et du maître de grammaire doivent remplir.
• 3 mai 1783, Tours : Les statuts de la psallette adoptés par le chapitre le 5 janvier 1726 sont lus à haute voix à nouveau, approuvés et confirmés ; on ordonne au maître de musique, au maître de grammaire et aux enfants de chœur de les observer et respecter.
• 30 mai 1783, Tours : À la suite du rapport fait au chapitre par le procureur général du défaut de chant en musique à la fête de la subvention de saint Martin, et en prévision de la prochaine fête de l'Ascension, la compagnie met en demeure le maître de musique de composer une musique en rapport avec la dignité de l'office divin, plus particulièrement un Domine Salvum fac Regem qui sera chanté à la grand-messe.
• 10 juillet 1783, Tours : On verse à LESUEUR 96 livres pour dépenses liées aux musiciens externes engagés pour la saint Martin d'été. Il reçoit 64 livres 6 sols 6 deniers pour le remboursement de plusieurs dépenses au titre de la psallette. Il est cité à comparaître à la barre capitulaire à la demande du procureur général suite à de nombreux avertissements.
• 24 juillet 1783, Tours : LESUEUR comparaît devant le chapitre présidé par le chantre Gasnier. Il lui est reproché de ne pas respecter les statuts de la psallette, de ne pas être assidu au service divin, de ne pas faire preuve de révérence et soumission envers la compagnie, de ne pas bien tenir les enfants au chœur, et de composer une musique inadéquate au lieu saint et aux sacrés mystères.
• 14 août 1783, Besançon [Doubs] : Il est lu en chapitre la lettre écrite par Mr LESUEUR, maître de musique de l’Église Saint-Martin de Tours aux chanoines de la cathédrale de Besançon dans laquelle il semble se proposer pour le poste de maître de musique de cette église; la compagnie désigne son procureur général afin de lui répondre et lui apporter toutes les informations utiles à cet effet. Il est probable que le procureur va écrire à LESUEUR qu'il arrive trop tard, à quelques jours près : après un semestre de recherche et après avoir écarté de nombreuses candidatures, le chapitre bisontin a en effet choisi Louis-Nicolas DOLLÉ auquel, le 2 août 1783, il a écrit de venir à Besançon dès que possible.
• 23 août 1783, Tours : LESUEUR est à nouveau rappelé à l'ordre quant à la bonne observation des statuts de la psallette.
• 4 septembre 1783, Tours : Les maîtres de la psallette sont enjoints de mieux surveiller les enfants de chœur qui ne sont pas correctement assis dans le chœur et récitent mal plusieurs parties de l'office divin.
• 15 novembre 1783, Tours : On verse 96 livres à LESUEUR pour dépenses liées aux musiciens externes engagés pour la saint Martin d'hiver.

• [1783-1784], Tours : Une collaboration fructueuse s'établit entre LESUEUR et l'organiste de Saint-Martin Jean-Baptiste ALLAIN-DUPRÉ : "Le célèbre LESUEUR, qui n'avait guère que vingt ans, y fut appelé pour la diriger en qualité de maître de chapelle. Le sévère Dupré rendit à ce jeune compositeur la justice qu'il méritait, et lui faisant l'honneur de reprendre quelquefois le sujet de ses fugues qu'il traitait de telle manière, que j'ai entendu Lesueur dire bien longtemps après, lorsqu'il dirigeait le Conservatoire de Paris, que ses fugues remaniées par Dupré lui faisaient venir la chair de poule. J'entends encore ces deux grands maîtres, lors du Regina solennel que Lesueur fit exécuter, une veille de Pâques [1783], dans le jubé de l'antique basilique" (Michel BOYER).

• 24 janvier 1784, Tours : Le chapitre verse 96 livres à LESUEUR pour les dépenses liées au dernier Te Deum.
• 8 février 1784, Tours : En raison des nombreux avertissements portés à l'encontre du maître de musique à cause de son manque d'observation des statuts de la psallette et de ses mauvaises fréquentations, le chapitre décide de le citer en chapitre le mardi 10 afin d'y être admonesté et rappelé à l'ordre.
• 28 février 1784, Tours : LESUEUR est démis de ses fonctions après avoir quitté subitement la ville la veille sans avertissement. Les intendants de la psallette sont chargés de faire faire l'inventaire de cette dernière par le bailli du cloître afin de voir ce que le fugitif a laissé derrière lui (notamment une dette de 220 livres pour bois de chauffage). L’intérim de la direction de la psallette sera assuré par PAPIN, chanoine semi-prébendé.
• 5 mars 1784, Orléans : Les Affiches de l'Orléanois annoncent pour le lendemain, samedi 6 mars, un grand concert, donné "au profit de M. l’Abbé le Sueur, Maître de Musique de St. Martin-de-Tours" et, peut-on supposer, sous sa direction. Il aura lieu "à la Salle ordinaire, rue de l’Évêché". Entre Tours et Paris LESUEUR a donc suivi la Loire et est passé par Orléans.
• 10 mars 1784, Paris : Jean-François LESUEUR, "dont les talents et les mœurs sont généralement connus", est nommé à l'unanimité maître de musique de la paroisse des Saints-Innocents, aux mêmes clauses, conditions et rétribution que son prédécesseur MEUNIER D'HAUDIMONT. Le nouveau maître écrit : "Sensible à l’honneur de cette nomination, j’accepte le contenu" [de la délibération], puis il signe.
• 18 mars 1784, Tours : Julien Élie LEROY lui succède au poste de maître de psallette de la collégiale Saint-Martin.
• 27 mars, Tours : Un mémoire récapitule les dépenses alimentaires engagées par l'ancien maître de psallette ainsi que l'ensemble des fournisseurs [pas joint au registre] qui s'élève à la somme de 647 livres 15 sols. Le 30, un autre mémoire établit à la somme de 78 livres 6 sols le montant des victuailles et ustensiles abandonnés par LE SUEUR lors de son départ précipité. Elle servira à compenser un peu le montant des dettes établies par le mémoire précédent.
• 20 mai 1784, Paris : Son motet à grand chœur Super flumina, interprété au Concert spirituel par Chéron, Rousseau et MURGEON, séduit le Journal de Paris : "Ce très jeune compositeur donne des espérances ; ses motifs sont bien suivis et sa composition fort sage" (12 juin). Le Mercure de France évoque de son côté "un chant aimable, une harmonie pure et un style clair et concis".

• 1784-1785, Paris : Alors qu'il est maître de musique de la paroisse des Saints-Innocents, LESUEUR commence à composer son opéra Télémaque, sur un livret de Dercy (ou d'Hersy), qui tente vainement de le convaincre de travailler exclusivement au théâtre. "Ce fut pendant le cours de son exercice dans cette église, que Lesueur se livra tout entier à l'étude de l'art dramatique, et qu'il eut le bonheur de se lier avec Sacchini. Ce célèbre compositeur eut la bonté de s'offrir à Lesueur pour examiner et corriger sa musique théâtrale. Il revoyait ses duos, ses trios, et ses morceaux d'ensemble. Il lui indiquait ce qui rendait une phrase de mélodie élégante ou commune, ce qu'il fallait faire pour que le lit harmonique dans lequel devait couler toute la mélodie d'un morceau, ne présentât rien de raboteux" (mémoire de 1802).

• 3 mars 1785, Paris : La fabrique des Saints-Innocents décide de lui verser une gratification annuelle de 200 livres, à compter du jour de son entrée. 
• 22 mars 1785, Paris : Au Concert spirituel, LESUEUR fait exécuter une Ode sacrée, sur des paroles de J.-B. Rousseau, avec pour interprètes Rousseau, LAŸS et Chéron. Le Journal de Paris du 24 mars est élogieux : "Lesueur qui s’était déjà fait connaître très avantageusement par une messe et surtout par un Stabat exécutés aux Innocents en décembre dernier (…) a montré le plus grand talent dans l’ode de Rousseau. Plusieurs morceaux, entre autre celui de M. Laïs ont excité le plus grand enthousiasme. On a trouvé l’harmonie pure, la composition riche et neuve, beaucoup d’expression et une grande énergie. On regrette que l’état de Monsieur l’abbé Le Sueur ne lui permette pas de travailler pour le théâtre ; on pourrait lui promettre le succès le plus décidé : nous l’exhortons cependant à ne pas se laisser trop emporter par le feu de son génie, à consulter toujours la véritable expression des paroles et à resserrer un peu plus ses idées dont l’extension nuit souvent à l’effet de ce qu’il a voulu exprimer". Le Mercure de France n'est pas en reste : "Son chant est agréable et plein d’expression, son harmonie pure et son orchestre surtout fort brillant. On paraît s’accorder à regarder M. l’abbé Lesueur comme l’un de nos jeunes compositeurs dont on doit attendre le plus".

• 12 juillet 1785, Tours : Le chapitre de Saint-Martin demande à son commissaire à Paris, le chanoine Delavau, de régler la question de la dette que LESUEUR a contractée auprès de la fabrique.

• 27 janvier 1786, Paris : Le conseil de fabrique des Saints-Innocents arrête unanimement que l'abbé (il a donc pris le petit collet) Jean-François LESUEUR, maître de musique, "ne satisfesant pas les vues de la compagnie, ni les aubligation[s] qui lui ont été prescrites lors de sa reception", sera prié de se retirer d'ici au 1er mars prochain. Probablement lui reproche-t-on un intérêt trop prononcé pour "l'art dramatique".
• 9 mai 1786, Paris : L’assemblée de la fabrique des Saints-Innocents, convoquée pour régler différentes affaires de discipline, statue que vu la satisfaction qu’elle a de sa conduite, l'abbé Jean François LESUEUR, maître de musique, "qui avoit eû le malheur de démériter de la compagnie, et qui à cet effet avoit été suspendu de son titre", sera rétabli aux mêmes conditions que lors de sa réception.
• 26 juin 1786, Paris : Jean François LESUEUR, clerc tonsuré du diocèse d’Amiens, actuellement maître de musique de la paroisse des Saints-Innocents, est nommé maître de musique et des enfants de chœur de l’église métropolitaine, après audition du rapport du chantre et des intendants de la maîtrise "touchant la capacité et les talens, vie et mœurs des sujets aspirants à la place de Maître de Musique de l’Eglise de Paris", aux honoraires et appointements accoutumés, payables à compter du 1er juillet prochain.

• 23 novembre 1786, Tours : Le chapitre de Saint-Martin lui réclame le paiement de différentes dettes. Les délibérations du chapitre contredisent quelque peu la version de LESUEUR, qui affirme en 1802 avoir obtenu un congé pour se rendre à Paris et n'avoir laissé aucune ardoise en partant : "Lesueur obtint du chapitre de Tours un congé d'un mois pour se rendre à Paris. Avant de partir, il se présenta au chapitre assemblé, et lui observa qu'il était dû une somme de 400 liv. à des fournisseurs, pour une solemnité que Lesueur avait exécutée dans l'église de St.-Martin. Il manifesta le désir que cette dette fût acquittée avant son départ. On lui compta les 400 liv. Lesueur tenait d'une main l'argent, et de l'autre son congé. Le chanoine, agent-comptable du chapitre, qui n'approuvait point l'augmentation d'orchestre que Lesueur avait introduite dans l'église de Tours, et qui payait à regret ce surcroît de dépense, eut l'audace d'apostropher Lesueur en pleine assemblée, et de lui dire : ‘Vous partez pour Paris, monsieur ; vous allez y faire chanter votre musique au concert spirituel. On vous retiendra peut être dans la capitale. N'est-ce pas pour votre voyage que vous demandez ces 400 liv., et paierez-vous les fournisseurs avant de partir ?’ Lesueur, par un mouvement aussi prompt que l'éclair : ‘Malheureux ! apprends à me connaître !’ et jetant à ses pieds le sac d'argent au milieu du chapitre, il sort précipitamment, va prendre les 400 liv. chez lui, court payer de ses propres deniers les fournisseurs, et part de suite pour Paris. Reçu, en y arrivant, maître de chapelle des SS. Innocens, il écrivit au chapitre pour lui demander des attestations de mœurs et de bonne conduite. Le chapitre les lui envoya, en lui témoignant les plus vifs regrets sur l'indécente conduite de son agent-comptable, et en le priant de recevoir les 400 liv. que le chapitre lui devait. Lesueur les refusa constamment, malgré les instances réitérées qui lui furent faites à diverses reprises. Charitables et véridiques accusateurs, voilà comme Lesueur est un frippon ! Voilà comme il a été chassé de l'église de Tours !".
• 24 décembre 1786, Paris : Au Concert spirituel, il fait donner une Scène française sur des paroles de J.-B. Rousseau, avec pour chanteur Leroux, de l’Académie royale de Musique. C'est la dernière fois que l'on y entend une composition de LESUEUR.

• 1786-1787, Paris : LESUEUR révolutionne la musique à Notre-Dame. "Lorsque M. l'Abbé le Sueur occupoit cette place [maître de musique], toutes les grandes solemnités furent célébrées par une musique extrêmement nombreuse et très-brillante. Avant lui, il n'y avoit de musique avec symphonie que dans toutes les cérémonies extraordinaires et le samedi veille de Pâques", écrit Framery dans le Calendrier musical universel de 1788. Selon le mémoire de 1802, LESUEUR avait dicté ses conditions et personne n'ignorait son projet : "Lesueur qui méditait depuis longtems une révolution utile dans la musique religieuse, osa déclarer qu'il n'entrerait à Notre-Dame que sous la condition qu'on y établirait une musique à grand orchestre, à l'instar de celle de la chapelle du roi. M. de Villequier, gentilhomme de la chambre, M. de Vergennes, écrivirent à ce sujet à M. de Juigné, archevêque. Le chapitre s'assembla, et sur la demande de Lesueur, il érigea, par un arrêté spécial, une musique à grand orchestre pour les grandes solemnités de l'année". Il n'en reste pas moins que beaucoup de chanoines conservateurs étaient réticents et que l'appel à des chanteurs de l'Opéra comme François LAŸS lors des cérémonies extraordinaires suscita bien des commentaires.
• [fin 1786], Paris : Le dernier compte de fabrique de la paroisse des Saints-Innocents porte qu'il est dû 1 620 livres 6 sols 8 deniers à l'abbé LESUEUR dont 1 523 livres 13 sols 4 deniers pour les "honoraires de sept mois de maître de musique et la nourriture de six enfants de chœur y compris 12 livres de la fondation de Mr Paul Olivier ancien curé, 30 livres pour le poisson de carême".

• Début 1787, Paris : LESUEUR fait paraître un Essai de musique sacrée, ou musique motivée et méthodique pour la fête de Noël, in-8°, et un Exposé d'une musique une, imitative et particulière à chaque solennité, en réponse à un pamphlet anonyme. La même année, sur les conseils de plusieurs hommes de lettres dont Chamfort, Marmontel et Lacépède et de ses anciens protecteurs de Dijon Villequier, Choiseul, Breteuil et Vergennes, LESUEUR présente son Télémaque à l'Opéra, qui accepte de recevoir l'ouvrage et lui verse une avance de 2 000 livres (été 1787). De plus en plus de chanoines de Notre-Dame sont remontés contre leur maître de musique : "D'un côté la publicité du traité de Lesueur, où respirait sa vocation pour la musique théâtrale ; de l'autre son aversion prononcée pour l'état ecclésiastique, et la réception notoire du poëme de Télémaque à l'opéra, commencèrent à lui aliéner une partie du chapitre de la métropole" (mémoire de 1802).

• 1er juillet 1787 : Les chanoines de Saint-Martin chargent leur agent dans la capitale, le chanoine Delavau, de réfléchir à tous les moyens, y compris juridiques de récupérer les sommes d'argent dues à la fabrique de leur collégiale par LESUEUR. Il semble évident que les chanoines de Notre-Dame sont tenus informés de cette démarche.
• 15 août-3 septembre 1787, Picardie : Après les fêtes de l'Assomption, LESUEUR obtient un congé et retourne dans sa province natale pour se reposer après plusieurs mois de travail. Il y retrouve son camarade de maîtrise René TIRON et un ami commun, Jean-Baptiste SENNEVILLE, ex-musicien de la cathédrale d'Amiens, devenu curé d'Ozangy. Tous les trois planifient un voyage en Angleterre, où ils donneraient des concerts. LESUEUR, qui a accumulé des dettes à Paris, y voit l'occasion de se renflouer, "mais il fallait avant tout la permission du chapitre pour une absence qui devait durer au moins un mois" (TIRON). LESUEUR lui écrit donc.
• 7 septembre 1787, Paris : "Lecture faite d'une lettre écrite d'Amiens par le sr LE SUEUR, maître de musique de l'Eglise de Paris, en date du 3 de ce mois, par laquelle il annonce à Messieurs un voyage hors du Royaume qui doit le rendre absent pour longtems et qui est un abandon réel de sa place ; Messieurs ont en conséquence déclaré ladite place vacante et ont arrêté qu'il sera procédé incessamment à l'élection d'un autre maître de musique". LESUEUR a joué de malchance : les chanoines qui le soutenaient avaient pour la plupart établi leurs quartiers à la campagne pour y superviser les travaux agricoles en cette fin de période estivale ; "il n’était resté à Paris que les vieux chanoines, qui n’étaient pas ses partisans, de manière qu’ils ne manquèrent pas de profiter de l’occasion où ils avaient la majorité dans leur compagnie pour lui jouer un mauvais tour" (TIRON). Le mémoire de 1802 évoque de son côté dix à douze chanoines formant un "comité clandestin [...] composé des antagonistes de la grande musique". LESUEUR, informé quelques jours plus tard alors qu'il séjournait au château de Brailly chez le baron de Maisniel, un mélomane, abandonne son projet de voyage et rentre sur-le-champ à Paris pour y plaider sa cause.
• 5 novembre 1787, Paris : Le chapitre charge le chantre, les intendants de la maîtrise et les sieurs Dumarais, Luca et Devienne de rechercher un "sujet capable de remplir la place vacante de maître de musique".
• 13 novembre 1787, Paris : Le chapitre fait lecture d'une requête de LESUEUR, ci-devant maître de musique, "tendante à ce qu'il plût à Messieurs en usant envers lui d'indulgence le réintégrer dans ladite place de maître de musique actuellement vacante". LESUEUR avait pris soin d'attendre le retour de tous les chanoines pour faire sa demande. Cependant, près délibération, "messieurs" maintiennent leur décision (à une voix près, selon TIRON) et demandent aux commissaires nommés le 5 de poursuivre leurs recherches pour leur présenter un remplaçant à la hauteur.
• 23 novembre 1787, Paris : Le chapitre envoie à LESUEUR un certificat de bonne vie et mœurs qui atteste qu'il a servi le chapitre de Notre-Dame du 25 juin 1786 au 7 septembre 1787.

• [1788], Paris : Télémaque n'étant pas mis en répétition à l'Opéra, LESUEUR en confie la partition au théâtre Feydeau.

• Fin 1788-1792, Paris : LESUEUR se retire chez Bochart de Champigny, un chanoine de Notre-Dame fortuné, dans la demeure duquel il trouve "les bienfaits d'une hospitalité gratuite et les soins de l'amitié la plus tendre". Il se consacre à la composition : il "passait habituellement les nuits au travail. Son bienfaiteur, après lui avoir fait longtems d'infructueuses remontrances à ce sujet, avait fini par donner l'ordre de ne lui laisser qu'une lumière suffisante pour l'éclairer au plus tard jusqu'à minuit. Lesueur composait la Caverne". Loin d'être coupé du monde, il fréquente des personnages influents : le "savant et infortuné" Bochart de Sarron, premier président du Parlement, le futur général Menou, Claude Antoine Gabriel de Choiseul, neveu du ministre de ce nom, et encore "M. Dessoles, oncle du conseiller-d'état actuel, et que le gouvernement vient d'appeler à l'un des sièges épiscopaux du midi ; MM. d'Espinasse et de Malaret, tous deux alors, et encore maintenant grands-vicaires de la métropole de Paris" (mémoire de 1802).

• [vers 1789], Paris : Selon le mémoire de 1802, il rembourse à l'Opéra l'avance de 2 000 livres perçue pour Télémaque, alors que d'après la convention de 1787, il aurait pu conserver la somme.

• 1792-1797, Paris : Après la mort de son protecteur, il emménage dans un modeste appartement rue Saint-Sauveur, puis rue de la Sourdière dans le faubourg Montmartre. Le 9 octobre 1793, il obtient une carte de sûreté de la section Bonconseil (5e arrondissement); il se dit âgé de 30 ans et natif d'Abbeville, se présente comme "auteur de musique" et déclare résider au 31, rue Saint-Sauveur, son précédent domicile étant au cloître Notre-Dame.

• 16 février 1793, Paris : Au théâtre Feydeau, LESUEUR donne La Caverne, opéra en trois actes dans lequel il introduit les chœurs syllabiques jadis utilisés par Rameau. La partition "fit pendant quinze ans la fortune du théâtre, grâce à l'incroyable énergie de ses chœurs et à la tournure originale de certains airs devenus populaires" (Berlioz). Il obtint un grand succès dans la capitale et peu de temps après à Rouen. LESUEUR monta l'opéra avec l'aide de CHERUBINI, qui dirigea les répétitions à sa place, les comédiens de Feydeau n'ayant pas entière confiance en cet ancien maître de chapelle. Vers la même époque, "il refondit presqu'en entier sa partition de Télémaque" (mémoire de 1802).
• 27 février 1793 : LESUEUR cède au directeur du théâtre de Toulouse son droit d'auteur sur l'opéra La Caverne. La propriété de ce droit lui sera rétrocédée par un traité du 8 août 1817.
• 21 novembre 1793 [1er frimaire an II]-juin 1795 [messidor an III], Paris : LESUEUR fait partie des 13 artistes supplémentaires à la musique de la garde nationale adjoints provisoirement à l’Institut national de musique à compter du 1er frimaire an II. Le traitement de 125 lt mensuelles est versé de ventôse an II à messidor an III.
• 1793 : Il signe une attestation dans un ouvrage de Claude HERMANT DE SAINT-BENOIST, maître de musique de Vannes, intitulé Nouvel hymnaire parisien, à l'usage des quatre-vingt-quatre Départements de la République Française. Y figurent les attestations de François-Robert DORIOT, Étienne MEUNIER D'HAUDIMONT, LE SUEUR "ci-devant maître de musique de Notre-Dame de Paris", Claude BALBASTRE, Philippe-Antoine DESPREZ, Gervais-François COUPERIN, VILLAUTEAU [sic] l'aîné, Jean-Jacques BEAUVARLET et Nicolas SEJAN.

• 13 janvier 1794, Paris : LESUEUR donne l'opéra en trois actes Paul et Virginie au théâtre Feydeau. "On admira surtout l'hymne du soleil, qui a été depuis fréquemment entendu dans les concerts publics" (Berlioz). Son opéra Tyrtée est reçu la même année au Théâtre des Arts mais non représenté.
• 30 janvier 1794 : LESUEUR et Huet passent traité avec Nadermann, éditeur de musique, par lequel ils lui accordent le droit exclusif de faire graver et vendre la grande partition de l'opéra La Caverne. Ce n'est que le 11 mars 1836 que Nadermann fils rétrocédera au compositeur et à sa femme les planches gravées de la partition.
 • Ordre est donné par le Comité de Salut public de mettre en musique un hymne pour le 20 prairial, à faire apprendre dans les 48 sections de Paris. LESUEUR est chargé de cette mission pour les Boulevards.

• 3 août 1795-23 septembre 1802, Paris : LESUEUR est l'un des cinq inspecteurs de l'enseignement à l'Institut national de musique (Conservatoire).

• 11 mai 1796, Paris : Il fait représenter la tragédie Télémaque au théâtre Feydeau. Le mémoire de 1802 expose qu'"après plusieurs années de démarches et de sollicitations infructueuses, il se vit forcé de retirer Télémaque du théâtre des Arts, pour le porter au théâtre Feydeau, où, dépouillé de son récitatif, de ses airs pantomimes, de ses morceaux de danse et de cette brillante magie du grand Opéra, il obtint encore un plein succès, grâce au zèle et aux talens des acteurs". Selon Berlioz, "L'air : Je veux voir à mes pieds Eucharis expirante, que chantait et jouait si bien la célèbre Mme Scio, est d'une grande vérité d'expression et l'un des plus beaux élans dramatiques que l'on connaisse".

• 11 juin 1801-vers juin 1802, Paris : Il effectue une brève carrière de professeur de composition hommes au Conservatoire ; "classe suspendue à dater de Messidor, thermidor et fructidor an 10" [juin à août 1802].

• 1801, Paris : L'opéra en trois actes Artaxerxès est reçu mais ne sera jamais représenté.

• Septembre 1802, Paris : LESUEUR est renvoyé du Conservatoire pour cause de dissensions avec le directeur Sarrette à la suite de la publication d'un écrit très critique d'un de ses amis contre la direction de l'institution.
• 24 décembre 1802, Paris : D'après un état de services de la Restauration, il commence à travailler, sans doute de façon ponctuelle et non officielle, pour la musique du Premier Consul. C'est probablement Paisiello, en froid avec la direction du Conservatoire, qui a fait appel à ses services.

• 11 avril 1804, Paris : Jean François LESUEUR est nommé directeur de la musique de l'Empereur à la place de Paisiello sur une proposition de ce dernier, qui venait d'obtenir l'autorisation de rentrer à Naples.
• 10 juillet 1804, Paris : LESUEUR fait donner Ossian ou les Bardes à l'Opéra. À la troisième représentation à laquelle Napoléon assiste, celui-ci le fait demander dans sa loge pour le féliciter. Il lui fait remettre le lendemain une tabatière d'or avec l'inscription L'empereur des Français à l'auteur des Bardes.
• 17 juillet 1804, Paris : Il est nommé chevalier de la Légion d'honneur, pour prendre rang à compter du jour même. 

• Vendémiaire an XIII (septembre-octobre 1804)-juin 1815, Paris : Jean François LESUEUR est mentionné sur les états des musiciens de la Chapelle impériale en qualité de directeur de la musique, avec 10 000 francs d'appointements annuels.

• 2 décembre 1804, Paris : La Marche triomphale de l'empereur, composée par LESUEUR, est jouée pour la première fois lors de la cérémonie du sacre de Napoléon à la cathédrale Notre-Dame.

• 2 juin 1806, Paris : Jean François LESUEUR épouse à la mairie du deuxième arrondissement Adeline Michelle Félicité Nathalisse Jamart, "fille de feu M. Jamart-Decourchamps [Jean Édouard Jamart de Courchamps, décédé en brumaire an V], ancien directeur des domaines et de l’enregistrement, etc., et petite-fille de Jean Jamart, ancien fermier-général du fils et du petit-fils du régent" (Journal de Mannheim), et de Marguerite Thérèse Félicité de Caïeux, qui meurt le 5 février 1825 à Versailles. Leur contrat de mariage, du 15 mai, a été signé par l'empereur et l'impératrice. L'épouse apporte 125 000 francs, LESUEUR 60 000 francs en meubles, habits, deniers comptants, créances actives. En 1837, la veuve du compositeur déclarera que cette dernière somme a été largement surévaluée : LESUEUR ne possédait d'après elle pas plus de 6 000 francs en effets personnelles et n'avait pas de dettes actives.

• 1806-1824, Paris : LESUEUR est membre du jury musical de l'Opéra.

• 1807, Paris : On fait jouer à l'Opéra L'Inauguration du temple de la Victoire (2 janvier) dont il a composé la musique avec Persuis, puis Le triomphe de Trajan (23 octobre). Ces deux opéras n'auront guère de succès.

• 17 mars 1809, Paris : Son opéra en trois actes La mort d'Adam est représenté au Théâtre des Arts (paroles de Guillard, ballets de Gardel), mais n'obtiendra pas le succès escompté. "L'air de Caïn est une des plus terribles inspirations que jamais homme ait léguée à l'art musical" (Berlioz). Trois anciens musiciens de Notre-Dame chantaient dans les chœurs ce soir-là : DEVILLIERS, PICARD et FASQUEL.

• 7 février 1814, Paris : Le père de LESUEUR meurt à un âge très avancé dans le quatrième arrondissement. La communauté a servi au vieil homme "que son grand âge avait mis dans l"impossibilité de subvenir à ses besoins et à son entretien" une pension alimentaire de 1 000 francs par an pendant 7 ans (inventaire de 1837).
• 24 septembre 1814, Paris : Jean François LESUEUR est nommé surintendant de la chapelle du roi, avec pour collègue Martin puis CHERUBINI. Ses appointements s'élèvent à 6 000 francs. Il occupe ces fonctions jusqu'en juillet 1830.

• 27 mai 1815, Paris : LESUEUR est nommé membre de l'Institut dans la section de composition musicale, au sixième fauteuil créé pour lui. "Il assistait avec exactitude aux séances de l’Académie. Il y a lu souvent des notices remplies de citations savantes et du plus grand intérêt sur son art", dira son collègue Garnier lors de ses funérailles. L'inventaire de 1837 mentionne, dans une commode, un "habit d'uniforme de membre de l'Institut" et, dans la bibliothèque, les Mémoires de l'Institut de France.

• Juillet 1815, Le Chesnay [Yvelines] : La maison champêtre des LESUEUR, près de Versailles, est dévastée par les Prussiens. Ses manuscrits sont détruits ou volés, y compris la partition d'Alexandre sur laquelle il travaillait depuis plusieurs années. Pendant vingt-quatre heures, il se dissimule dans la campagne avec sa famille, sans manger. Plus tard, il recomposera assez vite l'opéra perdu avec l'aide de sa femme.

• 1816, Paris : Il rédige une notice nécrologique sur Paisiello, publiée dans les Annales de musique de 1820. Il réside au n° 18, rue Sainte-Anne.

• 28 août 1817 : Un nouveau brevet de chevalier de la Légion d'honneur lui est délivré. Son traitement s'élève à la somme de 250 francs par an.

• 19 janvier 1818 : L'intendant général de l'Argenterie, Menus plaisirs et affaires de la Chambre du Roi, annonce par lettre à Jean François LESUEUR qu'il est nommé professeur de composition de l'École royale de Musique et de Déclamation, aux appointements de 3 000 francs.
• 1818-1837, Paris : LESUEUR exerce comme professeur de composition lyrique au Conservatoire. Plusieurs de ses élèves sont primés entre 1822 et 1838, parmi lesquels Hector Berlioz, Ernest Boulanger et Charles Gounod.

• 22 janvier 1819 : Il est nommé membre de l'Académie royale de musique de Stockholm.

• 15 décembre 1821 : LESUEUR cède à M. Laffilé, de Paris, un oratorio commençant en ré mineur et finissant en ut majeur destiné aux fêtes de Noël.

• 1823, Paris : Son opéra Alexandre à Babylone (livret de Pierre Baour-Lormian) est reçu mais non représenté. De tous ses opéras, c'était celui qu'il préférait, selon son élève Elwart. En 1837, sa veuve, son gendre et sa fille rappellent qu'il est l’auteur d'un opéra lyrique inédit en trois actes intitulé Alexandre à Babylone, dont la partition est "entièrement achevée" ; LESUEUR "se disposait à la mettre au jour quand la mort l'a frappé". Ils annoncent qu'ils sont dans l'intention de faire paraître cet ouvrage, ce qui leur occasionnera des dépenses élevées, prévoient-ils. 

• 29 mai 1825, Reims : Charles X est sacré roi. La musique exécutée pour l'occasion a été composée par LESUEUR.

• 1825-1831, Paris : Jean François LESUEUR est membre du conseil d'administration du Conservatoire puis, en 1832-1833, membre du comité d’enseignement chargé des examens et concours.

• Avril 1827, Paris : LESUEUR emménage avec sa femme et sa fille dans une maison au n° 2, rue Méhul, non loin de l'Opéra, qu'il loue à M. Payen de Flacourt. D'après l'inventaire de 1837, le compositeur y dispose d'un cabinet de travail éclairé sur la rue Neuve des Petits-Champs, meublé de quatre chaises de merisier et d'un fauteuil d'acajou foncé en basane verte (75 francs), un bureau, une petite table, un petit piano à cinq octaves du nom de Bresler (12 francs), un encrier en marbre et bronze (20 francs) et un corps de bibliothèque en bois peint à cinq rayons (8 francs). La bibliothèque contient notamment 32 volumes cartonnés et brochés, "musique d'anciens auteurs italiens" (32 francs) et 52 partitions de différents maîtres en musique français et italiens (40 francs).
• 8 août 1827 : Il est nommé membre de la Société philharmonique de Vienne.

• 23 juillet 1829 : Nadermann fils, chargé de pouvoir de sa mère, vend aux époux LESUEUR les planches gravées en partition des opéras Télémaque et Paul et Virginie, que LESUEUR avait autrefois cédées à Nadermann père.

• 9 septembre 1830, Paris : Une lettre annonce à LESUEUR la suppression de la place de surintendant de la Chapelle du roi.

• 10 octobre 1833, Paris : Sa fille Louise Eugénie Félicité épouse par contrat de mariage son ancien élève Dominique François-Xavier Boisselot, compositeur de musique. Elle reçoit une dot de 14 000 francs en avance de droits successifs, dont 10 000 sous forme de rente sur le pied de 5 % par an, soit 500 francs par an.

• 31 janvier 1835-23 février 1837, Paris : En cinq fois, LESUEUR dépose des épreuves de chacune de ses œuvres de musique sacrée au bureau de la Librairie du ministère de l'Intérieur pour en assurer la protection juridique.

• 31 mai 1836, Paris : Il est accordé à LESUEUR une pension de 3 000 francs annuelle et viagère sur la caisse de vétérance de l'ancienne liste civile, inscrite sous le n° 1270. Il ne la touche pas, "attendu qu'il jouissait d'un autre traitement comme professeur au Conservatoire", suivant la loi du 29 juin 1835 sur le cumul (inventaire de 1837).

• 6 octobre 1837, Chaillot : Jean-François LESUEUR, membre de l'Institut, chevalier de la Légion d'honneur, trépasse dans une maison de location où il résidait provisoirement, à l'âge de 74 ans. Il laisse une veuve, Adeline-Michelle-Félicité-Nathalisse Jamart, et deux filles, ses seules héritières : Louise-Eugénie-Félicité Lesueur, épouse de Dominique-François-Xavier Boisselot, compositeur de musique, demeurant à Marseille, et Clémentine-Françoise-Nathalisse Lesueur, majeure, demeurant avec sa mère. Le couple avait eu une troisième fille, Adeline, mais celle-ci était alors décédée.
• 10 octobre 1837, Paris : Lors de ses funérailles, son élève Elwart, qui considérait LESUEUR comme un second père, prononce des mots touchants : "Adieu donc, Lesueur !... Adieu, notre meilleur ami ! Dors en paix... tes jours ont été bien remplis ; tu laisses un beau nom parmi les hommes, une famille fière de toi, et des élèves reconnaissants qui béniront sans cesse ta mémoire vénérée".
• 30 novembre 1837, Paris : La veuve de LESUEUR fait dresser l'inventaire des biens de la communauté (rue Méhul). On y apprend que le couple avait eu une autre fille, Adeline, morte avant son père. La prisée des meubles et effets s'élève à la somme de 11 520 francs. La plus belle pièce de la maison est le salon, meublé d'une table de jeu, d'un guéridon à dessus de marbre granit creusé en acajou, d'une pendule en cuivre doré représentant l'Aurore au nom de Fléchel à Paris, d'un "meuble de salon" en acajou couvert de drap gris imprimé composé de quatre fauteuils, six chaises et un canapé d'une valeur de 310 francs et d'un "piano carré en bois d'acajou de Pfeiffre" (200 francs). Les bijoux, d'une valeur de 6 391 francs, comprennent une broche sertie de pierres précieuses d'une valeur de 2 000 francs et la fameuse tabatière en or ouvragé offerte à LESUEUR par Napoléon, estimée 400 francs. Dans un "cabinet noir", LESUEUR conservait 740 planches d'étain gravées de ses opéras Télémaque et Paul et Virginie pesant 550 kg (pour 555 francs) et 377 planches d'étain gravées de l'opéra La Caverne, d'un poids de 200 kg (300 francs). M. et Mme LESUEUR possédaient pour 101 700 francs d'obligations sur divers particuliers, souscrites entre 1830 et 1836, et une rente de 664 francs sur l'État à 5 %.

Mise à jour : 22 juin 2021

Sources
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